Intelligence artificielle : trois prismes pour comprendre son adoption après l'euphorie

Deux ans après ChatGPT, les projets d'IA se multiplient, souvent sans cap ni ROI clair. Pour réussir, il faut en maîtriser les coûts, l'évolutivité et la fiabilité, avec un vrai business case.

Deux ans après le lancement de ChatGPT, une prise de conscience massive s’est opérée, accompagnée d’une forte dynamique et d’une volonté accrue de déployer des projets en intelligence artificielle et IA générative. Les décisions restent largement dictées par la crainte de rater une opportunité ou de se laisser distancer par la concurrence. Les organisations souhaitent explorer les différentes options, tandis que les dirigeants cherchent à capitaliser sur l’engouement pour faire avancer de nouvelles initiatives.

Les avantages potentiels sont souvent perçus comme supérieurs aux risques, même lorsque les projets d’IA manquent de direction claire. Cela a conduit à des lancements sans réelle réflexion sur les résultats attendus, sur ce que signifie la réussite et sur les moyens concrets permettant à une équipe de faire aboutir le projet et d’en tirer profit pour l’entreprise.

Cette approche coûteuse nous a menés à un pic de décisions prises dans l’euphorie, lorsque de nombreux projets ont été lancés sans considération pour leur viabilité à long terme ni pour leur retour sur investissement (ROI).

Comment adopter l’IA tout en gardant le contrôle de l’entreprise ? Alors que cette technologie continue d’attirer des budgets importants, son adoption reste encore à un stade précoce de développement et d’exécution. L’époque des financements faciles semble désormais révolue. Les organisations doivent donc s’assurer que chaque projet d’IA génère un véritable ROI, et qu’il ne repose pas uniquement sur la peur de manquer une opportunité.

Pour qu’une initiative en IA ait un réel impact sur l’entreprise, il convient de l’aborder à travers trois prismes essentiels :

1. Estimer le coût et éviter les pièges

Au moment de l’essor de l’IA, de nombreux acteurs du marché ont été incités à initier de nouveaux projets. Les budgets ont été réorientés vers des initiatives pilotées par l’IA, sans que le coût soit nécessairement une priorité. Cependant, cet engouement et ces investissements ont été freinés, car de plus en plus d’organisations cherchent à maîtriser leurs coûts et à mieux comprendre la provenance du retour sur investissement.

Lors du commencement d’un projet en IA, il est essentiel de savoir comment expérimenter sans engager de fonds importants sur des initiatives susceptibles d’échouer. La capacité à ajuster les ressources à la hausse ou à la baisse permet aux entreprises de limiter les pertes. Les ressources de stockage et de calcul, centrales dans les projets IA, doivent être pleinement exploitées pour maximiser le ROI. Acquérir des processeurs graphiques qui restent inutilisés pendant 18 mois représente un investissement lourdement sous-utilisé. Mieux vaut pouvoir ajuster les capacités en fonction des besoins pour garder la maîtrise des coûts et créer de la valeur à long terme.

2. Maîtriser l’ampleur du projet et sa capacité d’évolution

Lorsqu’un projet d’IA est encore à un stade expérimental, son ampleur future reste difficile à cerner, aussi bien en phase de test qu’en vue d’un déploiement à grande échelle. Il est crucial de pouvoir passer du PoC (Proof of Concept) au déploiement, puis de soutenir le projet dans la durée. Les entreprises doivent évoluer sans avoir à remplacer l’infrastructure existante.

Le cloud constitue à ce titre un bon levier d’expérimentation, permettant d’ajuster les ressources, d’explorer le potentiel de l’IA, de cartographier la valeur business et de planifier à long terme. Toutefois, son coût peut vite s’avérer prohibitif, à tel point qu’un projet pourtant réussi peut devenir économiquement insoutenable. Dans les faits, les entreprises ignorent souvent où elles en seront dans 6 à 12 mois. Le projet peut prendre de multiples directions, et la définition même du succès varie selon les contextes. À cela s’ajoutent des contraintes réglementaires, de sécurité, ainsi que des exigences clients. Cela peut sembler complexe, mais les organisations agiles peuvent en faire un atout.

Il est pertinent d’envisager des modèles “as-a-Service”, qui éliminent l’incertitude liée à la consommation. Étant donné la dépendance de l’IA aux données, un modèle de stockage “en tant que service” basé sur une plateforme physique évolutive, capable d’offrir performance, débit et capacité à la demande, permet de répondre immédiatement à l’évolution des charges. C’est une solution idéale pour les entreprises en phase de test, soucieuses de ne pas financer une infrastructure inactive.

3. Assurer la fiabilité des systèmes

Une fois passées les phases exploratoires, les dirigeants cherchent à faire des projets IA de véritables services critiques pour l’entreprise. La fiabilité et la disponibilité deviennent alors primordiales. Dans des secteurs comme la banque ou le e-commerce, les applications clients doivent être accessibles en permanence et ne peuvent reposer sur une infrastructure instable. Pour des raisons de réputation, de conformité, de cybersécurité ou de fidélisation, l’entreprise ne peut se permettre la moindre défaillance. Viser une disponibilité totale est indispensable, et cela suppose de s’appuyer sur des fournisseurs capables de garantir une fiabilité maximale.

Revenir à l’essentiel en matière de financement

Certes, tous les projets IA ne sont pas excessivement coûteux. Toutefois, les dirigeants commencent à mettre fin à ceux dont les dépenses ne sont pas justifiées. Beaucoup ont lancé des projets en IA, convaincus de leur caractère indispensable pour rester compétitifs. Mais les financements accordés sur la base de simples intuitions ne sont plus acceptés.

Les projets sans objectif clair, sans business case solide, sont abandonnés ou n’émergent jamais. À l’avenir, il faudra faire preuve de plus de rigueur avant de valider le financement d’une initiative IA.

Il est temps pour les entreprises de revenir à l’essentiel : au lieu de laisser les décisions être dictées par la peur de manquer une opportunité, il faut s’interroger sur l’impact concret du projet, ses chances de succès, sa viabilité, sa contribution aux processus ou aux interactions clients, et la disponibilité des données nécessaires. Ce sont ces éléments qu’il faut évaluer avant d’engager un budget. Un business case structuré et une grille de vérification formelle doivent désormais précéder tout engagement.