INTERVIEW
 
Président
Branchez-vous !
Patrick Pierra
"Titre"

Branchez-vous! est une société canadienne, créée en 1995 par Patrick Pierra, un français installé à Québec depuis 1986. La société, constituée d'un réseau de nombreux sites éditoriaux, a inscrit à la fin de l'année dernière ses actions sur le Canadian Venture Exchange (CDNX). Sur les neuf premiers mois de l'exercice 2000, Branchez-vous! a réalisé un peu plus de 2 millions de francs de chiffre d'affaires et vise l'équilibre d'ici 2002. Son président fait le point sur sa structure, qui dépend quasi intégralement de la publicité, et sur ses projets dans la zone francophone.

25 janvier 2001
 
          

JDNet. Pouvez-vous nous décrire plus amplement le réseau Branchez-vous! ?
Patrick Pierra. Nous avons créé notre premier site éditorial en 1995 à partir d'une lettre électronique traitant de l'actualité de l'Internet. Désormais Branchez-Vous! englobe 16 sites éditoriaux comme le site d'annonces classées Annoncez.com, le site de jeu Jouez.com ou le guide d'achat Magazinez.com. Nous avons en fait un grand site par catégorie, de la finance (Mesfinances.com) au courrier électronique (Moncourrier.com) en passant par le voyage (Voyagez.com). La majorité de nos revenus provenant de la publicité avec plus de 20 millions de pages vues par mois et 560 000 visiteurs uniques parmi les canadiens francophones utilisant Internet à domicile. Nous avons également une régie publicitaire, Cible Net, qui représente 14 sites comme "Jaune.ca", un annuaire d'entreprises canadiennes, ou "Le Droit d'Ottawa", un site régional.

Vous venez de rentrer sur le Canadian Venture Exchange. Votre
modèle principalement publicitaire ne va-t-il pas faire fuir les investisseurs ?
Non, car si il y a ralentissement des investissements publicitaires cette année, cela ne veut pas dire que tout va s'arrêter. Notre optique est à long terme. Or, selon les études aux Etats-Unis et au Canada, Internet devrait être le troisième support publicitaire, derrière la télé et la radio, d'ici 2005. On peut donc être optimiste. Par ailleurs, le marché de la publicité au Québec est en retard et le potentiel de développement est énorme. Ici on est d'ailleurs jaloux de la façon dont s'est développée l'activité en France. Mais il y a eu en même temps un excés chez vous, puisque toutes les dotcoms financées utilisaient l'argent en publicité, ce qui a gonflé un peu artificiellement les chiffres. Ici nous n'avons pas eu ce phémonène dotcoms, ce qui fait que nous n'avons pas vraiment souffert du manque de financement des jeunes sociétés. En plus, au Canada, les grands groupes traditionnels n'ont pas attendu pour annoncer sur Internet. Enfin, au Canada, et particulièrement au Québec, il y eu une très forte consolidation dans l'Internet qui fait que peu d'acteurs sont encore présents. On est les derniers indépendants et on a une taille suffisante pour attirer les annonceurs.

Les sites français ne semblent pas vraiment intéressés par le marché canadien malgré la langue commune. Pourquoi ?
Tout d'abord, ici, la croissance du marché est moins exponentielle qu'en France. Le Québec est un petit marché, même si 45% des canadiens ont accès à Internet. Il n'est donc pas évident de tirer des bénéfices rapidement pour une société qui s'installe. Recruter des équipes, constuire un site dédié, tisser un réseau, cela coûte de l'argent et il n'est pas sûr que la taille du marché puisse permettre d'avoir rapidement un retour sur investissement. Par ailleurs, les acteurs français ont directement déployé une dynamique européenne. Le Québec, malgré la francophonie, leur paraissait très éloigné, ce qui est normal. En revanche, cette absence physique des sites français au Canada nous ouvre des perspectives. Nous envisageons notamment, grâce à notre régie publicitaire, Cible Net, de mieux commercialiser au Canada l'audience de certains sites français.

Vous avez d'autres projets pour vous tourner vers l'Europe ?
Nous en avons deux. D'abord, gràace à notre proximité, nous sommes une excellente porte d'entrée en langue française vers les Etats-Unis. Nous voulons ainsi devenir le spécialiste de l'Amérique en France pour les rencontres, les voyages, etc. C'est important, car plus de 30% de notre audience provient de l'Hexagone. Ensuite, nous voulons mieux commercialiser en France les millions de pages vues que nous faisons justement sur nos sites grâce aux internautes français. Pour l'instant c'est la régie publicitaire Hi-Media qui est chargée de ce volet.

Comptez-vous également décliner vos contenus en France ?
Cela se fera au cas par cas. Faire voyager les contenus est très difficile. Les sites de jeux ou de rencontres sont par exemple aisément déclinables. En revanche, pour la finance c'est impossible. Nous sommes propriétaires de Mesfinances.com, spécialisés sur les bourses américaines, et quand je regarde le site français Mesfinances.fr (Groupe Les Echos, NDLR), je me dis que c'est très complexe de décliner les contenus. Idem pour le commerce électronique, où la logistique devient très vite un casse-tête à l'international.

Y-a t-il vraiment une unité de la francophonie sur Internet  ?
Oui et non. Internet est de tous les médias celui où il y a le plus d'échanges. Il n'y a qu'à voir le succès des "chats" dans nos deux pays pour s'en convaincre. Internet est donc certainement la meilleure chose qui ait pu arriver à la francophonie pour rassembler. D'ailleurs, comparé aux Etats-Unis, le phénomène Internet francophone est d'ailleurs plus culturel et social qu'économique pour l'instant.

Vous avez arrêté votre magazine papier dédié à l'Internet. Une attitude curieuse alors qu'en France Infosources ou LibertySurf ont tour à tour racheté des magazines pour muscler leur stratégie Internet...
Oui, on a même été à ma connaissance le premier magazine papier créé à partir d'un site. Mais pour LibertySurf ou Infosources, je leur donne rendez-vous dans quelques mois pour voir s'ils ont rééllement pu tirer des synergies. Philosophiquement on a des doutes, même si c'est toujours bon pour gonfler les revenus consolidés, surtout quand votre valorisation se calcule à partir de multiple de chiffre d'affaires.

Qu'est ce que vous aimez sur Internet ?
Les sites d'informations principalement comme Internet.com, News.com. J'aime également nouer des contacts et l'instantanéité de ce média.

Et qu'est ce que vous n'aimez pas ?
Les sites trop lourds inaccessibles avec du bas-débit.

 
Propos recueillis par Jérôme Batteau

PARCOURS
 

Patrick Pierra,38 ans, est né en France à Saint-Jean de Luz, et est diplômé de l’Institut d’études politiques (IEP) de Paris, section Politique, économique et sociale et du Centre de formation des journalistes (CFJ) de Paris. Il détient également un DESS de correspondant de presse en pays anglophone obtenu à l'Université Paris I. Etabli au Quebec depuis 1986, il a notamment travaillé à CKVL / CKOI-FM à Montréal, au Magazine Info Presse Communications des Éditions Info Presse ou à Grafika. Il a lancé BRANCHEZ-VOUS!, en 1995, qui était à l'origine un simple bulletin par courrier électronique suivant l’actualité d’Internet.


   
 
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