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Patrice
Henry
Associé
(Managing Director)
BearingPoint
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"La
gouvernance, c'est avant tout de la communication"
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Associé chez BearingPoint, Patrice Henry revient
sur les mesures à prendre en cas de compression
de budget, élit son trio d'indicateurs de suivi
et détaille les enjeux d'un secteur qu'il suit
depuis longtemps, celui de l'énergie.
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Propos recueillis par Fabrice Deblock le 27
février 2003
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JDNet
Solutions. La "gouvernance" du SI est très
en vogue. Quelle définition lui donnez vous ?
Patrice Henry.
La gouvernance, c'est avant tout de la communication.
Soit: comment mieux faire communiquer la DSI et les directions
métiers. Pour cela, il est par exemple opportun
de créer des organes de décision, tels que
des comités de direction informatique qui regroupent
le DSI et les directeurs opérationnels concernés.
Il est bon que le DG y participe une à deux fois
par an au moins. De plus, une DSI structurée en
métiers, à l'image de l'entreprise, peut
contribuer à augmenter l'efficacité de ces
"canaux" de communication avec le reste de l'entreprise.
Cet
aspect "communication", besoin de transparence,
de visibilité, est-il propre aux services informatiques
?
Pas forcément, vous retrouvez ce
même besoin de communication et de suivi dans le
BTP par exemple. Dans tout projet d'envergure ou de longue
haleine, la mesure des éventuels décalages
est normale. Il y a une part émotionnelle aussi
parfois, les DSI pouvant avoir eu dans le passé
un langage perçu par certains comme "ésotérique",
qui semblait leur donner une sorte de pouvoir sur leurs
collaborateurs dans l'entreprise. Mais grâce à la constitution
d'équipes mixtes - DSI et directions métiers - et aux
méthodes de gouvernance, la situation progresse.
Un autre aspect important, ce sont les ressources humaines,
et leur gestion. Des va-et-vient réguliers entre
les "métiers" et "l'informatique"
améliorent à la fois la motivation et les
compétences des hommes, c'est fondamental.
Comment réagir, quand on est DSI, à l'éventuelle
compression de son budget, comme cela a souvent été
le cas depuis 2001 ?
Il faut se demander jusqu'où il
est possible de pousser le curseur sans tout casser !
En clair, commencer par une analyse de son portefeuille
de projets et sélectionner ceux qui génèrent
les plus grandes économies ou le ROI le plus élevé.
Il faut parfois avoir le courage d'arrêter certains
projets, quitte à les reprendre par la suite. Il
faut choisir entre les "nice to have" et les
"must have" !
En fait, la question primordiale à se poser est
de savoir ce que l'on attend d'un projet, en amont. Peu
de comités de direction se posent vraiment la question
de ce qu'ils en attendent, en termes de ROI.
Ensuite, la Tierce Maintenance Applicative (TMA) pour
les applications qui ne sont pas propres au métier de
l'entreprise est un autre gisement potentiel d'économies.
Quelles sont les applications cruciales qui nécessitent
un excellent niveau de service, et quelles sont les autres
? Est-ce que je peux passer par exemple d'un support 24/7
à un support 12 heures sur 24 et 5 jours sur 7
? Une bonne cartographie de l'existant est nécessaire
pour cela.
Enfin, la rationalisation
de l'infrastructure, que ce soit pour les grands systèmes
ou les systèmes Unix / NT. Il est possible de réduire
considérablement les coûts liés à
une infrastructure en diminuant le nombre de serveurs,
ce qui impacte directement le coût des licences,
de la maintenance mais aussi et surtout des équipes
qui en assurent le support,
même si les coûts d'achats des éventuelles
nouvelles machines peuvent augmenter sur le court terme.
Gouvernance, oui, mais avec
quels outils de mesure et de contrôle ?
Les outils classiques, TCO, ROI, etc...
sont des outils éprouvés qui complètent
parfaitement l'approche par portefeuilles de projets dont
je parlais précédemment. Ils permettent
de mettre en valeur des "Go / No Go" indispensables.
Je suis quant à moi très partisan de la
mise en place d'un système de contrôle de
gestion, de comptabilité analytique et de facturation
des services fournis au sein des DSI. A partir de 100
personnes, cela devient à la fois indispensable
et très rentable. Avec un système de suivi
du temps des collaborateurs, des coûts mensuels,
de refacturation interne, vous évitez le syndrôme
du 31 décembre où, s'il reste par exemple
15 % des coûts non affectés, la répartition
se fait au prorata de l'importance de chaque service,
ce qui est dramatique pour les DSI.
Enfin, suite à la définition de la stratégie
et à l'alignement du SI sur elle, je pense que
des plans d'actions très précis mesurés
par des indicateurs non moins précis doivent être
mis en place. Le problème est que ces indicateurs
sont le plus souvent beaucoup trop nombreux et que les
acteurs ayant à les exploiter s'y perdent. Il m'est
arrivé de voir plus de 400 indicateurs différents
pour un seul décideur !
Si vous deviez choisir un trio
d'indicateurs, quel serait-il ?
Je verrais très certainement un
indicateur lié au dépassement du temps imparti
au projet. Un autre relatif à la satisfaction client.
Et un troisième ayant trait à l'atteinte
de l'objectif préalablement fixé au projet,
en termes de ROI ou d'économie réalisée
par exemple.
Vous
vous êtes beaucoup occupé du secteur de l'énergie
dans vos précédentes fonctions et vous continuez
de le faire chez BearingPoint. Quelles menaces et opportunités
pour ce secteur d'activité ?
En 2004, EDF va perdre son monopole sur
le marché de la fourniture d'électricité
aux professionnels et en 2007, ce sera le tour des particuliers.
Les systèmes d'information d'EDF vont donc devoir
s'adapter à cette nouvelle donne, c'est-à-dire
se préparer à la perte de parts de marché,
tout en essayant d'en perdre le moins possible et en continuant
à fournir les "tuyaux" d'accès
à cette électricité.
Pour les nouveaux entrants, l'enjeu sera à l'inverse
la conquète d'un maximum de clients. Mais le secteur
de l'énergie n'est pas le seul à connaître
des bouleversements proches, la pharmacie aussi avec la
transformation de sa chaîne logistique...
Que nous réservent
2003 et les années suivantes ?
Les DSI se professionnalisent de plus en
plus, c'est un mouvement de fond qui n'est pas prêt
de s'arrêter, notamment par la mise en place de
gouvernances, de système de contrôle de gestion,
de gestion et suivi de projet. L'amélioration de
la transparence constitue aussi selon moi un axe fort
pour les années à venir.
De même, certaines DSI qui ont atteint le professionnalisme
que je viens d'évoquer parviennent à filialiser
leur activité informatique. Cela constitue pour
moi un niveau élevé de maturité qui
va progressivement se généraliser.
Je crois enfin beaucoup à
l'interconnexion et à l'intégration, en
ce sens qu'elles sont des modes de communication et de
gouvernance élargis via l'interfaçage
qui peut exister entre clients et fournisseurs.
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Patrice Henry a commencé sa carrière au sein du groupe
Cap Gemini où il a été successivement responsable des
bureaux de Marseille, Montpellier puis de Dallas et Houston
aux Etats-Unis, avant de diriger le secteur énergie et
chimie au niveau mondial. Il a ensuite dirigé le secteur
Industrie pour les activités consulting et intégration
de systèmes d'IBM Global Services en France. Il occupait
le poste de Directeur Général de FI System, avant de rejoindre
l'activité conseil stratégique et opérationnel d'Andersen,
entité devenue depuis BearingPoint, en tant qu'associé
(Managing Director). |
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