Internet : huit mesures
pour repartir du bon pied
Par Patrick
Robin
Fondateur d'imagiNet
Vice-président associé de Grey
Interactive
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Jeudi 3 mai 2001 -
Depuis
bientôt un an, on parle beaucoup des difficultés de financement
des jeunes entreprises assimilées à la Net-économie. La Bourse
va mal et ces entreprises ne trouvent plus grâce aux yeux des
analystes. Quant aux VCs, ces derniers mois, ils se sont surtout
efforcés de consolider leur portefeuille. Et si certains ont malgré
tout continué d'investir, il s'agissait principalement de 2ème
ou de 3ème tour de financement, mais rarement de 1er tour
et moins encore d'amorçage !
Dans
ce climat, on a vu les milliers de "business angels" - cuvée 1999-2000
- disparaître aussi subitement qu'ils étaient apparus durant cette
période euphorique, et avec eux s'envoler des centaines de millions
de francs qui retournent sagement aux PEA et à l 'assurance-vie.
Autant de fonds qui n'iront pas dans la création de "jeunes entreprises
innovantes et fortement créatrices d'emplois", que l'on appelait
il n'y a pas si longtemps start-up, avant que cela ne ressemble
à une injure ou à une faute de gestion!
Aujourd'hui
donc, et malgré quelques centaines de business angels qui font
de la résistance, le véritable e-krach n'est pas là où on le croit.
Ce n'est pas le Nasdaq ou le Nouveau Marché qui s'est effondré,
mais la capacité d'amorçage et de création de nouvelles entreprises
liées à l'internet. La chaîne de financement s'est brisée et le
premier maillon de la chaîne, les business angels, ne sera pas
miraculeusement remplacé par une dizaine de fonds d'amorçage,
qui, pour les plus audacieux, ne feront cette année qu'une dizaine
de dossiers chacun... Faites le compte !
Donner
l'envie de revenir sur le marché du "seed capital". |
Pourtant,
il suffirait sans doute de presque rien pour redonner des raisons
d'espérer et l'envie à quelques milliers de dentistes, de cadres
retraités, d'ex-chefs d'entreprise de revenir massivement sur
ce marché du "seed capital". Un petit coup de pouce
également suffirait peut-être pour que les entreprises françaises
anticipent, plutôt qu'elles ne repoussent, leurs investissements
et leur passage aux nouvelles technologies et tout particulièrement
celles qui sont liées à l'Internet et au commerce électronique.
1- Des
mesures à l'attention des Business Angels :
- Report d'imposition de toute plus-value qui serait réinvestie
dans de jeunes entreprises innovantes.
- Ramener l'impôt de 26 à 16% sur les plus-values qui seraient
issues d'investissements dans ce type d'entreprise.
- Exclure de l'assiette de l'ISF les titres détenus dans les start-up.
- Augmenter le plafond de déductibilité des pertes en capital.
2- Des
mesures destinées aux entreprises :
- Instaurer "un crédit Impôt-Net" (sur le principe du crédit impôt-recherche)
pour relancer les investissements des entreprises dans les NTIC
et plus particulièrement dans l'Internet.
- Relancer l'emploi des jeunes dans la Nouvelle économie grâce
à la réduction des charges sociales pour chaque emploi créé dans
le département Internet des PME. Objectif : 1 webmaster dans chaque
entreprise en 2005.
3- Mesures
générales:
- Orchestrer des campagnes de communication d'intérêt général
pour promouvoir le commerce électronique et essayer de rassurer
les internautes sur le thème de la sécurité des paiements.
- Publier un livre blanc qui tordrait le cou aux idées reçues
et paranos du net (sécurité des paiements, nazis, pornographie,
pédophilie...) et que véhiculent trop souvent certains médias
ou certaines campagnes publicitaires.
Il
faut impérativement favoriser le capital d'amorçage. |
En
résumé, nous devons tout faire pour sauvegarder l'enthousiasme
d'une nouvelle génération d'entrepreneurs. La France a retrouvé
le goût d'entreprendre, donnons lui les moyens de le faire. L'arrivée
du Nasdaq Europe est une excellente nouvelle pour assurer une
sortie aux investisseurs, une liquidité des titres et le financement
d'entreprises de croissance ayant déjà atteint une certaine maturité.
Mais d'ici là il faudra d'abord leur donner la chance de naître.
C'est pourquoi il faut impérativement favoriser le capital d'amorçage.
Au-delà
des enjeux économiques que représente la création d'entreprises
innovantes pour la France et pour l'Europe, il est vital d'ouvrir
un peu plus grand "les portes d'entrées" aux jeunes entrepreneurs!
Si on ne laisse plus entrer personne, la nouvelle économie ressemblera
bientôt à ces boîtes de nuit, qui, à l'image de clubs comme Regine's
ou Castel, devront bientôt se recycler dans les thés dansants.
Comme à une certaine époque, nous risquons de voir les talents
s'expatrier et les jeunes se remettre à rêver de devenir fonctionnaires,
comme nous l'apprenait une étude, il y a tout juste dix ans !
Entre les exagérations symbolisées par les First Tuesday et l'odeur
de naphtaline des thés dansants qu'on nous prépare, n'y aurait-il
pas une autre voie ?