INTERVIEW
 
Directeur e-business
Crédit Lyonnais
Olivier de Conihout
"Titre"
Après avoir digéré sa période de crise, le Crédit Lyonnais mène depuis plusieurs mois une politique plutôt agressive sur Internet. La banque a ainsi ouvert en mai dernier son site de courtage en ligne, TopTrades, et vient de lancer sa banque 100% en ligne baptisée e.Créditlyonnais (Lire l'article du JDNet du 04/09/00). Olivier de Conihout, directeur e-business du Crédit Lyonnais, revient sur ces nombreux chantiers et sur la mutation Internet en cours dans le secteur financier. 21 septembre 2000
 
          

JDNet. Vous êtes arrivé en mai 1999 au Crédit Lyonnais. Quel était alors l'état des lieux sur le plan des activités Internet ?
Olivier de Conihout. Je suis venu au Crédit Lyonnais parce que la banque me semblait déjà très en pointe sur Internet. Cette analyse a été confirmée par la façon dont j'ai été recruté : en moins de 48 heures… Plus sérieusement, en 1999, le Crédit Lyonnais caractérisait bien ce qu'était alors la gestion des grands comptes face à l'Internet. Beaucoup de chantiers et d'initiatives coexistaient dans une certaine ébullition. Le tout n'étant pas toujours orchestré. Parallèlement, le Crédit Lyonnais possédait de réels atouts sur ses activités Internet. La banque avait lancé dès juillet 1997 son service bancaire en ligne, Crédit Lyonnais Intercatif. Mais surtout, le Crédit Lyonnais avait déjà préparé son informatique à la montée en puissance des services virtuels. Beaucoup d'acteurs ont cru que pour se lancer dans l'Internet il suffisait d'ouvrir un site à l'esthétisme léché. On a vu le résultat d'une telle stratégie par la suite… Le Crédit Lyonnais a préparé ses fondations informatiques pour être capable d'intégrer la gestion de la relation client. C'est la partie la moins visible du chantier Internet d'un grand compte, mais c'est la plus longue, la plus onéreuse et la plus indispensable.

Quel est le bilan des différentes activités électroniques du Crédit Lyonnais ?

Le Minitel connaît toujours un succès important et n'enregistre pas une forte érosion. Nous avons environ 400.000 utilisateurs sur ce service sur un total de 6 millions de clients. Du côté de l'Internet, les choses se sont considérablement accélérées au cours des derniers mois avec une croissance du nombre d'utilisateurs de l'ordre de 40% pour le premier semestre 2000. Nous dénombrons environ 230.000 utilisateurs sur le site Crédit Lyonnais Interactif. Avec e.CréditLyonnais nous espérons glaner 20.000 nouveaux clients en ligne. Aujourd'hui, environ 10% de la population française surfe sur Internet. Si l'on rapporte cette proportion au nombre de clients que nous avons, c'est-à-dire 6 millions, notre potentiel est de 600.000 utilisateurs. Nous en sommes au tiers. C'est déjà un bon résultat. Entre le déploiement des outils informatiques internes et cette expérience de plusieurs années sur les services en ligne, le Crédit Lyonnais est aujourd'hui la banque française la plus avancée sur l'Internet.

Comment définiriez-vous la population cible de ces services en ligne ?
Les utilisateurs de services financiers en ligne se répartissent en trois catégories qui sont bien connues : les jeunes, les cadres et les jeunes retraités, notamment pour le trading. Nous sommes également sur une population majoritairement urbaine. Mais le point le plus intéressant reste le comportement de cette clientèle internaute. C'est une population très active au niveau financier, qui pratiquent beaucoup d'opérations et qui vient très souvent en agence. Bien plus que la population qui n'utilise pas Internet. Ce point est crucial car nous sommes réellement dans le cas d'école du click and mortar : les services en ligne et en temps réel doivent être épaulés par un réseau physique de succursales.

Comment ont été menés les chantiers TopTrades et e.CréditLyonnais ?
Pour un grand groupe, comme le Crédit Lyonnais, la gestion d'un chantier Internet demande une certaine adaptation structurelle. Il faut être capable d'avoir autant de réactivité et de flexibilité qu'une start-up tout en impliquant un effectif de 40.000 personnes et 2.000 lieux d'implantation dans le monde. Il ne suffit donc pas de mettre 500 personnes qui planchent sur l'Internet dans une tour à la Défense pour que les choses avancent… La logique que nous avons suivie est celle du plateau sur lequel nous regroupons les équipes nécessaires pour mener un projet. Mais dans le même temps, l'Internet est par nature un support qui s'irradie à tous les niveaux de l'entreprise. Il faut donc savoir laisser germer des projets au sein des services. Un autre point me paraît très important : éviter les effets d'annonce sur les services en ligne. Nous préférons roder ces services plusieurs mois en sous-marin avant de communiquer dessus. C'est le cas de TopTrades, qui a été lancé en mai 2000, et sur lequel nous allons lancer une campagne de publicité dans les prochains jours.

Quels sont les moyens humains et financiers qui ont été mis en œuvre sur ces chantiers ?
Il y a deux façons de répondre à cette question. Une façon globale, qui consiste à dire que ce sont 40.000 personnes qui ont été impliquées, formées et qui ont participé de près ou de loin à la mise en place de tel ou tel service Internet. Si l'on raisonne dans cette dimension, on englobe également toute la mutation informatique nécessaire en interne. Il s'agit alors d'un chantier global de plusieurs milliards de francs sur plusieurs années. Si, au contraire, on raisonne de façon ponctuelle sur l'ouverture de TopTrades ou de e.CréditLyonnais, alors ce sont des chantiers qui durent environ une année, qui mobilisent une centaine de personnes et qui coûtent une dizaine de millions de francs.

Jusqu'où peut aller le besoin d'indépendance structurelle des services Internet pour un grand compte ?
Pour TopTrades nous avons opté pour une filialisation. A l'inverse, e.CréditLyonnais est gérée pour l'instant comme une branche ou une agence supplémentaire. Il me semble que sur Internet il est important que les grands groupes se donnent les moyens de la réactivité et ce, quelque soit la stratégie nécessaire. Par exemple, avant de créer TopTrades, nous avions étudié les propositions d'adossement que nous lançaient certains acteurs déjà présents sur le courtage en ligne. Les offres étaient trop onéreuses et la valeur ajoutée nous apparaissait médiocre. En revanche, pour CLmarkets.com, qui est une plate-forme d'investissement pour les entreprises, nous avons opté pour une joint-venture avec le danois Internet Invest Holding. Le partenariat est une possibilité que nous envisageons volontiers.

En juillet dernier le Crédit Lyonnais pris une participation dans la Web-agency Image Force. A quoi correspond cet investissement ?
Notre entrée dans le capital d'Image Force répond à deux objectifs : développer nos futurs services Internet mais aussi favoriser l'incubation de projets qui nous semblent prometteurs. Nos initiatives sur les services en ligne vont être de plus en plus nombreuses. Il nous fallait donc une "boîte à outils" grâce à laquelle nous pouvions gérer en interne l'ensemble des chantiers.

Après 18 mois de présence au Crédit Lyonnais, avez-vous l'impression que la donne a changé sur Internet ?
En deux ans, l'investissement nécessaire pour lancer un projet Internet est passé de quelques centaines de milliers de francs à quelques dizaines de millions. Je crois que c'est assez symptomatique de la professionnalisation qui est en marche dans ce secteur. Avant, les sites étaient considérés comme des vitrines, maintenant on raisonne en terme de rentabilité et de stabilité.

Quels sont les chantiers Internet en cours au Crédit Lyonnais ?
Ils sont nombreux et dans tous les domaines : grand public, professionnel, institutionnel… Mais, concurrence oblige, je n'en parlerai pas tant que les services ne sont finalisés et validés. La seule chose que je puisse aujourd'hui dire c'est qu'avant la fin de l'année nous lancerons des services très ambitieux. Parallèlement, nous allons harmoniser la cinquantaine de sites qui existent au Crédit Lyonnais.

Depuis combien de temps surfez-vous ?
Je pense que cela fait cinq ou six ans.

Quels sont vos sites préférés ?
Je vais beaucoup sur les sites d'information mais je surfe peu par plaisir. Je crois que je préfère les portails, comme Yahoo, à partir desquels on peut trouver de l'information.

Avez-vous déjà acheté sur Internet ?
Oui et depuis longtemps déjà… Des livres, une voiture et, le week-end dernier, un lit !

En qualité de banquier, le paiement sur Internet ne vous effraie pas ?
Très franchement non. A chaque fois que j'ai constaté des débits inexpliqués sur ma carte bancaire, la fraude provenait non pas de l'Internet mais de l'utilisation de sabots pour des paiements à l'étranger.

 
Propos recueillis par Ludovic Desautez

PARCOURS
 
Olivier de Conihout, 43 ans, est directeur e-business au Crédit Lyonnais depuis mai 1999. Ingénieur de l'Ecole Polytechnique, il a travaillé pendant 5 ans chez CPR, où il s'est notamment occupé du back office puis de la clientèle privée. Il a également cofondé une start-up, C-sports, revendue depuis à 365 Corporation.

   
 
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