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Self
Trade, Uniondream, Château Online : vous avez beaucoup de
"BtoC" dans vos investissements. Ce secteur vous
tient-il à cur ?
Michele Appendino.
Oui, car on a commencé quand
les "corporate" n'y croyaient pas et c'est une grande
fierté. En 1997, on a senti tout de suite une vraie opportunité
et c'est vrai qu'on a été parmi les premiers à investir dans
l'Internet à une époque où on nous traitait
presque de fous. Avec Self Trade, on a par exemple été quasiment
les premiers à miser sur le courtage en ligne et quand on
voit l'explosion du secteur ensuite, on se dit qu'on a fait
un excellent choix. Idem d'ailleurs pour les enchères, où
nous avons participé à l'amorçage de QXL, et dans le secteur
du vin, où nous détenons une participation dans Château Online.
On a donc souvent un avantage de premier entrant.
Mais le
"BtoC" bat de l'aile en ce moment. Allez-vous continuer
à investir dans ce domaine ?
Cela dépend. C'est vrai qu'en ce moment, on est dans une logique
de diversification et que l'on veut toucher tous les secteurs
de l'internet, que ce soit du "BtoB" financier,
comme avec "Bfinance", ou du haut-débit. Mais le
"BtoC" a encore de bonnes opportunités. A mon avis,
et je n'ai pas varié depuis 1997, il faut se poser les bonnes
questions. Dans ce secteur, il ne faut pas se demander pourquoi
les gens vont acheter sur Internet, mais, et la différence
est fondamentale, pourquoi les gens doivent acheter sur Internet.
Le problème dans ce secteur est aussi qu'à la fin de
l'année 1999, il y a eu une mauvaise spirale où l'on
a assisté à une déconnexion entre la valeur
réelle du business et sa valeur virtuelle. L'affaire Boo.com
n'a pas arrangé les choses, même si l'ampleur de cette
faillite m'a semblé démesurée. Car plus que les millions partis
en fumée, c'est le cur du business de Boo.com, la vente en
ligne de vêtements, qui était en cause. Cela
n'aurait donc pas dû remettre en question tout le "BtoC",
car dans le domaine financier ou celui du vin, le business
sur Internet reste solide. Les bonnes "start-up"
arriveront donc sans trop de problèmes à d'énormes profits,
notamment quand elles sont des "click and mortar".
Avec
un fonds de nationalité italienne, vous investissez
beaucoup en France. Pourquoi ?
Tous simplement parce qu'en matière d'Internet,
ce pays est intermédiaire en Europe et que sa croissance est
énorme. Entre l' Europe du Nord, où le business est saturé,
et l'Europe du Sud, où le terrain reste à défricher, la France
constitue une excellente
plate-forme de départ pour une "start-up". Parallèlement
à cela, le Minitel est un avantage considérable chez vous
car les gens ont été habitués à manier un appareil
pour commander leurs produits.
Vous n'avez pas de bureau dans
l'Hexagone. Comment arrivent les dossiers chez vous ?
Par le réseau. J'ai suivi des enseignements à l'INSEAD de
Fontainebleau et je connais évidemment beaucoup de monde dans
le milieu des affaires grâce à cela. Pour Self Trade, je connaissais
par exemple tous les fondateurs avant qu'ils ne créent leur
société. Le reste des projets dans lesquels nous avons investis
provient essentiellement des entrepreneurs de notre portefeuille.
Uniondream nous a, par exemple, été amené
par une société que nous avons financée.
Vous
intervenez souvent en amorçage, comme les incubateurs. Que
pensez-vous de ce type de structure ?
Je suis partagé. Il y en a effectivement qui sont très utiles.
Idealab est à mon sens une réussite par exemple. Mais je ne
sais pas s'il existe une vraie opportunité pour 67 incubateurs
en Europe, comme c'est le cas actuellement. Le problème
majeur de ces structures est qu'elles n'ont pas d'historiques.
Les entrepreneurs auront donc des choix difficiles à faire
et iront peut-être plus volontiers vers des fonds plus
expérimentés.
La baisse
des valorisations change-t-elle votre approche ?
Non, mais le métier en général va revenir à plus de réalité.
Je pense que certains investisseurs institutionnels qui se
sont sentis obligés d'investir au moment de la spirale Internet
ont perdu beaucoup d'argent. Or, quand vous avez perdu 75%
de votre mise, vous êtes plus méfiant à
l'idée d'investir dans l'Internet. Les entrepreneurs
sont aussi moins gourmands depuis le krach. Au mois de janvier,
il n'était pas rare de voir des jeunes de 20-25 ans
venir vous demander 20 millions d'euros alors que leur entreprise
ne les valait pas.Mais, en même temps, la folie boursière
aura dopé le business car avant, il était presque inimaginable
de rentrer en Bourse pour une start-up. Ce mode de sortie
va donc favoriser l'apport de capitaux dans le métier, ce
qui est une excellente chose.
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