5 tendances incontournables dans la tech en 2025, et au-delà
En 2025, nous entrons dans une nouvelle ère où la technologie devient le moteur d'une profonde transformation sociétale.
L'innovation sera évaluée non seulement sur ses performances techniques, mais surtout sur sa capacité à résoudre les grands défis de l'humanité.
Une synergie fascinante émerge entre progrès technologique et ingéniosité humaine, de l'énergie propre à la lutte contre la désinformation. Les technologies centrées sur l'intention redéfinissent notre relation au numérique, privilégiant notre bien-être plutôt que la distraction.
Une nouvelle génération de talents, motivée par des objectifs dépassant le simple profit, utilise son expertise technologique pour s'attaquer aux problèmes majeurs de l'humanité. À l'avenir, l'utilisation de la technologie pour un impact positif redéfinira notre conception du succès.
1. Des talents toujours plus en quête de sens
Imaginez un monde où la réussite professionnelle se mesure davantage à l'impact positif que l'on peut avoir qu’au statut ou au salaire. Les entreprises qui embrasseront cette quête de sens qui anime de plus en plus d’employés prospéreront à long terme.
Face aux défis urgents de notre époque, une révolution silencieuse bouleverse le marché du travail : de plus en plus d'employés, toutes générations confondues, recherchent des rôles ayant un impact tangible sur la société et l'environnement. Cette tendance est particulièrement marquée chez les Millennials et la Génération Z, prêts à sacrifier une partie de leur salaire pour des emplois à impact social positif selon une récente étude de la Harvard Business School.
Les métiers du développement durable connaissent une croissance significative, impulsée à la fois par l’offre et la demande, en atteste le classement LinkedIn des métiers en plein essor. La transition vers les énergies renouvelables, portée par la baisse des coûts technologiques, des politiques publiques favorables et une demande croissante pour des solutions énergétiques propres, illustre la possibilité de conjuguer impact positif et rentabilité. Les métiers traditionnels se transforment et nous observons l'émergence de rôles hybrides, alliant expertise technique et compétences environnementales ou sociales.
Chez Amazon, par exemple, de nombreux ingénieurs s'orientent vers des projets à fort impact sociétal. Les jeunes générations, conscientes de leur capacité à résoudre des problèmes complexes grâce à la technologie, sont particulièrement sensibles aux questions d'inégalités, de santé mentale et de changement climatique.
Pour rester compétitives, les entreprises doivent repenser leurs stratégies pour attirer et fidéliser ces talents en créant des postes à impact social positif, en intégrant la durabilité dans les fonctions existantes et en ancrant véritablement les valeurs ESG dans leur ADN.
2. L'efficacité énergétique comme impératif technologique
Face à la demande énergétique croissante et à l'urgence climatique, nous devons réinventer nos modes de production, de stockage et de consommation d'énergie. Les énergies renouvelables et le nucléaire nouvelle génération émergent comme solutions complémentaires.
Il y a deux ans, je prédisais une vague d'innovations dans les technologies énergétiques intelligentes, mettant l'accent sur les solutions de stockage, les réseaux décentralisés et les systèmes de consommation intelligents en réponse à la crise énergétique mondiale et aux défis inédits posés par la COVID-19. Depuis, l'IA générative et l'électrification massive ont fait exploser la demande énergétique, rendant encore plus pressante la nécessité de solutions robustes et évolutives.
Les énergies renouvelables, en particulier l'éolien et le solaire, ont considérablement progressé en termes de fiabilité et de maturité, jouant un rôle crucial dans la réduction de l'empreinte carbone et la décentralisation de la production. Cependant, elles ne peuvent à elles seules satisfaire la demande énergétique croissante.
Pour combler cet écart, le nucléaire connaît un regain d'intérêt, notamment avec les petits réacteurs modulaires (PRM). Ces derniers offrent des avantages significatifs en termes de compacité, de flexibilité et de facilité d'entretien. Des géants technologiques comme Amazon investissent massivement dans ce domaine[1], témoignant de la confiance renouvelée dans le potentiel du nucléaire. Et les avancées technologiques sont spectaculaires : soudures de qualité nucléaire ultra-rapides, sécurité sismique renforcée, et possibilité de réutiliser des sites existants comme d'anciennes centrales à charbon.
La révolution énergétique ne se limite pas à la production ; elle concerne aussi la consommation, notamment dans le secteur des data centers. Face à l'explosion de la demande en puissance de calcul, les modèles hyperscale permettent de réduire la consommation d'énergie de près de 25%. L'avenir verra l'émergence de data centers fonctionnant comme des centres de charge flexibles, capables d'ajuster leur consommation en temps réel selon les besoins du réseau, optimisant ainsi l'utilisation de l'énergie et renforçant la stabilité du réseau.
Cette transformation radicale nécessite une main-d'œuvre hautement qualifiée, allant des ingénieurs nucléaires aux experts en gestion de réseau, en passant par les spécialistes des matériaux. L'investissement dans l'éducation, la formation et la reconversion professionnelle sera crucial, créant des emplois qualifiés et bien rémunérés, tout en stimulant l'innovation.
Nous sommes à l'aube d'une ère où les défis énergétiques ne seront plus un frein, mais un moteur de progrès. L'énergie propre, portée par l'innovation technologique et une main-d'œuvre qualifiée, s'apprête à ouvrir un nouveau chapitre de l'histoire de l'innovation, redéfinissant les limites du possible et nous propulsant vers un avenir énergétique propre et durable.
3. L’IA démocratise le fact-checking
Face à la prolifération des fake news, l'IA offre de nouveaux outils pour traquer la vérité, démocratisant l'investigation et accélérant la vérification des faits.
L'ère numérique a transformé l'information en un flux continu, avec comme principal vecteur de diffusion et de consommation les réseaux sociaux, rendant difficile la distinction entre informations vérifiées et fausses informations. Avec 52% de la population peinant à identifier les informations fiables, la technologie, d'abord à l’origine du problème, pourrait devenir la solution.
Des organisations comme Bellingcat et ProPublica utilisent des données publiques (géolocalisation, chronologie, adresses IP, etc.) pour mener des enquêtes approfondies, par exemple dans le cadre de violations des droits de l'homme ou de conflits internationaux. Les grandes rédactions comme la BBC ou le New York Times ont adopté les méthodologies ROSO[2] pour vérifier les faits et valider leurs enquêtes, partageant même parfois leurs propres outils en open-source. Cependant, ces processus restent lents face à la vitesse de propagation des fausses informations.
De nouvelles innovations technologiques émergent pour contrer ce phénomène et endiguer la propagation d'inexactitudes, accidentelles ou intentionnelles, à l’instar de TrustNet pour la vérification collaborative et en temps réel des contenus web, GeoSpy pour l'analyse géographique des photos, ou Proem, qui utilise l'IA générative pour enrichir l'actualité avec des connaissances académiques.
L'investissement dans ce secteur est en plein essor, avec plus de 250 millions d'euros alloués cette année aux start-ups développant ces solutions. L'industrie ROSO pourrait atteindre une valorisation de plusieurs milliards dans la prochaine décennie.
Ces avancées promettent un basculement en faveur des faits, permettant aux informations vérifiées de circuler aussi rapidement que les fake news. Cela devrait restaurer la confiance dans les médias et améliorer la qualité du débat en ligne, bénéficiant à tous les acteurs de la société.
En tant que professionnels de la technologie, nous avons le devoir d'innover et de créer des outils pour identifier et combattre la désinformation. Cette mission vise à construire une société mieux informée et plus résiliente. Notre ambition est claire : nous devons utiliser la technologie non seulement pour connecter le monde, mais aussi pour protéger l'intégrité de l'information qui lie notre société.
4. L’open data au cœur de la gestion décentralisée des catastrophes
La gestion des catastrophes connaît une transformation majeure, évoluant vers un modèle proactif et décentralisé fondé sur des données hyperlocales fournies par les communautés elles-mêmes. Cette nouvelle approche vise à combler les lacunes des systèmes actuels, mises en lumière lors d'événements récents tels que les ouragans Hélène et Milton aux États-Unis, où des déficiences critiques dans la cartographie des ressources ont été constatées, notamment dans les zones intérieures considérées à faible risque.
Une préparation efficace repose sur la collecte et l'utilisation structurée des données ; des plateformes innovantes émergent, exploitant l'omniprésence des smartphones pour permettre aux résidents de partager des informations cruciales en temps réel. Lors des inondations de 2022 à Lismore, en Australie, les habitants ont coordonné les secours via les réseaux sociaux et Google Sheets, créant ainsi un écosystème de données improvisé mais efficace. De plus en plus d’applications communautaires voient le jour, comme celles utilisées pour suivre les feux de forêt (par exemple, Watch Duty), permettant aux résidents de signaler les conditions en temps réel et d'orienter les efforts de réponse.
Le programme Now Go Build CTO Fellowship que nous avons récemment lancé soutient cette transformation, notamment à travers des projets comme l'Humanitarian OpenStreetMap Team (HOT), qui mobilise plus de 500 000 bénévoles dans le monde pour cartographier les régions vulnérables, et Help.NGO, qui utilisent drones, edge computing et services AWS pour cartographier les zones sinistrées en temps réel lorsque les systèmes de communication conventionnels sont défaillants.
Les avancées dans l'edge computing et la connectivité par satellite jouent un rôle crucial dans cette évolution, permettant le traitement des données en temps réel même dans les conditions les plus difficiles. Cela rapproche la prise de décision de ceux qui sont les plus touchés, donnant aux premiers intervenants et aux résidents un accès immédiat à des informations exploitables.
Cette transition vers une approche axée sur les données n'est plus un luxe mais une nécessité absolue face à la multiplication des catastrophes. Elle crée un réseau de pôles de gestion des catastrophes qui renforcent la préparation et la résilience, permettant aux communautés locales de faire face à un monde de plus en plus imprévisible avec confiance et autonomie.
5. Vers un usage plus réfléchi des technologies grand public
Une transition subtile est à l’œuvre dans notre rapport à la technologie, vers un usage plus conscient et réfléchi, plutôt que purement distractif.
L’omniprésence des appareils connectés, qui sont devenus des extensions de nous-mêmes, a eu des conséquences alarmantes : l’usage quotidien des réseaux sociaux chez les adolescents a connu une augmentation spectaculaire, de 50% à 95% entre 2009 et 2022. Parallèlement, 72% des enseignants américains considèrent désormais les distractions dues au téléphone portable comme un problème majeur pour l'apprentissage et la santé mentale des élèves, tandis que TikTok admet qu’une dépendance peut s’installer chez ses utilisateurs après seulement 35 minutes d'utilisation. Des tendances qui soulignent l'urgence de réévaluer notre relation avec la technologie et de privilégier une utilisation intentionnelle et réfléchie.
Chez Amazon, par exemple, nos méthodes de travail encouragent la concentration et la réflexion profonde : quelle que soit leur ancienneté ou rôle, nos employés sont encouragés à développer leurs idées dans des documents écrits détaillés. Ces documents sont ensuite lus en silence lors de réunions dédiées, avant d'être discutés collectivement. Cette approche oblige chacun à être présent et favorise la réflexion et la concentration, à l’abris des distractions constantes de l'ère numérique.
On observe l'émergence d'innovations axées sur un usage plus intentionnel de la technologie. Les liseuses comme le Kindle ont ouvert depuis longtemps la voie, en encourageant une lecture sans interruptions. Aujourd'hui, cette tendance s'étend à d'autres appareils : des téléphones minimalistes conçus pour réduire les distractions, des appareils photo centrés sur l'art plutôt que sur le partage immédiat, et des lecteurs de musique autonomes qui permettent une écoute plus immersive.
Ces innovations ne visent pas à abandonner la connectivité, mais à prendre conscience de la manière dont les appareils peuvent renforcer nos intentions au lieu de simplement capter notre attention. Il s'agit de trouver un équilibre délicat. Dans le monde professionnel, des pratiques managériales comme l'exclusion des téléphones pendant la première heure de travail gagnent du terrain, soutenues par des experts en médecine du mode de vie de Stanford. À titre personnel, l'auteur mentionne consacrer un après-midi par semaine à l'apprentissage sans distractions numériques.
Ces méthodes s'inspirent du concept néerlandais de "niksen" (l'art de ne rien faire) et visent à réaligner la technologie avec nos valeurs et notre santé mentale dans un monde complexe. L'objectif est d'élever notre relation avec la technologie pour qu'elle nous autonomise davantage qu'elle ne nous détourne de l’essentiel.
[1] Amazon a annoncé en octobre 2024 un investissement de 500 millions de dollars dans X-energy, une start-up pionnière dans le développement de petits réacteurs modulaires (PMR) et un partenariat avec Energy Northwest pour déployer ces réacteurs dans l'État de Washington
[2] ROSO : Renseignement d'origine sources ouvertes ; en anglais, OSINT : open source intelligence