Dossier
 
10/05/2007

Le fingerprinting sauvera-t-il le partage de vidéos sur le Net ?

Cette technique de filtrage automatique des contenus permettrait de lutter contre la violation du droit d'auteur. Une solution qui retient l'attention de toutes les plates-formes vidéo.
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Visionner l'intégralité des séries Lost et Heroes ou encore le dessin animé japonais Naruto gratuitement sur Internet ? Illégal, mais pourtant bien possible. Certains sites pirates issus de pays exotiques en ont fait une spécialité. Leur méthode : proposer des catalogues de liens vers des vidéos hébergées sur des dizaines de plates-formes, y compris les plus réputées telles que YouTube et Dailymotion.

 

Ces plates-formes connaissent aujourd'hui un succès tel qu'il leur devient difficile de supprimer systématiquement les vidéos pirates de leur propre initiative. Les ayants droits qui sont en droit de réclamer un nettoyage ne peuvent eux aussi plus suivre le rythme. La solution : le fingerprinting, une technologie de filtrage automatisé capable de séparer le bon grain de l'ivraie.

 

"Ni YouTube ni Dailymotion ne contestent avoir l'obligation de retirer le contenu illégal une fois qu'il a été signalé. Mais cela ne répond pas au problème de la première mise en ligne". Jacques Peskine, le délégué général de l'Union Syndicale de la Production Audiovisuelle (USPA) résume ainsi en quelques mots le différend qui oppose aujourd'hui les ayants droits aux plates-formes vidéo : comment empêcher, dès le départ, les internautes de publier des vidéos non libres de droits et ainsi éviter que certaines ne passent entre les mailles du filet ?

 

La solution existe : le fingerprinting. Elle est déjà utilisée par certaines plates-formes et non des moindres : Soapbox de Microsoft et MySpace utilisent ainsi un logiciel développé par la société Audible Magic capable d'identifier les contenus protégés par le droit d'auteur. Lorsqu'une vidéo est uploadée, le logiciel en récupère une empreinte numérique unique et la compare à une base de données centralisée. Si l'empreinte correspond, la vidéo est alors immédiatement identifiée comme problématique.

 

Audible Magic, qui n'est pas le seul à développer ce type de solution, promet ainsi 99 % d'efficacité à condition que la qualité de l'image et du son soit correcte. La base de donnée centrale de contenus légaux est alors constituée par Audible Magic qui détiendrait aujourd'hui près de 7 millions d'empreintes.

 

YouTube a choisi Audible Magic, mais développe sa propre solution

YouTube avait promis de commencer à filtrer les vidéos dès la fin de l'année 2006. En définitive, le premier test devrait intervenir d'ici le mois de juin. NBC et Universal sont invités à assister à cette première démonstration avant le lancement officiel prévu pour l'été. C'est encore une fois Audible Magic qui a été choisi, mais YouTube continue cependant de développer sa propre solution en parallèle.

 

Dailymotion a, lui aussi, opté pour Audible Magic. Le dispositif est en cours de déploiement, mais aucune date de mise en production n'est précisée. Le filtrage aura lieu avant l'encodage de la vidéo en Flash. Si elle est identifiée comme illégale, elle ne sera ainsi pas publiée en ligne. Dailymotion précise toutefois que seules des empreintes audio étaient pour le moment testées. Une solution vidéo est à l'étude.

 

Les ayants droits devront cependant mettre la main à la pâte, puisque c'est à eux que revient la mission de contacter les prestataires pour leur soumettre leurs empreintes. Différents modèles de licences sont cependant étudiés par les principaux acteurs. Si Dailymotion a choisi de supprimer a priori les vidéos illégales, ce n'est pas l'approche de YouTube qui souhaite mettre une seconde fois à contribution ses partenaires. Une vidéo illégale sera ainsi signalée aux ayants droits qui devront alors réaliser une demande de suppression explicite.

 

Si YouTube a opté pour un process aussi alambiqué c'est avant tout pour se protéger. En effet, le Digital Millenium Copyright Act protège les fournisseurs de services contre d'éventuelles plaintes dans la mesure où ils n'ont pas une connaissance des contenus qu'ils hébergent. Si YouTube choisissait de supprimer directement les vidéos jugées illégales, il assumerait de façon implicite avoir connaissance des contenus. Dès lors toute erreur lors de la détection des vidéos pourrait conduire les ayant droits à mener une action en justice.

 

Des questions techniques, juridiques et de volumes encore en suspens

MySpace a opté pour une autre approche. Pour chaque vidéo identifiée, une demande d'autorisation de publication sera formulée à ses partenaires actuels : Universal, NBC et Fox. Les futurs revenus publicitaires liés à ses vidéos seront ainsi partagés automatiquement avec ces derniers.

 

Mais le fingerprinting est encore loin de constituer la baguette magique qui transformerait le piratage en juteux marché publicitaire. Une première limite est liée au volume de vidéos diffusé chaque jour sur l'ensemble des grandes chaînes TV. Un flot de contenu très important qui impliquerait une base de données d'empreintes phénoménale et en croissance exponentielle. L'extraction de données en deviendrait de plus en plus longue et complexe.

 

D'autre part, la technique du fingerprinting doit encore être améliorée. Pour le moment seules des empreintes acoustiques sont véritablement efficaces à condition que la bande son soit de bonne qualité, ce qui n'est pas toujours le cas. Tant que des empreintes vidéo de qualité ne pourront pas être réalisées avec certitude, il sera également impossible de réaliser le partage des revenus avec les ayants droits puisqu'une vidéo ne correspond pas toujours à une bande son donnée.

 

 
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Enfin, et c'est peut être la raison pour laquelle les grandes plates-formes se regardent en chien de faïence, le fingerprinting induit le risque non négligeable de voir les utilisateurs déserter une plate-forme pour aller en utiliser une autre plus permissive et hébergées dans des pays aux cadres juridiques moins stricts.


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