Alors
que vendredi la fermeture de Napster semblait encore inéluctable,
l'avocat du site d'échange de fichiers MP3, David Boies,
a joué sa dernière botte secrète en pleine
audition : le déploiement immédiat d'un
filtre anti-piratage empêchant la circulation des morceaux
sous le coup de droits d'auteurs. Dès lundi, l'effet
d'annonce a été suivi d'une première
mise en pratique, avec le filtrage sur Napster de quelques
morceaux célèbres d'artistes de "gros calibres".
Parmi eux les Beatles (distribués par EMI), Metallica
(la Warner) et Jimi Hendrix (Vivendi Universal, récemment
allié sur Internet avec Sony Music) Des titres comme
"Yesterday", "Fade to Black" et "Purple
Haze" se retrouvent ainsi bannis de Napster. Un signe
de bonne volonté à chacune des majors plaignantes
et à la justice américaine...
Mais la
mise en place de ce premier filtre -hautement symbolique étant
donnée la renommée des artistes concernés-
pose un problème pour le moins inattendu : celui
de l'orthographe. Car si le napstérien qui lance une
recherche avec "Beatles" et "Yesterday"
fait désormais chou blanc, celui qui s'amuse à
modifier quelque peu l'orthographe ("Beetles", "Beattles",
"Yesterday2"...) trouve toutes les ressources souhaitées
sur Napster. De même, les requêtes "Jimmi
Hendrix", "Fade 2 Black" ou encore "Fade
into Black" permettent d'esquiver aisément le
filtre. En l'état, les fichiers MP3 n'étant
pas intrinsèquement codés pour indiquer leur contenu,
le filtrage proposé par Napster risque donc d'aboutir
à une surenchère orthographique de "contournement".
Les "Jaunie Halliday" et autres "Blouse Brothers"
guettent dangereusement l'Internet musical...
Conscient
du problème, Napster indique d'ailleurs sur son site
(lire le troisième thème de la rubrique
Q&A) avoir contacté les différentes
majors afin de développer en commun une application
permettant de filtrer les orthographes exactes et les dérivés
possibles des artistes et des titres. Dans le même temps,
Napster a également demandé aux labels de récupérer
leur catalogue afin d'alimenter son filtre et de "bloquer"
les titres sujets à des droits d'auteurs.
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Dans l'épineux
dossier de la musique en ligne, un nouveau bras de fer semble
donc se profiler sur le concept même de filtrage et
de format numérique. Si Napster arrive à mettre
la main sur les catalogues des majors, il lui devient alors
possible de mettre en place, très rapidement, un service
payant avec des reversements aux différents labels.
De quoi mettre les majors dans l'impasse face à leur
volonté affichée d'aller jusqu'au bout du procès...
A l'inverse, avec le problème du "filtrage orthographique",
les majors ont désormais un argument tout trouvé
pour tuer dans l'oeuf le MP3 et imposer leur propre format
numérique sécurisé.
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