Vu d'Europe, le paysage américain de l'accès Internet se caractérise par des particularités majeures. Tout d'abord par sa taille : plus de 130 millions d'internautes recensés. Ensuite par sa diversité, directement issue de la dérégulation des télécoms opérée au milieu des années 80 avec le démantèlement d'AT&T. A ce jour, les Etats-Unis disposeraient ainsi de plus de 350 FAI grand-public (source TheList), la très grande majorité n'ayant qu'une couverture locale. Malgré tout, ce chiffre est loin d'être un record pour les Etats-Unis. Au début de l'année 1996, on recensait en effet quelques 1.800 FAI grand public américains. Mais au cours des dernières années, le marché de l'accès Internet américain a été le théâtre d'une très forte concentration, puis d'une rationalisation qui a vu bon nombre de FAI mettrent la clef sous la porte. Enfin, dernière particularité, et non des moindres : l'Amérique est le berceau du FAI historique et N°1 mondial. Un certain America Online.

Le cas d'AOL, qui sur ses 28 millions d'abonnés dans le monde concentre la très grande majorité de sa clientèle aux Etats-Unis, fait figure d'exception sur l'échiquier mondial de l'accès Internet. Créé en 1985, le FAI est aujourd'hui implanté dans 16 pays et a déployé son propre environnement Internet (navigateur, messagerie, e-mail...) lui permettant d'avoir une stratégie très captive auprès de sa clientèle. Après avoir récupéré les abonnés de Netscape, de Compuserve et de Gateway, AOL, aujourd'hui allié à Time-Warner, prend le virage de la communication globale, où musique, télévison, cinéma et services seront amenés à être déclinés sur différents supports.

Entre AOL et les autres FAI, le fossé apparaît terriblement profond. EarthLink, le fournisseur d'accès N°2 aux Etats-Unis, ne pèse ainsi "que" 20% d'American Online en terme d'abonnés. EarthLink, fournisseur d'accès créé en 1994, a gagné sa deuxième place en fusionnant en février 2000 avec MindSpring, un autre FAI lancé en 1994. Cette nouvelle entité, qui regroupe 4,3 millions d'abonnés, dispose d'un effectif global d'environ 5.500 personnes pour un chiffre d'affaires 2000 de 986,6 millions de dollars et des pertes nettes de 369,7 millions de dollars. Aussi bien installé dans l'accès téléphonique, que la câble (avec AT&T) et l'ADSL, EarthLink est coté sur le Nasdaq depuis janvier 1997.

En troisième du classement, se trouve le premier FAI américain proposant de l'accès gratuit. Juno, lancé en 1995 et présent dans l'ADSL et le câble (avec Time Warner), a réalisé un chiffre d'affaires 2000 de 114 millions de dollars pour des pertes nettes de 13,4 millions de dollars. Coté sur le Nasdaq depuis mai 1999, Juno a notamment récupéré en 2000 les abonnés de WorldSpy et Freewwweb, deux FAI gratuits qui ont cessé leurs activités. Au coude à coude avec Juno, NetZero est lui aussi un FAI gratuit. Créé en 1997, via un financement basé par une bannière permanente (à l'instar d'Oreka en France), NetZero a lui aussi bénéficié de la rationalisation sur le marché de l'accès en récupérant en octobre 2000 les actifs de Freei Network. Coté sur le Nasdaq depuis septembre 1999, NetZero a réalisé pour le premier semestre de l'exercice 2001 un chiffre d'affaires de 32,5 millions de dollars pour des pertes nettes de 72,2 millions de dollars.

[Philippe Guerrier - Ludovic Desautez, JDNet]