IA : la course aux ressources nous mène-t-elle droit dans le mur énergétique ?

L'IA pourrait être une révolution ou un désastre, selon Stephen Hawking. Un risque sous-estimé avec son coût énergétique énorme. D'ici 2030, elle pourrait consommer 25 % de l'énergie aux USA.

L’intelligence artificielle pourrait être « la pire ou la meilleure chose arrivée à l’humanité », affirmait Stephen Hawking, qui voyait en elle une graine de destruction… ou une révolution technologique majeure.

Mais l’astrophysicien britannique ignorait un autre risque associé au développement de l’IA, largement mis sous le tapis : son coût énergétique délirant… et impossible à soutenir avec nos ressources actuelles.

Un danger économique et environnemental dont on ne parle que très peu. Et un paradoxe apparemment insoluble.

L’IA et son appétit insatiable

Les débats autour de l’intelligence artificielle tournent autour des mêmes questions – risques pour l’emploi, dangers de l’éveil à la conscience, etc. En mettant de côté la plus importante lorsqu’on évoque la possibilité d’atteindre un niveau de maturité suffisant pour l’IA : l’énergie nécessaire pour y parvenir.

Selon le CEO d’Arm, Rene Haas, l’IA pourrait représenter 25 % de la consommation d’énergie aux USA d’ici 2030 – autant dire : demain ! – contre 4 % aujourd’hui. En cause : les grands modèles de langage (LLM) type ChatGPT, décrits par Haas comme « insatiables en termes d’électricité ».

Une position soutenue par les chiffres. Le rapport 2024 de l’Agence internationale de l’énergie prédit, pour les datacenters spécialisés dans l’IA, une consommation dix fois supérieure aux niveaux de 2022. Parce que les LLM requièrent plus de puissance que les services Cloud traditionnels. Les estimations montrent que le traitement d’une seule requête par ChatGPT nécessite dix fois plus d’énergie qu’une recherche classique sur Google. Si la firme de Mountain View devait basculer intégralement vers des technologiques IA, sa consommation électrique annuelle totale passerait à 11 TWh !

L’empreinte carbone de l’intelligence artificielle

Au-delà de la consommation d’énergie se pose la question de l’empreinte carbone de l’IA… et du numérique dans son ensemble. Car le digital a aussi un coût énergétique et environnemental. 10 % de la consommation électrique annuelle française est dédiée aux services numériques, responsables de 2,5 % de l’empreinte carbone totale du pays (Ademe). Sans même parler des autres problèmes posés par les datacenters, qui dégagent une chaleur peu ou pas du tout réutilisée, et dont l’expansion en termes de surface contribue à l’artificialisation des sols.

L’IA, la plus grande erreur de l’humanité ?

Résumons : pour croître, l’IA a besoin de ressources énergétiques potentiellement infinies… mais nous vivons sur une planète aux ressources finies. D’où cette interrogation : sommes-nous en train de commettre la pire erreur de l’humanité ?

D’un côté, il y a le développement technologique et ses avantages hypothétiques. L’IA pourrait s’avérer incontournable, demain, pour lutter contre le réchauffement climatique, guérir le cancer ou conquérir l’espace. Le nier, c’est donner raison aux tenants de l’heuristique de la peur (lire à ce propos La planète des hommes. Réenchanter le risque de Gérald Bronner).

De l’autre, il y a le paradoxe énergétique posé par l’IA, la nécessité d’un volume de ressources toujours plus grand pour alimenter une technologie insatiable – et dont l’utilité reste à démontrer. Car l’IA n’est aujourd’hui rien de plus qu’un outil conversationnel, certes plaisant, mais sans utilité publique. Une raison suffisante pour esquinter la planète ?

Pour résoudre ce paradoxe, il faut prendre le problème à la source. Commencer par augmenter la puissance de calcul. Investir dans des technologies plus efficientes, comme l’informatique quantique (qui reste encore à maîtriser).

Mais ne soyons pas naïfs : même si les technologies IA deviennent plus efficaces, ce gain ne se traduira pas forcément par une baisse de la consommation, mais plutôt par une fuite en avant vers une production toujours plus grande d’énergie. 

Amazon en a déjà pris son parti en faisant l’acquisition d’un datacenter alimenté par le nucléaire en Pennsylvanie… Est-ce vraiment la direction que nous souhaitons prendre ?