Le 26 juin, le Conseil de la
concurrence a émis une décision concernant
les obligations de France Télécom en matière
de vente à prix coûtant de sa base de données
"annuaires". La baisse des prix ne serait
pas toujours respectée, estime l'autorité
de régulation, qui a étayé son
argumentation d'exemples précis de services France
Télécom. Après la publication d'un
premier article à ce sujet dans Les Echos datés
du 28 juin, l'opérateur public a voulu apporter
son éclairage sur ce dossier technique qui tourne
autour d'un point central : le prix à l'accès
"donnée annuaire" et les tarifs pratiqués
vis-à-vis des concurrents de France Télécom.
Groupe Fonecta (ex-Sonera, exploitant le service de
renseignement 3211) et Scoot France (Vivendi Universal
Net) ont d'ailleurs porté ces sujets de litige
devant le Conseil de la concurrence, respectivement
en juillet 2000 et juillet 2001.
"La
décision du Conseil de la concurrence du 26 juin
entre uniquement dans le cadre d'une procédure
de suivi d'injonction", affirme Olivier Fauqueux,
directeur juridique Internet grand public de France
Télécom et de Wanadoo. Le document issu
de l'organe de régulation serait donc, à
son sens, une sorte de rappel des obligations de France
Télécom qui doit favoriser la vente à
un tarif proche du prix coûtant de sa base de
données "annuaire" à destination
des exploitants de services de recherche par annuaire.
D'ailleurs, France Telecom ne se prive pas de rappeler
qu'aucune amende n'a été fixée
à cette occasion. En juin 1999, la Cour d'appel
de Paris avait condamné France Télécom,
lui enjoignant de "mettre sa base annuaire à disposition
de tous ceux qui le demandent à des conditions transparentes
et objectives, et orientées vers les coûts techniques
nécessaires pour répondre à cette demande."
Sur le nouveau document du
Conseil de la concurrence, deux griefs principaux sont
faits à France Télécom : le premier
concerne les modalités de l'offre de sa filiale
Intelmatique, dédiée à la consultation
ponctuelle de données issues de la base annuaire
à des fins professionnelles de renseignement.
"Les prix de consultation de la base annuaire via
[...] Intelmatique ne sont pas orientés vers
les coûts", expose le rapporteur du Conseil
de la concurrence. Le second grief porte sur les prix
de cession des données annuaire pour les opérateurs
alternatifs souhaitant exercer un service de renseignement
sans s'étendre à des activités
d'éditions d'annuaires imprimés. Ces prix
auraient un caractère "discriminatoire"
par rapport à ceux pratiqués au sein du
groupe France Télécom.
Un point fondamental reste
en suspens, qui va nécessiter une expertise supplémentaire
de la part du Conseil de la concurrence ("sursis
à statuer") : l'orientation globale des
offres principales d'accès par France Télécom
à sa base "annuaire" vers ses coûts
véritables est-elle objective ? Une interrogation
liée aux relations intra-groupe surgit en parallèle
: les Pages Jaunes (filiale de Wanadoo/France Télécom),
leader des services d'annuaires en France, reverse-t-elle
la juste quote-part liée à ces coûts
à sa maison-mère ? Là aussi, le
document du Conseil de la concurrence ne statue pas
définitivement sur ce point, mais le rapporteur
semble estimer que Pages Jaunes est favorisée
vis-à-vis de ses concurrents.
Pour sa défense, France
Télécom rappelle que sa base annuaire
est "une des plus grosses et des plus perfomantes
dans le monde" (elle comprend 30 millions d'adresses,
un tiers de la base est renouvelé chaque année
et 60.000 mouvements sont observés chaque jour).
Conséquence : les coûts de gestion et de
mise à jour de la base annuaire sont évalués
à 30 millions d'euros par an, indique le service
de communication de France Télécom.
Du côté des acteurs
alternatifs, on suit avec intérêt l'évolution
du dossier, ne serait-ce que parce que certains en sont
les principaux initiateurs ! Pour Scoot France, la décision
du Conseil de la concurrence "va dans le bon sens
en terme de concurrence". Bruno Massiet du Biest,
directeur général de l'annuaire français
de mise en contacts avec les professionnels (Internet,
téléphone fixe et mobiles), affirme que
son entreprise verse 1,1 million d'euros par an pour
accéder à la base professionnelle des
Pages Jaunes, qui comprend 3 millions de contacts. "C'est
pesant dans les comptes d'une start-up, estime Bruno
Massiet du Biest. Actuellement, chaque donnée
vaut 0,30 euro. Nous pensons que nous pouvons parvenir
à 10% de ce prix à l'unité."
Scoot France espère également que la prochaine
décision du Conseil de la concurrence apportera
des éclaircissements sur les conditions d'exploitation
pour son propre compte d'un pendant "pages blanches",
en complément de son service de renseignements
professionnels.
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