"Une
grenouille vit un boeuf qui lui sembla de belle taille..."
La fable de La Fontaine trouve avec la place de marché
américaine Enron
une interprète de choix. Ce trader en ligne,
à l'origine spécialisé sur les
marchés du gaz naturel et de l'électricité,
coté à Wall Street, affichait il y a encore
douze mois une capitalisation boursière de 71
milliards de dollars. A l'époque, la société
texane n'avait pas hésité à financer
la campagne présidentielle de George W. Bush.
Puis à se lancer vers d'autres secteurs d'activité,
comme le courtage sur les capacités des réseaux
télécoms.
Un
an plus tard, Enron n'est plus que l'ombre d'elle-même
avec une capitalisation de 7 milliards de dollars. De
quoi aiguiser des appétits. En début de semaine,
la presse britannique s'était déjà
fait l'écho d'un rachat possible de la place
de marché américaine par le groupe pétrolier
Royal
Dutch-Shell pour une offre à 11 milliards
de dollars. Dans son édition du 8 novembre, le
Wall
Street Journal révèle que le nouveau
propriétaire d'Enron devrait finalement être
Dinegy.
Cette autre place de marché américaine,
directement concurrente d'Enron, est détenue
à 26% par le groupe ChevronTexaco.
L'offre de Dinegy serait située entre 7 et 8
milliards de dollars de dollars en échange d'actions
auxquels s'ajouterait 1,5 milliard en numéraire.
Ce montant supplémentaire devrait être
injecté au capital d'Enron dès signature
afin de soulager la place de marché face à
ses difficultés financières.
La
contraction des marchés américains n'explique
pas à elle seule la descente aux enfers d'Enron.
Depuis la mi-octobre, la place de marché a vu
son titre plonger de 80% (de 37 à 7 dollars)
après avoir annoncé une charge exceptionnelle
de 1,2 milliard de dollars. Or cette charge, sur laquelle
enquête aujourd'hui la SEC (Security Exchange
Commision, l'équivalent de la COB aux Etats-Unis), serait
le fruit d'opérations comptables suspectes et
d'investissements opérés par un fonds
privé. Problème : ce fonds privé
a pour directeur associé Andrew Fastow, le directeur
financier d'Enron. Celui-ci a été remercié
par la place de marché le 24 octobre dernier.
Soutenue
par l'administration Bush, Enron a obtenu au début
du mois un engagement financier de 1 milliard de dollars
auprès de JP Morgan et de Citigroup afin de passer
le cap. L'offre Dinegy, qui tombe à point, devrait
permettre la constitution d'une place de marché
énergétique leader qui devrait se focaliser
sur l'Amérique du Nord et l'Europe. Chuck Watson,
l'actuel PDG de Dinegy, devrait en assurer la présidence.
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