Attendu
depuis quelques semaines, le mouvement de concentration dans
le secteur du courtage en ligne est en marche. Hier, SelfTrade,
créé en 1997 et introduit en Bourse à
la mi-mars, a annoncé sa fusion avec l'allemand DAB,
numéro trois du courtage en ligne en Allemagne, et
filiale à 68,2% de Hypovereinsbank (HVB) (Lire l'interview
du co-président de DAB). C'est la deuxième fois,
dans le secteur, qu'un acteur allemand vient faire son marché
en France puisque l'an dernier Consors avait racheté
Euraxfin pour en faire sa filiale française. Cette
fusion fera de la nouvelle entité le numéro
trois euroépen du courtage en ligne, après deux
autres acteurs allemands Comdirect et Consors, avec 323.000
comptes et un volume d'actifs gérés de 12,5
milliards d'euros.
Pour absorber SelfTrade, numéro trois du courtage en
ligne en France avec plus de 30.000 comptes, DAB procédera
par un échange d'action (OPE), en proposant 1 de ses
actions contre 4 actions SelfTrade. L'opération valorise
le courtier en ligne français à 911 millions
d'euros. ce qui représente 15,5 euros par action SelfTrade
sur la base des cours du 12 septembre. Cette offre valoriserait
le client SelfTrade à près de 30.000 euros ,
un montant largement supérieur à ce qui se pratique
actuellement dans le secteur où les autres courtiers
en ligne valorisent le compte ouvert à moins de 20.000
euros. En clôture hier soir DAB, coté à
Francfort, reculait de plus de 10%, "un phénomène
normal et prévisible dans le cadre d'une OPE",
selon Mathias Kroner, co-président de la société
allemande. D'autant que la banque suédoise SEB, qui détient
20,4% de Self Trade, a d'ores et déjà annoncé la vente de
sa future participation dans DAB.
Une fois l'opération réalisée, 54,4% du capital seront entre
les mains de HVB, 7,7% aux principaux actionnaires de Self
Trade (notamment le management et les collaborateurs qui détiennent
actuellement 31,9% du courtier français) et 37,9% au public.
La cotation de Self Trade devrait rester suspendue cinq jours
et la "nouvelle entité née de ce mariage
sera réintroduite en Bourse de Paris sur le premier ou le
Nouveau Marché", selon les deux parties.
Pour Stéphane Prunet, directeur général
du courtier français,
"ce mouvement dans le secteur est logique car nous sommes
convaincus qu'il faut être absolument dans les trois
à cinq marques en Europe qui vont avoir 80% du marché
d'ici un an, comme cela s'est produit aux Etats unis avec
E-Trade, Ameritrade et Charles Schwab, deux ans auparavant".
La fusion avec DAB coulait donc de source selon lui puisque
"SelfTrade est présent dans des pays comme l'Italie,
l'Espagne et l'Angleterre où DAB est absente. En contrepartie
cela nous permet d'entrer sur le marché allemand par
la grande porte alors que nous avions du mal à nous
y implanter" .
Deux divisions seront d'ailleurs créées, la
première sous le nom de DAB qui s'occupera de l'Allemagne
et des marché limitrophes, et la deuxième sous
la marque SelfTrade pour gérer le développement
international, dont la France.
Charles Beigbeder, actuel président de Selftrade, sera
nommé au directoire du nouvel ensemble, en charge de
l'international.
Une fois la fusion entérinée, le groupe devrait
rapidement partir à la conquête de nouveaux clients
avec "des dépenses prévisionnelles de 100
millions d'euros pour le marketing et la communication".
"Si vous prenez un coût d'acquisition (par client) de
l'ordre de 400, 500 ou 600 euros, on arrive à un objectif
en termes de nombre de comptes assez important", expliquent
ainsi les nouveaux dirigeants. Les synergies en termes de
marketing sont loin d'être négligeables sur un marché très
concurrentiel, où les dépenses publicitaires grèvent lourdement
les comptes des courtiers, puisque SelfTrade
affiche une perte nette semestrielle de 15 millions d'euros,
contre un résultat positif (+0,2 million d'euros) avant impôts
et dépenses marketing, et DAB est tout juste bénéficiaire
d'un demi-million d'euros après dépenses publicitaires.
Les bases de clients seront elle complémentaires, puisque
ceux de DAB, des épargnants peu actifs (27 ordres par compte
et par an), investissent surtout en OPCVM et produits d'épargne
longue, alors que ceux de SelfTrade (95 opérations par compte
et par an) sont plus orientés sur les marchés boursiers",
a également souligné Charles Beigbeder.
Les deux
sociétés devraient enfin également échanger
leur technologie puisque DAB développe notamment un
produit, "trading after hours", qui permet l'achat
de titre en dehors des heures d'ouverture et qui "remporte
beaucoup de succès en Allemagne", selon Stephane
Prunet. DAB pourra en retour profiter des outils du Français
en matière de sélection d'actions et l'intégrer
à son offre.
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