Canalweb
a annoncé hier mercredi son dépôt
de bilan (cf article
du jour). Son fondateur, Jacques
Rosselin, revient sur les derniers soubresauts qu'a
connu la web TV. Il reste persuadé de la pertinence
des programmes vidéo en ligne. Selon lui, ce type
de contenu continue de séduire des acteurs engagés
dans le haut débit : FAI, opérateurs satellites...
L'émission de real TV Sarno 10/18, diffusée
sur Canalweb.net et qui sera mise en ligne dans la journée
de jeudi, sera consacrée aux dernières heures
que vient de vivre la web TV.
JDNet.
Comment
vivez-vous les derniers rebondissements autour de Canalweb
?
Jacques Rosselin. Naturellement mal. Je considère
cette situation comme un échec. Depuis fin juillet,
nous avons cherché des investisseurs qui pouvaient
se substituer à Galileo et à Paribas Affaires
Industrielles par l'intermédiaire de Clinvest.
Nous avons naturellement pris contact avec les grands
groupes français type Lagardère, Vivendi
Universal, France Télécom... Et puis, nous
avons rencontré des acteurs de moindre envergure
comme Europe
Online [NDLR, un opérateur luxembourgeois
de télévision numérique]. Nous
avions signé avec eux un protocole d'investissement
le 31 août. L'accord a été dénoncé
par son conseil d'administration quelques jours plus tard.
Visiblement, deux actionnaires importants s'y opposaient.
Ce sont eux qui ont bloqué la fusion. Ensuite,
nous avons entamé des discussions avec Eutelsat.
Lundi, la direction de l'opérateur satellite nous
a finalement fait savoir qu'elle ne suivrait pas. Je remarque
au passage que les acteurs qui ont porté le plus
d'intérêt à Canalweb proviennent du
monde de la diffusion satellite. Je crois que c'est symptomatique
de ce qui va arriver : les opérateurs satellite
vont être au coeur de la bataille pour la diffusion
broadband de programmes. Les discussions avec Eutelsat
m'ont rappelé les discussions du début des
années 90 autour du développement de la
télévision numérique. Eutelsat avait
suscité la création du bouquet numérique
TPS, qui est son client. Nous travaillons d'ailleurs avec
Eutelsat sur le projet Smartcast pour leur plate-forme
Open-Sky. Mardi, nous avons décidé de déposer
le bilan. La déclaration de cessation de paiement
a été effectuée mercredi matin.
Dans
quelle type de configuration Canalweb pourrait survivre
?
Dans une quinzaine de jours, le tribunal de commerce
de Paris statuera sur le destin de Canalweb. Soit j'arrive
avec un repreneur et un financement minimum, ce qui
me permettra de tenir pendant la période dite
d'observation, d'un mois sans doute. Mais dans ce cas,
la configuration ne sera plus la même, Canalweb
pourra garder 35 personnes [NDLR, soit un tiers de
l'effectif actuel]. Nous garderons les mêmes
activités mais la production de programmes propres
sera réduite au minimum. La préférence
sera accordée à l'agrégation d'émissions
interactives et nous continuerons à faire tourner
les 6 à 7 000 programmes que nous détenons
sur notre site. Nous venions d'ailleurs de signer avec
la chaîne Comédie dans ce sens. Nous devrions
nous recentrer également sur le BtoB. Mais si
je ne présente pas de solution en apportant un
chèque, la liquidation sera prononcée.
La tentation pour un repreneur, c'est de choisir cette
liquidation, qui permet d'écarter les actionnaires
actuels et de se débarasser du passif (2 millions
d'euros soit deux mois d'activités de Canalweb)
mais la procédure est plus hasardeuse. Il reste
également l'option d'un plan de redressement
par cession, une option plus propre au niveau juridique.
Vous
n'avez pas l'impression de suivre les pas de votre modèle
initial américain, Pseudo.com, qui a dû
également se déclarer en faillite ?
Je me suis complètement inspiré de ce
qu'avait créé Josh Harris, fondateur de
la web TV américaine et qui est un vieil ami.
Je m'étais engagé à surmonter les
difficultés qu'il avait rencontrées dans
son aventure. Je pense que Pseudo.com
dépensait trop d'argent par mois (1). Sa plate-forme
technologique n'était pas aussi développée.
De plus, la web TV américaine ne s'était
pas réellement engagée dans le BtoB alors
que Canalweb engrangeait un chiffre d'affaires d'un
million de francs par mois avec ce type de prestations.
Nous avons également un réseau de web
TV locales, TV
Web Régions (2). Le groupe Ouest-France vient
de rejoindre ce projet. Nous avons eu également
une expérience courte de programmes payants (via
le service pour adultes MySexyTV). Nous avons eu une
centaine d'abonnements à 69 francs. En terme
d'abonnement, nous avions fédéré
un tiers d'abonnés et deux tiers d'utilisateurs
avaient opté pour le "pay per minute".
Cela nous a servi de laboratoire de développement.
On peut lancer des initiatives seuls dans notre coin
mais je suis persuadé que l'avenir est dans la
collaboration avec les fournisseur d'accès Internet.
Les internautes paient déjà 300 francs
par mois pour avoir du haut débit. Je pense qu'il
faut que l'on s'inspire des modèles de télévision
numérique. Le contenu doit être compris
dans le fortait Internet mais dans un modèle
qui comprend une rétribution pour le fournisseur
de contenu.
(1) À court de fonds, Pseudo.com n'a
pu trouver de repreneur. La web TV pionnière
américaine a annoncé la fin de ses émissions
en septembre 2000. En février 2001, Pseudo.com
est racheté par INTV,
qui produit des contenus interactifs pour la télévision
numérique pour deux millions de dollars. Le projet
devait repartir en automne. En attendant, le site d'INTV
propose un icône pseudo.com avec une série
d'animations proposées sous forme de clips.
(2) Société détenue
à 80% par cinq grand titres de la PQR : Nouvelle
République du Centre-Ouest, Sud-Ouest, Dépêche du Midi,
Télégramme de Brest, Le Parisien. Le reste du capital
est dans les mains de Canalweb.
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