Comment Schneider Electric passe à l'IA as a Service

Comment Schneider Electric passe à l'IA as a Service La stratégie numérique du géant français des équipements pour l'énergie et automatismes industriels change de dimension avec un lac de données basé sur Azure Databricks.

Pour Schneider Electric, l'année 2022 sera celle de la donnée. L'ambition du groupe ? Passer dans l'ère du Data / IA as a Service. L'enjeu est plus précisément d'ouvrir à ses partenaires l'accès aux informations issues de ses produits : onduleurs, systèmes d'automatisation pour l'industrie, le bâtiment, réseaux électriques… Le tout par le biais d'API combiné à des algorithme d'IA. Pour déployer cette stratégie, le groupe s'est équipé d'une data factory. Un environnement qui permet à ses data engineers, data analysts et data scientists, quel que soit la business unit, de mettre en œuvre leurs cas d'usage. Sans surprise, le cloud retenu est celui de Microsoft. Avec sa couche Azure IoT, il s'agit historiquement de la plateforme sélectionnée par Schneider Electric, pour piloter ses produits connectés et fédérer les données issues de ces derniers.

C'est donc sur Azure que Schneider Electric choisit tout naturellement d'assoir son data lake. Dès 2017, une phase d'incubation est initiée et les premiers projets lancés. Deux cas d'usage sont d'emblée déployés. Le premier porte sur la mise à disposition de data sets par le biais d'EcoStruxure Facility Expert. Cette app mobile de Schneider Electric est développée initialement pour afficher des tableaux de bord et alertes relatives à l'énergie et aux équipements des bâtiments de petite et moyenne taille. Des alarmes qui s'activent en fonction d'indicateurs relevés par les capteurs intégrés aux équipements de Schneider Electric (disjoncteurs, climatisations...).

Cap sur l'économie de la donnée

"Nous nous sommes branchés sur EcoStruxure Facility Expert pour récupérer l'ensemble des séries temporelles relatives à la consommation d'eau, d'électricité, de gaz. Mais aussi pour intégrer toutes les informations liées aux équipements, ainsi qu'à la topologie des bâtiments", explique Herveig Lecuyer, data factory program lead chez Schneider Electric, avant d'ajouter : "Nous avons mis sur pied un pipeline de data transformation pour agréger ces données, les normaliser, les affiner." En bout de course plusieurs data set sont exposée "as a Service" via Schneider Electric Exchange, la marketplace de services numériques du groupe à destination de ses partenaires :

  • Des alarmes sur les équipements (fournis en quasi-temps réel),
  • Des séries chronologiques sur la consommation énergétique des bâtiments (en mode batch),
  • Des métadonnées sur la topologie des sites (en mode batch).

"Parmi les parties prenantes du projet, un partenaire, Socotec (un expert du building information modelling, ndlr) utilise le data set d'arlaming pour localiser, via ses propres modèles, les alertes dans les bâtiments de ses clients. Suite à un défaut sur un disjoncteur relevé par EcoStruxure Facility Expert et remonté via notre pipeline, il pourra par exemple afficher dans sa solution de BIM l'armoire électrique correspondante en rouge, avec à la clé un descriptif du problème en question", détaille Herveig Lecuyer.

Second cas d'usage : la plateforme est utilisée pour préparer un data set alimentant un algorithme de machine learning visant à optimiser la taille des boulettes (ou pellets) de minerai dans le cadre de processus d'extraction. Et ce en fonction d'un certain nombre de variables : quantité d'eau, température... "Nous sommes ainsi capables de livrer des recommandations pour améliorer le process d'extraction", précise Herveig Lecuyer. Le pipeline de transformation est connecté par API à la plateforme d'IoT automation de Schneider (IoT Data Hub) basée sur Azure IoT. C'est ainsi que sont récupérées les données chronologiques des capteurs des systèmes de supervision d'activités minières de Schneider.

Databricks : le cœur du réacteur

En complément d'Azure IoT, Schneider Electric s'adosse à Azure Data Factory pour orchestrer ses pipelines de données. Quant au data lake, il repose sur le service managé Azure Databricks édité et optimisé pour le cloud de Microsoft par la société du même nom. Pour Herveig Lecuyer, certaines applications n'auraient pas pu voir le jour aussi facilement sans cette brique. C'est notamment le cas d'un pipeline combinant des données IoT intégrée en temps réel avec des informations reprises en mode batch en provenance des systèmes internes liés au support. "Ce pipeline permet au final de pousser aux clients des tableaux de bord basé sur PowerBI avec des indicateurs liés à la fois à la maintenance de ses équipements et à l'efficacité de notre service client", souligne Herveig Lecuyer, avant d'insiste : "C'est là la force de Databricks. Son modèle associe data lake et data warehouse. Le premier répondant aux problématiques de temps réel, le second au besoin de reporting plus classique."

"L'objectif est de parvenir à proposer un studio de data science complet"

Partant de là, Schneider Electric décide fin 2021 de passer à la vitesse supérieure et d'industrialiser sa data factory. Objectif : la mettre à disposition de l'ensemble des business unit du groupe en quête d'une plateforme orientée big data et/ou IA, qui soit à la fois adaptée aux besoins des data engineers, data analysts et data scientists.

Dans cette optique, Schneider Electric délivre désormais via sa marketplace des librairies de pipelines et d'algorithmes, des connecteurs sur étagère... "L'objectif est de parvenir à proposer un studio de data science complet basé sur Azure Databricks, avec à la clé des outils d'observabilité, des dispositifs de sécurité qui soient en ligne avec nos standards etc.", égraine Herveig Lecuyer. "Nous commençons à onboarder d'autres équipes." Dans ce cadre, de nouveaux pipelines et algorithmes ont vu le jour. Certains sont notamment centrés sur l'optimisation des recharges de véhicules électriques ou des cycles de production / consommation d'énergie de panneaux photovoltaïques.

Accompagner la croissance du groupe

Une équipe canadienne a depuis rejoint l'aventure. Elle est en charge de l'offre EcoStruxure Power Advisor. Une solution centrée sur le monitoring des équipements et de la qualité de l'énergie des gros bâtiments. "Des pipelines que nous avons co-construits avec eux mettent en musique un modèle qui permet, en fonction des données de consommation, de reconstituer le schéma électrique du bâtiment et de détecter des réglages défaillants", se félicite Herveig Lecuyer. Une information importante pour un exploitant amené à reprendre la gestion d'un site existant peu ou mal documenté.

Pour la suite, Schneider Electric compte sur le nouvel édifice pour enrichir ses offres en data sets et flux de données à destination de ses partenaires, y compris en temps réel. Le projet a directement pour but d'accompagner la croissance du groupe. Et ce, à échéance 2025. "Nous commençons à faire quelques tests de monétisation et de vente de set de données. Ce qui est le cas de l'API de EcoStruxure Facility Expert", précise le data factory program lead de Schneider. En attendant, le nombre d'équipes utilisant l'environnement va aussi être suivi de près. Tout comme les gains d'efficacité que la data factory va permettre de réaliser en matière de processus internes.