Le management de la métamorphose
Par Antoine Cahen
Co-fondateur d'Alapage.com, administrateur de
digital-shopping.com, business angel
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Vendredi 3 mars 2001 -
Rafi
Haladjian, dans sa dernière "Tribune",
met à mal le mythe du gourou qui sait tout et il a raison. Le
monde des nouvelles technologies est certes moins facile à cerner
aujourd'hui mais reste à l'image de l'existant, en tous les cas
celui de la pensée qui en est la source. Le micro-ondes est devenu
un four électrique à micro onde, la télévision deviendra un support
interactif très grand public.
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Le
nouveau marketing va aussi se complexifier; l'homme riche et un
peu moins riche se construit, s'instrumentalise autour des technologies
que ses parents auront choisi. Choisir une technologie est, comme
tout choix, un renoncement. Un marketing du renoncement s'annonce
donc : il faudra peut-être savoir à quoi la cible n'est pas prête
à renoncer pour l'accrocher. Malgré tout, je ne crois pas à la
disparition des standards mais à leur multiplication et à leur
mélange. Ceci par classement : des classes qui se déterminent
par la compatibilité, par l'utilisation, par les tribus, par les
habitudes, par les types de connaissances, de compétences et savoir-faire,
par sa morale politico-technologique (exemple : le logiciel totalement
libre, l'open source, le propriétaire...), par les moyens financiers
des ménages et des entreprises...
En
2001, pour décrocher un partenariat, il faut assurer
une grosse rentabilité. |
Comment
ne pas se remettre en question dans chaque nouvelle situation
de consultant, d'entrepreneur ou de salarié alors que les segments
même des marchés sont en train de se scinder et que chaque année
les recettes du succès sont déjà différentes dans un même secteur
d'activité ? En 1994, on (mon entourage) avait du mal à se
connecter avec Worldnet mais c'était cool.
En 1995, on prenait conscience que chacun d'entre nous pouvait
créer son propre média et on commençait à prédire notre avenir
à partir des expériences américaines.
En 1996, on commençait à réfléchir à des modèles économiques et
l'on pouvait pressentir quelles sociétés internationales et surtout
américaines prenaient de la valeur. Le minitel s'est porté sur
Internet.
En 1997, il suffisait quasiment d'aller voir un responsable d'un
site pour faire un partenariat.
En 1998, il fallait lui proposer du gagnant/gagnant et l'on pouvait
se payer de l'audience pas cher.
En 1999, il fallait être capitalisé pour se payer de l'audience,
les partenariats étaient souvent devenus de l'achat d'espace.
En 2000, il fallait mieux avoir déjà été lourdement capitalisé
ou pouvoir compter sur un modèle à court terme. Les gros sites
avaient pour la plupart des dizaines de chantiers et partenariats
à mettre en place, plus la peine de prospecter sauf si un accord
promettait une grosse rentabilité.
En 2001, il faut pour faire un partenariat, non seulement assurer
une grosse rentabilité mais en plus coller totalement à la stratégie
du partenaire. Une
bonne nouvelle pour 2001, les sociétés très spécialisées arrivent
plus facilement à tirer leur épingle du jeu, elles n'ont pas besoin
de brûler le capital pour se faire connaître, elles savent où
cibler juste pour trouver les prescripteurs et les leaders d'opinions...
Dans
l'économie des nouvelles technologies, l'avenir est
au spécialiste pluriel. |
Un
des axes du succès des années à venir serait-il d'être un spécialiste
et, comme le dit Rafi Haladjian, admettre de ne pas tout savoir.
Certainement, mais à condition comme le disent si bien
les mamies de ne pas mettre tous ses oeufs dans le même panier
: il faudra accumuler des compétences diversifiées.
L'avenir du multispécialiste est ainsi sans doute tracée : pas
les multispécialistes que l'on connait et qui finalement ne sont
aujourd'hui véritablement spécialistes de rien. Mais un spécialiste
pluriel, des associations de spécialistes qui respectivement gardent
leur valeurs. Là, me semble t-il, est le challenge qu'il faut
relever dès maintenant et qui constituera peut-être l'un des enjeux
de l'économie des nouvelles technologies pour quelques années
et en particulier du commerce online.