L'avènement de la fabrication dans le noir et l'industrie 4.0

La pandémie de Covid-19 a eu des conséquences multiples dans le monde entier, mais elle a aussi eu un résultat inattendu : l'accélération de la transition vers l'industrie 4.0, également appelée " fabrication dans le noir ", où les usines entièrement automatisées sans recours à une présence humaine sur place, dans les secteurs biopharmaceutiques et des technologies médicales.

Des technologies telles que le cloud computing, l’IA, les SaaS, le machine learning, la robotique et les logiciels d’entreprise avancés favorisent cette évolution. Selon un rapport publié par McKinsey en 2020, les fabricants sont en train de convertir leurs chaînes d’approvisionnement et leurs lignes de production pour en faire des processus pérennes, alors que certaines entreprises engagées dans la voie de la numérisation ont accéléré le rythme au cours de l’année 2020. 

De même que le télétravail et l’utilisation de technologies électroniques permettant de se connecter à distance sont devenus des éléments incontournables pour les professionnels avec la pandémie, l’automatisation numérique des usines a commencé à se développer rapidement dans de nombreuses industries au cours de l’année 2020.  

Vers l’usine du futur 

De nombreuses sociétés américaines sont implantées depuis longtemps en Irlande, telles que J&J, Boston Scientific, Abbott, ou encore Pfizer, pour n’en citer que quelques-unes.  Le secteur des technologies médicales a été l’un des premiers à s’orienter vers la fabrication dans le noir au vu de l’incidence de cette dernière sur la productivité, en particulier dans un environnement de fabrication en discontinu, grâce à de meilleurs systèmes et technologies de connexion. Le secteur qui risque d’être confronté à des difficultés plus importantes est celui des entreprises pharmaceutiques, dont les usines et les procédés sont plus matures.  Cependant, les retombées de la Covid-19 ont constitué, assez curieusement, une véritable aubaine pour ce qui est d’accélérer le déploiement de l’usine du futur. Les principales technologies qui facilitent cette évolution sont l’IA, le machine learning, ainsi que la robotique et l’automatisation avancée. 

À titre d’exemple, Janssen, filiale de Johnson & Johnson, une entreprise de fabrication pharmaceutique implantée à Cork, s’attèle au lancement d’un projet visant à accroître la capacité de certains des principes actifs pharmaceutiques utilisés dans des comprimés, des pommades ou des formulations injectables. Janssen fait appel à la robotique et à l’automatisation avancée pour extraire des données de la chaîne de production afin de mieux appréhender les processus, en utilisant des données intelligentes, des analyses et l’IA pour prédire le fonctionnement futur de la chaîne. Il en résultera une augmentation du rendement, de l’efficacité et une réduction des stocks. Un autre exemple est celui de Novartis et Microsoft. À la fin de 2019, les deux sociétés ont entamé une collaboration visant à réduire considérablement le long et coûteux processus de développement de nouveaux médicaments sur ordonnance, en utilisant la technologie d’IA avancée de Microsoft et l’expertise de Novartis dans le domaine des sciences de la vie. Les entreprises prévoient d’utiliser l’IA pour développer des médicaments, depuis la recherche et les essais cliniques jusqu’à la fabrication et l’exploitation. Les nouveaux traitements ciblant la dégénérescence maculaire et les thérapies innovantes, notamment les thérapies géniques, utilisées contre la leucémie aiguë lymphoblastique sont les premiers à faire l’objet d’une attention particulière. Le recours à l’IA permettra de réduire le coût associé à ces activités. 

Le numérique au service des développements de pointe 

Des pays comme l’Irlande ont pris conscience de la demande en faveur d’une fabrication numérique permettant d’accroître la flexibilité, la résilience et l’efficacité.  Pour répondre au besoin émergent de ressources de production de prochaine génération en 2021, un nouveau centre de fabrication avancée (Advanced Manufacturing Center – AMC) ouvrira ses portes à Limerick, en Irlande.  Dans la mesure où de nombreuses entreprises font preuve de diligence raisonnable en ce qui concerne les exigences opérationnelles nécessaires pour appuyer la fabrication de pointe, l’AMC aura pour objectif principal d’aider les entreprises à déterminer les secteurs dans lesquels elles pourraient déployer des technologies de production et des plateformes numériques émergentes afin de transformer la fabrication actuelle en opérations numérisées de nouvelle génération. Une collaboration accrue entre les secteurs industriels tels que la technologie, les dispositifs médicaux et l’ingénierie revêtira une importance capitale pour la mise en place de solutions de fabrication de nouvelle génération et exigera la mobilisation des compétences adéquates. Des centres comme l’AMC seront à même de favoriser de telles collaborations et d’améliorer les compétences de la main-d’œuvre industrielle. 

La percée de l’industrie 4.0 dans les entreprises des sciences de la vie du monde entier laisse présager l’avènement de la fabrication dans le noir, laquelle se caractérise par une technologie intelligente et une mise en réseau avancée qui, grâce à des mécanismes internes interconnectés, transforme les processus industriels. Il est assez paradoxal qu’une pandémie mondiale ait contribué à accélérer la transition vers les usines automatisées de demain.