Havas, aux avant-postes de l'IA générative
Comptant parmi les plus grandes entreprises de communication au monde avec plus de 23 000 collaborateurs dans plus de 100 pays, le groupe français Havas s'est rapidement saisi de l'IA générative.
Pour l'expression de besoin et la vente
Aujourd'hui, ses équipes créatives y ont recours dès l'étape d'expression des besoins. "Dans un premier temps, je l'utilise pour synthétiser des documents orientés stratégie en vue de gagner du temps. Elle me permet de dégager les grands axes de la vision du client pour améliorer l'expression de la direction artistique", explique Marion Gamain, directrice artistique chez Havas Paris. "En partant d'un brief client, j'y ai également recours pour réaliser un benchmark de ce qui a été réalisé sur le même créneau en glanant des références graphiques. Ce qui me permet de gagner beaucoup de temps pour saisir la marque du client, ses points de différenciation ainsi que le marché sur lequel il évolue."
La directrice artistique d'Havas a aussi recours à l'IA générative pour vendre ses concepts. Lors de cette phase créative, Marion Gamain n'hésite pas à ajouter une foule de détails techniques dans ses prompts en vue d'aiguiller l'IA dans le sens souhaité : la focal, la profondeur de champs, la lumière ou autres effets visuels... Le tout pour éviter d'aboutir à un résultat "trop lisse". Dans certains cas, l'IA lui livre des résultats surprenants en termes créatifs sur lesquels la directrice artistique peut rebondir en mode conversation pour rectifier le tir ou affiner certains points de l'image si le visuel se révèle pertinent.
Jean-Jacques Rebouil, directeur associé au sein du département Havas Paris Social chez Havas Paris, ajoute : "J'utilise aussi l'IA générative pour dénicher de nouveaux concepts. Pour ce faire, je lui demande de critiquer mes idées pour un brief donné. Ce qui me permet de trouver de bons contre-arguments ou d'affiner mes idées."
Une technique qui se révèle particulièrement pertinente lorsque le brief du client n'est pas suffisamment nourri. Ce levier est d'autant plus intéressant compte tenu du timing souvent très contraint des appels d'offres. "L'IA générative ne remplace pas la culture que doit avoir un directeur artistique, elle permet simplement de générer des images à partir de statistiques. C'est une co-création d'un produit dont le directeur artistique reste maître du résultat", insiste Marion Gamain. "Auparavant, nous devions dénicher une photo dans une base d'images, ou la créer via Photoshop pour parvenir à exprimer l'idée visuellement. Désormais, avec l'IA générative, nous parvenons beaucoup plus rapidement à un résultat, qui n'est pas forcément très beau, mais qui a le mérite d'être explicite graphiquement."
Compte tenu des problématiques posées par l'IA générative en termes de droits d'auteur, Havas s'interdit de recourir à cette technologie pour réaliser le produit fini, du moins sur le terrain de l'image. Dans ce domaine, l'agence se contente de l'utiliser pour vendre ses idées. "Pour être en phase avec le droit d'auteur, nous devons recourir à Firefly, l'IA générative d'Adobe. Mais celle-ci n'est clairement pas au même niveau qu'un Midjourney." Une fois le concept validé par le client, l'agence créative du groupe Havas opte donc pour le chemin de réalisation traditionnel, avec à la clé l'intervention de toute la chaîne de production : photographe, vidéaste, graphiste…
Pour industrialiser les contenus sociaux
Il est néanmoins un domaine où Havas a recours à l'IA générative pour la réalisation : celui des contenus sociaux. Sur ce terrain, le groupe français fait appel à Microsoft Copilot, ChatGPT ou Claude en promptant les caractéristiques de la marque ciblée en termes de styles, de tonalité, de wording, de hashtag... "Il est nécessaire de bénéficier d'une vraie maîtrise de l'identité éditoriale du client, mais aussi de savoir prompter finement pour bénéficier d'un résultat original", insiste Jean-Jacques Rebouil.
Dans le cadre d'une campagne de mise en vente d'objets pour le compte d'Emmaüs, Havas Paris Social a notamment eu recours à l'IA générative pour créer 300 annonces d'articles à vendre. Une photo était fournie à l'IA pour chaque article, ainsi que des informations sur sa date de sortie, ses différents propriétaires passés... "En aval, une annonce attractive était générée avec, par exemple, des références culturelles sur les films ou la musique de l'époque de commercialisation", indique Jean-Jacques Rebouil. "Dans ce cadre, nous avons briefé l'IA comme s'il s'agissait d'un rédacteur, en lui donnant des indications de style, en lui demandant de dénicher des références de l'époque…" Un bon exemple où la gen AI, quand elle est bien utilisée, peut industrialiser la production de contenu textuel.