"Nous
voulons être les leaders de la concentration européenne
à venir." Renato Soru, le fondateur de Tiscali
déborde toujours d' ambitions et d'énergie et
l'a clamé haut et fort à l'occasion du rachat
de LibertySurf par sa société. Il en aura bien
besoin pour affronter l'année 2001 en France, où
plusieurs défis d'envergure se présentent à
sa société.
Tout
d'abord, avec cette acquisition, Tiscali va se heurter, comme
lors de tout rapprochement, à un sérieux problème
d'intégration des équipes des deux sociétés.
Le fournisseur d'accès français compte 350 salariés
en France et en Europe et il ne va visiblement pas être
simple pour Tiscali d'accorder les violons. Surtout lorsque
l'on sait que LibertySurf a déjà du mal à
régler les problèmes sociaux nés du rachat
de Freesbee en octobre. Antoine Martin l'un des délégués
syndicaux de Freesbee, attendaient d'ailleurs hier, de savoir
exactement ce que voulait faire les dirigeants de Tiscali
avant de se prononcer. Renato Soru a pourtant été
clair en affirmant qu'il "n'y aurait pas trois réceptionnistes
dans le groupe si un seul suffisait". Lors
du rachat de WorldOnline, l'année dernière,
plus de 300 postes avaient été supprimés
en Italie, Suisse et Pays-Bas alors que les bureaux avaient
été purement et simplement fermés à
Francfort pour être déplacés à
Munich.
Avec l'acquisition
de LibertySurf, Tiscali espère déjà économiser
environ 90 millions d'euros, dont 12% proviendront de la production
de contenu et du management, 23% des frais généraux
et 4% des call centers. Et l'affaire pourrait se compliquer
un peu plus en matière d'intégration, sachant
que la société italienne est toujours candidate
à d'autres rachats dans le secteur. En France, Free
est certainement le premier nom sur la liste, d'une part parce
qu'il est le dernier indépendant, d'autre part parce
qu'un éventuel rachat propulserait Tiscali à
la première place des fournisseurs d'accès en
France, si l'on en croit les chiffres communiqués par
l'Italien.
Le deuxième
défi de Tiscali portera sur la téléphonie
mobile et sur les licences de troisième génération.
Dans l'hexagone, Tiscali ne s'est pour l'instant pas glissé
dans un consortium pour décrocher une licence et ne
devrait pas le faire d'ici juin. A moins d'une improbable
alliance avec des sociétés comme Hutchinson,
son partenaire en Italie où elle a décroché
une licence, ou avec ST3G, le consortium formé par
Telefonica, Suez-Lyonnaise des Eaux et Groupe Arnault, l'ancien
co-propriétaire de LibertySurf via Europ@web et désormais
détenteur de 2,6% de Tiscali. Il
semble plus probable que l'Italien se comportera en opérateur
virtuel. Tiscali pourrait ainsi avoir un grand intérêt
à ce que LibertySurf conclut son projet de rachat du
spécialiste des cartes prépayées Intercall
pour se doter d'une porte d'entrée à la téléphonie
mobile en France.
L'autre
interrogation en France concerne la boucle locale radio (BLR).
Suez-Lyonnaise des Eaux et Groupe Arnault ont en effet décroché,
avec Firstmark, leur société commune, une des
deux licences nationales. Or les deux groupes ont toujours
prétendu vouloir faire de LibertySurf, une clé
de voute de leur futur point d'entrée sur Internet.
Les accords seront-ils encore valables avec Tiscali ? Rien
n'est moins sûr.
Enfin,
le dernier défi sera d'unifier éventuellement
la marque Tiscali en France et en Europe. A court terme, LibertySurf
devrait garder sa marque, comme l'a confirmé Renato
Soru hier. Ce qui serait la moindre des choses au regard des
investissements consentis en marketing et communication par
LibertySurf (plus de 38,9 millions d'euros uniquement sur
le premier semestre 2000). Mais à plus longue échéance,
le fondateur de Tiscali a dit et répété
qu'il souhaitait que "les enseignes soient regroupées
sous le même parapluie en Europe". Vaste programme
en perspective...
|