INTERVIEW
 
Directeur général
CPR-E*Trade
Guillaume de Charry
"Titre"
Le courtier en ligne français CPR-E*trade est une joint-venture créée en janvier 1999 par l'un des leaders américains du courtage en ligne E*Trade, actionnaire à 34%, et la Compagnie Parisienne de Réescompte (CPR), qui en détient 66%. Cette banque étant elle-même détenue à 30% par le Crédit Agricole Indosuez, qui a annoncé la semaine dernière une offre publique d'achat sur le solde du capital de CPR. Cette annonce, même si elle était attendue depuis plusieurs semaines, a relancé les spéculations sur l'attitude d'E*Trade qui, en Allemagne et au Japon notamment, entreprend systématiquement de racheter les parts de ses partenaires dans les joint-venture qu'il a créées. D'autant que CPR*Etrade est un beau joyau en France avec ses 20.100 comptes, dont 16.400 actifs, ses 531.000 ordres exécutés lors des six derniers mois et un encours de 1,172 milliards d'euros. Guillaume de Charry, directeur général du courtier français, fait donc le point sur les perspectives de CPR-E*Trade.18 septembre 2000
 
          

JDNet. On a beaucoup supputé sur le sort réservé à CPR-E*Trade, après l'OPA du Crédit Agricole Indosuez sur la CPR. Certaines rumeurs faisaient même état d'une possible contre-offre de l'américain pour récupérer la totalité de son activité de courtage en ligne en France. Ou en êtes-vous exactement?
Guillaume De Charry. En période d'OPA comme celle-ci, je ne vous répondrai pas, car on va s'abstenir de donner des informations qui pourraient être erronnées. La seule chose que je puisse vous dire, c'est que CAI est actionnaire de CPR depuis longtemps et que Etrade est notre partenaire depuis le 1er janvier 1999. Pour le reste je n'ai pas de commentaire particulier a faire.

Comdirect qui a mis la main sur Paresco en juin, la CPR rachetée par le Crédit Agricole, SelfTrade qui fusionne avec DAB : est-ce le début de la grande concentration dans le secteur du courtage en ligne?

Contrairement à ce que l'on pense, ce n'est pas necessairement le début mais peut etre la fin du mouvement ou d'un premier mouvement. Regardez le marché en France et vous verrez que presque tous les acteurs sont désormais en place. Consors, numéro 1 en Europe, est là, tout comme ComDirect ou DAB grace au rachat de Self Trade. Si vous ajoutez Cortal, filiale de la BNP, Fimatex avec la Société Générale et nous, vous vous apercevez que le marché est déjà bien cadenassé.

Mais quid des Américains comme Schwab ou Ameritrade?
Vous savez, aux Etats-Unis, il n'y a que quatre ou cinq acteurs qui se partagent prés de 95% du marché. Sur ces cinq là, à mon avis, seul E*Trade, qui est déjà avec nous, et Charles Schwab ont vraiment la volonté de venir en Europe et la volonté de developper une stratégie internationale. Mais, pour beaucoup, il y a un énorme problème culturel en Europe : le marché est fragmenté, il faut donc s'appuyer sur des opérateurs locaux, comme E*Trade l'a fait avec nous. Charles Schwab à donné logiquement la priorité à l'Angleterre, où il n'y a pas la barrière de la langue.

D'autant que racheter un courtier français coûte cher. DAB qui débourse 30.000 euros par client Self Trade, cela vous inspire quoi ?
Je n'ai qu'un mot : chapeau Charles [Beigbeder, président de SelfTrade, ndlr].

Mais est ce que l'on doit se baser là-dessus pour évaluer le prix de CPR-E*trade, soit 3,9 milliards de francs?
Non, on n'est pas dans la même logique européenne et on fait partie d'une banque qui a un ensemble de services. Ce n'est donc pas réaliste d'évaluer notre établissement sur cette base. .

Vous disposez d'une marque reconnue, de moyens qui restent conséquents et pourtant, en France, vous affichez moins de comptes que les trois leaders que sont Fimatex, Consors ou Self Trade. Comment l'expliquez vous?
Je rappelle déjà que nous sommes peu nombreux à communiquer sur le nombre de comptes actifs. Par ailleurs, ces acteurs que vous citez ont bénéficié en terme de notoriété de leur introduction en Bourse. De nombreux comptes ont été ouverts chez eux par des particuliers à cette occasion. Plus généralement, le problème ne tourne pas autour du nombre de comptes mais plutôt du volume de l'activité. Chez nous, le portefeuille moyen est de 70.000 euros, soit certainement le plus gros montants parmi les leaders du marché. Et comme nos clients sont très actifs, avec 70 transactions par an et par compte, on s'aperçoit que le nombre de comptes n'est pas forcemment le critére majeur. Quant à nos coûts d'acquisition, même si nous ne communiquons pas le montant de nos dépenses marketing, je peux vous dire qu'ils sont dans la norme, soit autour de 500 euros par client. Cela dit, on n'est pas uniquement dans une logique quantitative mais qualitative. .

Vous faîtes donc partie des gens qui estiment que la quarantaine de courtiers en ligne actuellement sur le marché pourront coexister?
Certains vivent ou vivront bien en restant petit. Dans le secteur, les marges restent acceptables et permettent de dégager des bénéfices avant frais marketing.

Mais les études semblent quand même très optimistes sur le nombre de comptes en ligne, surtout quand on sait que sur 5 millions de petits porteurs, près de 70% n'ont pas l'intention d'utiliser Internet dans les mois qui viennent, d'après un sondage Sofres/TF1?
C'est possible mais le marché des actions n'est pas le seul axe de développement des acteurs. Vous savez, on sort d'une période de vingt ans où, en raison des taux d'intérêt élevés et de la crise économique, une génération de Français n'a pas orienté son épargne vers les actions. Or cette période est révolue et il va donc y avoir une vraie demande de cette nouvelle clientèle. A nous de répondre à cette attente avec notre offre.

Les courtiers sortent tout de même d'une période faste où le nombre de transactions boursières a atteint des sommets, ce qui n'est plus le cas maintenant. Cela ne vous inquiète pas pour le futur ?
C'est vrai mais chez CPR-E*TRADE cela nous concerne peut être moins. Nous sommes très diversifiés, notamment parce que nous ne faisons pas que du courtage d'actions. Je serais donc plus inquiet si on ne misait que sur ce produit. La fusion DAB/Selftrade illustre bien cette problématique. Si le courtier français se rapproche de DAB, qui a une offre très riche, c'est aussi en partie pour ne plus être uniquement tributaire du marché des actions et pour élargir la gamme de produits et de services.

Vous ne faîtes pas partie des courtiers les moins chers du marché, vous tenant un peu à l'écart de la guerre des prix. Sur quoi misez-vous pour attirer de nouveau clients?
Sur la relation avec le particulier. Depuis des mois, on est persuadé que la base de clients qui arrivent sur la marché ne choisit pas son courtier seulement en fonction du prix mais en fonction de ses services. On mise donc avant tout là-dessus avec nos espaces de formation, nos innovations technologiques pour que les ordres soient transmis correctement ou des opérations, comme le parrainage, qui permettent de récompenser des clients qui nous en amènent d'autres. Notre réussite vient avant tout de là. Dans tous les comparatifs sur la relation client, on apparaît d'ailleurs dans les première places et on a même reçu le prix de la satisfaction client organisé par Arthur Andersen et Enjeux-Les Echos. Plus qu'un courtier en ligne nous sommes ainsi plutôt un ensemble de services financiers où Internet n'est qu'un outil, extrêmement puissant il est vrai, dans notre stratégie. Avec l'Internet on construit ainsi un business model moderne à partir d'activités traditionnelles.

Justement, en matière de canaux de distribution modernes, avez vous des projets dans le Wap ou la télévision interactive?
Dans le Wap, on est sur le portail d'Itineris. Quant à la télévision interactive, on regarde et on étudie le projet avec des sociétés comme Netgem par exemple. Mais ce ne sont pas des priorités chez nous. Je préfére nettement proposer un nouveau produit d'assurance-vie, qui est un vrai bénéfice pour le client, que de lui offrir le Wap dont l'utilisation reste complexe.

Vos rivaux sont tous cotés et ont levé des sommes importantes pour leur développement. La Bourse vous tente-t-elle ?
Ca fait effectivement partie des éventualité. Mais pour l'instant, on y arrive très bien sans et on garde des moyens financiers conséquents pour notre développement. Mais c'est vrai que cela pourrait être utile en matière d'acquisitions par échange de papier, notamment pour renforcer nos contenus.

 
Propos recueillis par Jérôme Batteau

PARCOURS
 
Diplômé de l'Institut d'Etudes Politiques de Paris, Guillaume de Charry a débuté sa carrière professionnelle en qualité de fondé de pouvoirs et de responsable des activités primaires obligataires et de convertibles dans le groupe Worms puis à la Banque Demachy. En 1987, il rejoint la direction de la BMA - Banque de Marchés et d'Arbitrages avant d'intégrer en 1991 le groupe CPR. C'est en janvier 1999, qu'il est nommé directeur général de CPR-E*TRADE. Guillaume de Charry est également vice-président de l'association Brokers On Line.

   
 
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