JDNet.
Vous êtes arrivé en mai 1999 au Crédit Lyonnais. Quel était
alors l'état des lieux sur le plan des activités Internet
?
Olivier de Conihout.
Je suis venu au Crédit
Lyonnais parce que la banque me semblait déjà très en pointe
sur Internet. Cette analyse a été confirmée par la façon dont
j'ai été recruté : en moins de 48 heures
Plus sérieusement,
en 1999, le Crédit Lyonnais caractérisait bien ce qu'était
alors la gestion des grands comptes face à l'Internet. Beaucoup
de chantiers et d'initiatives coexistaient dans une certaine
ébullition. Le tout n'étant pas toujours orchestré.
Parallèlement, le Crédit Lyonnais possédait de réels atouts
sur ses activités Internet. La banque avait lancé dès juillet
1997 son service bancaire en ligne, Crédit
Lyonnais Intercatif. Mais surtout, le Crédit Lyonnais
avait déjà préparé son informatique à la montée en puissance
des services virtuels. Beaucoup d'acteurs ont cru que pour
se lancer dans l'Internet il suffisait d'ouvrir un site à
l'esthétisme léché. On a vu le résultat d'une telle stratégie
par la suite
Le Crédit Lyonnais a préparé ses fondations
informatiques pour être capable d'intégrer la gestion
de la relation client. C'est la partie la moins visible du
chantier Internet d'un grand compte, mais c'est la plus longue,
la plus onéreuse et la plus indispensable.
Quel
est le bilan des différentes activités électroniques du Crédit
Lyonnais ?
Le Minitel connaît toujours un succès important et n'enregistre
pas une forte érosion. Nous avons environ 400.000 utilisateurs
sur ce service sur un total de 6 millions de clients. Du côté
de l'Internet, les choses se sont considérablement accélérées
au cours des derniers mois avec une croissance du nombre d'utilisateurs
de l'ordre de 40% pour le premier semestre 2000. Nous dénombrons
environ 230.000 utilisateurs sur le site Crédit Lyonnais Interactif.
Avec e.CréditLyonnais nous espérons glaner 20.000 nouveaux
clients en ligne. Aujourd'hui, environ 10% de la population
française surfe sur Internet. Si l'on rapporte cette proportion
au nombre de clients que nous avons, c'est-à-dire 6 millions,
notre potentiel est de 600.000 utilisateurs. Nous en sommes
au tiers. C'est déjà un bon résultat. Entre le déploiement
des outils informatiques internes et cette expérience
de plusieurs années sur les services en ligne, le Crédit
Lyonnais est aujourd'hui la banque française la plus
avancée sur l'Internet.
Comment
définiriez-vous la population cible de ces services en ligne
?
Les utilisateurs de services financiers en ligne se répartissent
en trois catégories qui sont bien connues : les jeunes, les
cadres et les jeunes retraités, notamment pour le trading.
Nous sommes également sur une population majoritairement urbaine.
Mais le point le plus intéressant reste le comportement de
cette clientèle internaute. C'est une population très active
au niveau financier, qui pratiquent beaucoup d'opérations
et qui vient très souvent en agence. Bien plus que la population
qui n'utilise pas Internet. Ce point est crucial car nous
sommes réellement dans le cas d'école du click and mortar
: les services en ligne et en temps réel doivent être
épaulés par un réseau physique de succursales.
Comment
ont été menés les chantiers TopTrades et e.CréditLyonnais
?
Pour un grand groupe, comme le Crédit Lyonnais, la gestion
d'un chantier Internet demande une certaine adaptation structurelle.
Il faut être capable d'avoir autant de réactivité et de flexibilité
qu'une start-up tout en impliquant un effectif de 40.000 personnes
et 2.000 lieux d'implantation dans le monde. Il ne suffit
donc pas de mettre 500 personnes qui planchent sur l'Internet
dans une tour à la Défense pour que les choses avancent
La
logique que nous avons suivie est celle du plateau sur lequel
nous regroupons les équipes nécessaires pour mener un projet.
Mais dans le même temps, l'Internet est par nature un support
qui s'irradie à tous les niveaux de l'entreprise. Il faut
donc savoir laisser germer des projets au sein des services.
Un autre point me paraît très important : éviter les effets
d'annonce sur les services en ligne. Nous préférons roder
ces services plusieurs mois en sous-marin avant de communiquer
dessus. C'est le cas de TopTrades, qui a été lancé en mai
2000, et sur lequel nous allons lancer une campagne de publicité
dans les prochains jours.
Quels
sont les moyens humains et financiers qui ont été mis en uvre
sur ces chantiers ?
Il y a deux façons de répondre à cette question. Une façon
globale, qui consiste à dire que ce sont 40.000 personnes
qui ont été impliquées, formées et qui ont participé de près
ou de loin à la mise en place de tel ou tel service Internet.
Si l'on raisonne dans cette dimension, on englobe également
toute la mutation informatique nécessaire en interne. Il s'agit
alors d'un chantier global de plusieurs milliards de francs
sur plusieurs années. Si, au contraire, on raisonne de façon
ponctuelle sur l'ouverture de TopTrades ou de e.CréditLyonnais,
alors ce sont des chantiers qui durent environ une année,
qui mobilisent une centaine de personnes et qui coûtent une
dizaine de millions de francs.
Jusqu'où
peut aller le besoin d'indépendance structurelle des services
Internet pour un grand compte ?
Pour TopTrades nous avons opté pour une filialisation. A l'inverse,
e.CréditLyonnais est gérée pour l'instant comme une branche
ou une agence supplémentaire. Il me semble que sur Internet
il est important que les grands groupes se donnent les moyens
de la réactivité et ce, quelque soit la stratégie nécessaire.
Par exemple, avant de créer TopTrades, nous avions étudié
les propositions d'adossement que nous lançaient certains
acteurs déjà présents sur le courtage en ligne. Les offres
étaient trop onéreuses et la valeur ajoutée nous apparaissait
médiocre. En revanche, pour CLmarkets.com,
qui est une plate-forme d'investissement pour les entreprises,
nous avons opté pour une joint-venture avec le danois Internet
Invest Holding. Le partenariat est une possibilité
que nous envisageons volontiers.
En
juillet dernier le Crédit Lyonnais pris une participation
dans la Web-agency Image Force. A quoi correspond cet investissement ?
Notre entrée dans le capital d'Image Force répond
à deux objectifs : développer nos futurs
services Internet mais aussi favoriser l'incubation de projets
qui nous semblent prometteurs. Nos initiatives sur les services
en ligne vont être de plus en plus nombreuses. Il nous
fallait donc une "boîte à outils" grâce
à laquelle nous pouvions gérer en interne l'ensemble
des chantiers.
Après
18 mois de présence au Crédit Lyonnais, avez-vous l'impression
que la donne a changé sur Internet ?
En deux ans, l'investissement nécessaire pour lancer un projet
Internet est passé de quelques centaines de milliers de francs
à quelques dizaines de millions. Je crois que c'est assez
symptomatique de la professionnalisation qui est en marche
dans ce secteur. Avant, les sites étaient considérés comme
des vitrines, maintenant on raisonne en terme de rentabilité
et de stabilité.
Quels
sont les chantiers Internet en cours au Crédit Lyonnais ?
Ils sont nombreux et dans tous les domaines : grand public,
professionnel, institutionnel
Mais, concurrence oblige, je
n'en parlerai pas tant que les services ne sont finalisés
et validés. La seule chose que je puisse aujourd'hui dire
c'est qu'avant la fin de l'année nous lancerons des services
très ambitieux. Parallèlement, nous allons harmoniser la cinquantaine
de sites qui existent au Crédit Lyonnais.
Depuis
combien de temps surfez-vous ?
Je pense que cela fait cinq ou six ans.
Quels
sont vos sites préférés ?
Je vais beaucoup sur les sites d'information mais je surfe
peu par plaisir. Je crois que je préfère les portails, comme
Yahoo, à partir desquels on peut trouver de l'information.
Avez-vous
déjà acheté sur Internet ?
Oui et depuis longtemps déjà
Des livres, une voiture et,
le week-end dernier, un lit !
En
qualité de banquier, le paiement sur Internet ne vous effraie
pas ?
Très franchement non. A chaque fois que j'ai constaté des
débits inexpliqués sur ma carte bancaire, la fraude provenait
non pas de l'Internet mais de l'utilisation de sabots pour
des paiements à l'étranger.
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