INTERVIEW
 
Directeur des annuaires en ligne
Pages Jaunes
Jean-Marie Guille
"Titre"
Les Pages Jaunes (filiale de Wanadoo, France Télécom) sont confrontés à une concurrence
multi-formes sur Internet : annuaires concurrents (Scoot.fr du groupe Vivendi), acteurs de la cartographie en ligne, "city guides", etc. En réaction, Pages Jaunes développe des sites thématiques dont le prototype vient tout juste d'ouvrir : Planresto.fr, un guide qui comprend plus de 6.000 restaurants, 121 spécialités et 10 gammes de prix et centré sur Paris pour le moment. Le marché des bases de données des numéros de téléphones se développe à vitesse grand V, autour des postes fixes ou autour des mobiles. La libéralisation du secteur des télécommunication va affermir la concurrence (Lire l'article du JDNet du 21/08/00) et favoriser l'échange de bases de données, considéré comme la clé de la réussite pour s'imposer. Mais, sur ce terrain, Pages Jaunes, avec sa marque universellement reconnu, a une marge d'avance.
25 octobre 2000
 
          
JDNet. Les Pages Jaunes ont intégré l'entité Wanadoo. Qu'est-ce que cela change ?
Jean-Marie Guille. Cette opération a permis de renforcer un certain nombre de synergies avec les autres activités Internet du groupe France Télécom. Notre changement de nom (ex-Oda) n'a pas été une conséquence directe de l'introduction en bourse de Wanadoo. Nous avons récupéré la partie opérationnelle "édition annuaire" de France Télécom, qui s'appelait le Snat (Service national des annuaires du téléphone). Nous avons fusionné les activités annuaire à l'intérieur d'Oda. Avec la fusion de ces deux entités, nous en avons profité pour changer de dénomination. La simultanéité du changement de nom et de l'introduction en bourse de Wanadoo est un concours de circonstance.

Les Pages Jaunes restent le service le plus consulté par Minitel. Qu'en est-il sur Internet ?

On enregistre avec une certaine surprise une stabilité de l'audience sur le 3611. En moyenne hebdomadaire sur le site, on compte 1,5 million de pages vues par jour, ce qui fait environ entre 40 et 50 millions de pages vues par mois. En octobre, on devrait atteindre 9 millions de visites. Nous utilisons des outils du type MMXI ou Netvalue mais le problème est que ces outils ne prennent en compte que les connexions à domicile. Or la plus grande partie de notre audience provient des entreprises. De source interne, en traitant les logs, nous recensons 1,7 million de machines, ce qui nous fait dire que nous sommes autour de 2 millions de visiteurs uniques. Sur un an, nous avons doublé notre audience.

Comment comptez-vous exploiter davantage les fonctionnalités de cartographie que possède SNV, filiale de France Télécom, qui a développé la base photos des Pages Jaunes sur Internet ?
SNV est connu d'abord pour sa base photos importante des rues de Paris et de Lyon. D'autres grandes villes vont suivre (Toulouse, Marseille, etc.). La société a également développé un service de cartographie dont il existe une base sur PagesJaunes.fr. Il couvre 600 villes actuellement. Cela préfigure ce que l'on va faire. Nous allons exploiter des outils plus performants de cartographie dynamique. Si l'utilisateur fait apparaître une donnée sur une carte, il ne recharge pas la carte. Ce sont des systèmes exclusifs développés en Flash.

Vous venez d'ouvrir PlanResto.fr, un guide des restaurants parisiens. Quel est l'objectif de ce site thématique ?
C'est l'une des applications mises en place en collaboration avec SNV. Paris comprend environ 10.000 restaurants. Planresto en recense 6.000 pour le moment. A la fin de l'année, ce sera la totalité. Nous voulons proposer à l'utilisateur un service structuré dans lequel il est facile de s'y retrouver. Pour les annonceurs, nous voulons offrir des espaces de publicité, où l'on retrouve l'exhaustivité des Pages Jaunes.

Quelles relations entretenez-vous avec votre
maison-mère France Télécom ?

Nous achetons au prix du marché la base de données téléphoniques à France Télécom pour constituer un annuaire [NDLR, le montant de l'acquisition tourne autour de 25-30 millions de francs].

Vous ne bénéficiez pas d'autres avantages en contrepartie ?
Nous sommes très sourcilleux sur ce point. Nous avons les mêmes conditions d'acquisition des données que n'importe quel autre acteur. Il y a une totale transparence en la matière. Les chiffres sont publiés dans le document d'introduction de Wanadoo. Si ce n'était pas clair, les concurrents nous le rappelleraient.

Un point est intéressant à souligner dans l'affaire qui vous oppose à Planfax.com (Lire l'article du JDNet du 24/10/00) : les opérateurs peuvent acquérir plus facilement un annuaire professionnel type Pages Jaunes qu'une base de données téléphoniques des particuliers, qui semble être l'apanage de France Télécom...
C'est une situation qui est amenée à disparaître assez rapidement. Pour le moment, nous achetons ces données uniquement à France Télécom, mais nous nous apprêtons à les acheter également à Bouygues Telecom ou à Cegetel pour les mobiles. Avec l'ouverture de la boucle locale, les opérateurs vont gérer les abonnements téléphoniques. Il va bien falloir négocier avec eux. Nous allons devoir faire nos courses en dehors de France Télécom. Nous sommes prêts à acheter toutes données d'informations pour satisfaire le plus grand nombre d'utilisateurs d'annuaire en France.

Disposez-vous d'un outil spécifique pour la gestion des bases de données des Pages Jaunes ?
Au départ, les agences de France Télécom recueillent les informations pour les abonnements téléphoniques. Il est possible d'être inscrit sur la base de données en 48 heures. Pour information, il y a 50.000 mouvements par jour sur la base de France Télécom. Les tarifs d'acquisition peuvent varier en fonction de la
ré-actualisation demandée des données. Nous avons des systèmes d'informations complexes qui les normalisent afin de les rentrer dans des bases de données.

Pourtant, en effectuant une recherche pour trouver les coordonnées d'une start-up, il est parfois difficile d'avoir une réponse...

C'est marginal. Il ne s'agit pas de problèmes volumétriques mais d'harmonisation des formats des données recueillies. Il est sûr que le traitement des informations nécessite des outils techniques qui permettent d'intégrer les données rafraîchies. Lorsque nous intégrerons des données massivement, nous aviserons, mais nous n'en sommes pas là.

A priori, PagesJaunes.fr est un site de passage. Les internautes trouvent une information et repartent immédiatement. Ca ne déroute pas les annonceurs ?
L'essentiel de notre chiffre d'affaires ne provient pas des bannières, mais des quelques lignes qui cotoient les coordonnées des professionnels. Ce sont des produits liés à la recherche. Les revenus tirés des bannières généralistes sont marginaux par rapports aux revenus globaux. Pages Jaunes, c'est 530.000 clients (300.000 sur minitel, 116.000 sur Internet). Ces clients ont au minimum trois lignes de texte et une image au dessous-de leur description. Pour le cas de Planresto, on peut imaginer mettre une séquence vidéo. Les annonceurs paient un supplément lorsque l'on place un lien hypertexte vers leur site. Ce qui ne nous empêche pas de proposer de nouveaux types de bannières (par région, etc.). Nous estimons que l'on a pas encore suffisamment exploité cet aspect [NDLR, Pages Jaunes a réalisé un chiffre d'affaires de 59 millions de francs via Internet en 1999].

Comment percevez-vous le développement des
"city guides", qui proposent de monter des
mini-sites pour les commerçants locaux ?

C'est clairement une forme de concurrence. Nous pensons que l'aspect local sur Internet est extrêmement important. Nous avons l'intention de développer des sites de ce type, intégrés et placés sous la marque PagesJaunes.

Envisagez-vous de créer un annuaire en ligne dédié aux numéros des mobiles ?
Pour l'instant, nous avons quelques difficultés à acheter ces données auprès des opérateurs. Or, il faut acquérir ces données en premier lieu. Nous avons déjà fait le tour du marché : ce n'est pas négatif mais les temps de réponses sont relativement lents. Nous avons l'intention de faire figurer les numéros des mobiles sur les divers supports comme les Pages Jaunes. Je n'apporterai pas de réponse en ce qui concerne la création d'un annuaire mobile spécifique. Tout d'abord, il faut que la base soit exhaustive. Après avoir procédé à une étude, il s'avère qu'un grand nombre de personnes ne souhaitent pas que leur numéro de mobile apparaisse dans un annuaire. Donc je pense que c'est important d'écouter la demande du grand public.

Pour le moment, les utilisateurs doivent clairement donner leur accord pour être présent sur un annuaire mobile. Attendez-vous un changement rapide de la législation en la matière ?
Les premières versions de la loi sur "l'annuaire universelle" semblent indiquer que les numéros des mobiles en feront partie. S'il devenait trop complexe d'avoir cette information via les opérateurs, on ne s'interdirait pas d'acquérir ces données par d'autres voies. Mais nous n'en sommes pas là.

Pourquoi ne montez-vous pas un annuaire inversé en ligne alors que vous développez ce service via le Minitel et l'audiotel ?
C'est très simple : pour l'instant, on considère qu'un certain nombre de personnes sont encore prêtes à payer pour avoir ce type de service. On ne tirerait pas autant de revenus sur le Net que sur le minitel, qui ne repose pas un modèle de revenus publicitaires. Ce n'est pas un problème technique mais économique.

L'OMPI vous a refusé le transfert du nom de domaine PagesJaunes.com. Cela vous manque ?
Cela ne m'empêche pas de dormir. Ce n'est pas un élément stratégique pour notre développement.

Que pensez-vous de la téléphonie sur IP ?
C'est un sujet sur lequel on aimerait être pionnier en France. On devrait ouvrir prochainement un service de ce type sur Planresto. Les internautes pourront entrer en relation directement avec un certain nombre de restaurateurs.

Qu'aimez-vous sur Internet ?
La source d'informations via les moteurs par exemple.
En dehors de Voila, j'aime bien Altavista.

Que détestez-vous ?
Les pop-up.
 
Propos recueillis par Philippe Guerrier

PARCOURS
 
Jean-Marie Guille, diplômé de Sup Co Toulouse (promotion 1976), est entré chez Oda en 1983, après une première expérience chez Bayard Presse de 1977 à 1983. Il a occupé différentes fonctions successives au sein du groupe Oda : chef de produit Pages Jaunes, responsable de la communication produits (de 1983 à 1989), directeur Général de PMA (filiale Grands Comptes d'Oda et du groupe américain TMP Worldwide) jusqu'en 1994, puis directeur du marketing d'Oda. En 1998, lors du rachat d'Oda à Havas par France Télécom, il devient également éditeur délégué des annuaires de France Télécom. Depuis le 1er juillet, Jean-Marie Guille est directeur de l'Unité d'Affaires Annuaires en Ligne (pagesjaunes.fr, 3611, Quidonc).

   
 
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