"L'internet illimité
pour tous" fait fureur cette semaine. Dans une
lettre ouverte adressée aux pouvoirs publics,
qui a été publiée lundi dans cinq
titres de presse (Le Monde, Libération, Le Figaro, Les
Echos, La Tribune), une quarantaine d'acteurs du Net
(dont Isabelle Bordry de Yahoo France, Michel Meyer
de Lycos France, Jean-Marie Messier de Vivendi Universal,
Pierre Bouriez de Houra.fr, etc) ont publiquement apporté
leur soutien au collectif IFI
France, qui prône une réduction "significative"
des prix de gros d'accès au réseau téléphonique
de l'opérateur historique. Cette initiative liée
à l'interconnexion forfaitaire illimitée
(IFI), censée favoriser "la démocratisation
de l'Internet en France", permettrait aux fournisseurs
d'accès Internet (FAI) de proposer des forfaits
d'accès Internet illimité au grand public
à des prix compétitifs (200 francs par
mois environ).
Parallèlement à
l'action de l'IFI France, l'Association des fournisseurs
d'accès à Internet (AFA)
a publié lundi un communiqué de presse
sur le même thème : le développement
des offres d'interconnexion forfaitaires par le biais
du réseau téléphonique classique
favoriserait le déploiement "d'offres attractives"
pour le grand public. Or, l'AFA dresse ce constat :
"La généralisation des forfaits tout
compris illimités n'a pas eu lieu et se trouve
très compromise dans un avenir proche".
Dans cette intense activité de lobbying, AOL
France est en première ligne. Le FAI a publié
deux communiqués de presse en début de
semaine à ce sujet. Un vieux cheval de bataille
de son PDG, Stéphane
Treppoz, qui en profite pour renouveler sa demande
auprès de France Télécom de tarifs
d'interconnexion à des coûts similaires
à ceux actuellement pratiqués au Royaume-Uni
et en Espagne. Il faut dire que le FAI a "goûté"
à une offre d'accès Internet illimité
en septembre 2000, qui lui a certes permis d'augmenter
très rapidement son nombre d'abonnés mais
qui s'est également transformé en gouffre
financier et a de plus, sous l'afflux de la demande,
altéré la qualité de connexion
du FAI.
Toutes ces initiatives
de lobbying interviennent au moment où l'Autorité
de Régulation des Télécommunications
(ART)
et France Télécom sont sur le point de
valider les nouveaux tarifs d'interconnexion pour 2002.
Le nouveau catalogue devrait être parachevé
dans "quelques semaines", voire même
"d'ici fin octobre", glisse-t-on du côté
de l'opérateur. Les pressions s'accentuent depuis
les déclarations de Jean-Michel Hubert, président
de l'ART, qui a publiquement évoqué cet
été la possibilité de voir apparaître
des offres d'accès Internet illimité à
180 francs pour les utilisateurs finaux. Les FAI ne
voient pas comment monter un modèle économique
viable sur cette base, compte tenu des tarifs d'interconnexion
pratiqués actuellement. Ils estiment manquer
d'informations sur des points précis, notamment
sur la tarification de l'offre de rapatriement de trafic
téléphonique au niveau régional.
Un élément jugé crucial par les
FAI pour monter des formules d'accès Internet
illimité (cf interview
de l'Afa du 14/06/01).
De son coté, France
Télécom se défend de mettre des
bâtons dans les roues des fournisseurs d'accès.
L'opérateur historique indique qu'une offre d'interconnexion
dite "à la capacité", destinée
aux autres opérateurs télécom,
a été mise en place cet été.
Quatre opérateurs auraient accepté les
conditions et signé des accords avec France Télécom.
"Nous ne sommes qu'un fournisseur réseau
parmi d'autres (...) Les FAI devraient plutôt
se tourner vers les opérateurs télécom
pour savoir comment ils peuvent développer des
formules d'accès Internet illimité intéressantes",
indique-t-on du côté de l'opérateur
historique.
Le dernier bémol
concerne l'ordre des priorités en terme de régulation
télécom : faut-il mettre l'accent d'abord
sur l' IFI ou plutôt sur le dégroupage
? L'ouverture à la concurrence de la boucle locale,
qui permet à un opérateur télécom
de relier directement les utilisateurs finaux à
son réseau sans passer par l'intermédiaire
de France Télécom, a pour objectif d'accélérer
le développement d'offres ADSL en France. Club-Internet
(FAI rattaché à T-Online/Deutsche Telekom)
penche plutôt pour la deuxième bataille,
car le haut débit constitue un de ses axes forts
de développement.
Plus globalement, la résolution
de la question de l'IFI permettra-t-elle une réelle
"démocratisation" de l'Internet en
France, comme le pensent les signataires qui soutiennent
l'IFI France ? Avec l'IFI, peut-on prévoir une
vague de nouveaux internautes, susceptible de combler
le désormais fameux "retard français"
? En tout cas, L'AFA vient d'annoncer qu'elle a recensé
6,1 millions de comptes Internet ouverts ou actifs (chiffre
de juin 2001), contre 5, 9 millions de comptes le trimestre
précédent.
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