Comment l’intelligence artificielle va réinventer les RH ?

L’intelligence artificielle est une bonne nouvelle pour la fonction RH dans laquelle elle va permettre d’injecter de plus en plus d’humain. C'est une véritable disruption de la fonction.

Automatisation : moins de travail humain, ou… plus d’humain dans le travail ?

Lorsque l’on parle d’automatisation du travail, c’est souvent la disparition potentielle de travail humain et d’emplois qui est mise en avant. Or focaliser sur cette perspective, c’est passer à côté d’autres conséquences massives et bien réelles : l’automatisation, au contraire, va profondément augmenter la part d’humanité dans le travail. En effet, aussi contre intuitif que cela puisse paraître, l’Intelligence Artificielle (IA) va faire émerger dans le travail « plus d’humain », grâce à un impact à trois niveaux. D’abord, dans la majorité des cas, ce n’est pas la totalité d’une activité humaine qui va être remplacée par la machine, mais uniquement la part des tâches les plus prédictives et répétitives. L’humain, libéré par la machine des tâches les plus « aliénantes », pourra se recentrer sur la part du travail où il a le plus de valeur ajoutée.

Ensuite, l’IA va permettre de faire des tâches dont l’humain est et restera incapable, en particulier par le traitement et l’analyse instantanée d’une très grande quantité de données. L'accès à ces informations donnera à l’humain de supers-pouvoirs d’analyse et de décisions, et complètera son action. Enfin, l’IA va permettre à l’humain d’analyser des situations complexes et de repérer précisément à quel moment il est opportun d’intervenir en tant qu’humain.

La fonction RH, augmentée et repositionnée

Airbnb n’a pas révolutionné son marché grâce au moelleux de l’oreiller : c’est sur un profond changement de paradigme – l’usage, le communautaire, que la plateforme de Chesky et Gebbia a assis sa croissance phénoménale. De même, le futur des ressources humaines ne sera pas linéaire : la rupture va être fondamentale. 

L’intelligence artificielle va fondamentalement repositionner la démarche RH, à trois niveaux :

1. L’automatisation des process, pour libérer la valeur humaine ajoutée. 

La part des tâches humaines prévisibles et répétitives pourra être automatisée : c’est toute une partie des processus RH qui sera digitalisée. Pour chaque poste, pour chaque tâche – et notamment les siennes, le manager RH doit se demander quelle partie du travail peut être prise en charge par un robot, et comment l’IA peut permettre d’être plus efficient. 

2. “Personal HR”, le collaborateur augmenté. 

En équipant directement les collaborateurs d’outils qui les rendent plus autonomes, l’IA leur permet de se former, de faire le point sur leur carrière, d’être coachés, de récupérer ou faire des feedbacks … L’IA redonne ainsi à chacun le pouvoir de piloter sa trajectoire de carrière. Que ce soit en matière de performance, de compétences, de formation, de coaching, d’environnement de marché, de mobilité, les fonctionnalités IA peuvent à la fois évaluer le collaborateur, lui faire des recommandations, et lui proposer des services. Cet empowerment du collaborateur est un atout absolument incontournable pour la transformation des organisations.

3. Smart data, pour booster l’intervention humaine. 

Enfin, grâce aux datas créés par les salariés et analysées par des intelligences artificielles, le RH recevra des notifications et saura où, quand et comment intervenir pour apporter toute sa valeur aux collaborateurs et à l’organisation. L’ensemble des données générées par le collaborateur lorsqu’il interagit avec ses outils digitaux, décryptées par l’IA, remonteront au manager RH pour l’alerter en temps réel sur les problématiques rencontrées par ses équipes – baisse de motivation, tension managériale, décrochage de compétences, etc.

En résumé:

Super-Paul !

Concrètement, à quoi va ressembler l’expérience RH à l’âge de l’IA ? Paul, collaborateur salarié d’une grande entreprise, a comme tous ses collègues un Personal HR sur son smartphone – configuré par les responsables RH en fonction des choix stratégiques de l’organisation. Paul interagit régulièrement avec son Personal HR dans une logique de store – pour évaluer l’atmosphère au bureau, son ressenti sur ses performances en réunion, ou ses attentes sur le feedback de ses managers. Il échange aussi sur sa satisfaction vis-à-vis de son travail – l’intérêt de ses missions, son acquisition de nouvelles compétences, la valeur qu’il pense apporter à l’entreprise. En analysant le tout, son Personal HR lui envoie des notifications, des recommandations – sur un programme de formation qui commence, un cours de yoga qui ferait baisser son stress, un flash-training sur la prise de parole en public, ou encore des informations sur les opportunités d’évolution dans l’entreprise. 

Le RH designer d’expérience et brigade d’intervention en “humanité”

Aux côtés de Paul, et de tous les autres, le rôle du manager RH va donc fondamentalement changer. En amont, il aura la responsabilité de configurer l’IA, initialement neutre, en fonction d’une vision, de valeurs et d’une culture d’entreprise uniques : pour paramétrer la data analyse et les critères d’apprentissage de l’IA, décider des niveaux d’interaction avec le collaborateur et des services proposés, le RH doit devenir un véritable designer d’expérience. Les data produites par l’interaction entre Paul et son Personal HR, processées par l’IA, remontent en temps réel au manager RH. Elles servent à la fois de base à leurs entretiens réguliers, mais aussi d’alerte au RH pour intervenir de façon ultra-ciblée auprès de Paul. Baisse de motivation, tension managériale, décrochage de compétences, à la façon d’une brigade d’intervention, le RH pourra agir en flux, au bon endroit, au bon moment, pour débloquer des dynamiques humaines individuelles et collectives. Le manager RH éclairé par l’IA, expert de l’humain, coache sur-mesure chacun de ses collaborateurs et de ses équipes, et les accompagne dans leur développement.

Alliance homme / machine

Dans les RH comme ailleurs, la « guerre des intelligences » - humaine contre artificielle, n’aura pas lieu : c’est ensemble que l’homme et la machine fonctionnent le mieux. A condition de savoir coopérer : battu aux échecs par l’ordinateur Deep Blue, le champion Gary Kasparov a mené une série d’expérimentations sur la collaboration homme-machine dans un tournoi d’échec hybride. Résultat : la machine peut battre le meilleur des joueurs humains, mais aucun robot ne peut battre un couple homme-machine s’il coopère bien. C’est ce que Kasparov appelle le Centaur : un couple homme-machine qui fonctionne avec le meilleur de chacun. Au tour du RH de devenir Centaur : seule une smart-collaboration entre responsables du capital humain et intelligence artificielle pourra générer une valeur individuelle et collective toujours augmentée.