Le Tribunal de commerce
de Paris a enterré, mardi, les derniers espoirs
de CanalWeb en annonçant la liquidation judiciaire
de l'opérateur de télévision sur
internet. Les juges ont estimé que les offres
des deux repreneurs, Streampower (Groupe Bolloré)
et West Cast (Thalès) étaient insuffisantes
et ne garantiraient pas la pérénité
de l'entreprise, qui était en redressement judiciaire
depuis six mois.
Certains repreneurs potentiels
ont peut-être stratégiquement attendu cette
liquidation. Elle permet, comme le rappelait Jacques
Rosselin, le président de Canal Web, il y a peu,
"d'écarter les actionnaires actuels et de se débarasser
du passif" tout en offrant une possibilité
de récupérer les actifs de l'entreprise
dont certains restent attractifs. La plate-forme de
diffusion de télévision IP, les programmes, les studios
DV ainsi que les participations dans le réseau TVWeb
Régions pourraient ainsi être convoités.
StreamPower et West Cast devraient notamment être
candidats à certaines acquisitions, selon Jacques
Rosselin.
Malgré l'échec
de son projet, qui aura englouti 25 millions d'euros
en deux ans, le père fondateur de CanalWeb est
en effet plus que jamais convaincu de l'avenir de la
télévision par internet. "A côté
d'une télévision hertzienne de masse,
il y a la place pour cette télévision
complémentaire et thématique s'adressant
à un public restreint sur un modèle payant,
avance-t-il, exemple à l'appui. Nous avons sans
doute été nombreux à regarder l'assemblée
générale de Vivendi sur le Web et tout
le monde a trouvé cela normal. Qui aurait prédit
cela il y a encore quelques mois?"
Selon lui, c'est donc surtout
la pénurie de financement et non l'absence de
modèle économique qui aura conduit CanalWeb
dans le fossé. "Il aurait fallu 100 millions
d'euros sur quatre à cinq ans. Mais il était
impossible de convaincre des investisseurs à
l'heure où, même dans les directions générales,
on n'ose plus prononcer le mot Internet de peur de se
faire virer", lâche-t-il, critiquant au passage
les zélateurs de la Télévision
numérique terreste (TNT), qui mobilise à
l'heure actuelle toutes les énergies et surtout
les capitaux. "La TNT est un modèle de masse
sans doute plus difficile à rentabiliser, car
il repose sur la publicité. Et il est quand même
surprenant de tout miser sur une télévision
où aucun décodeur n'est encore disponible.
Alors qu'avec un million de lignes ADSL en France, on
a déjà les fondements d'une future distribution
des programmes à la demande."
Cette télévision
par Internet se fera en tout sans lui, pour l'instant.
Décu par certains capitaux-risqueurs "qui
vous lâchent dès qu'ils voient la Bourse
se fermer", Jacques Rosselin ne compte pas replonger,
même si il estime que le temps lui donnera raison
: "Quand je vois TF1 qui lance deux bouquets ADSL,
ou Club-Internet qui diffuse Lofstory sur le Web, je
me dis que c'est la preuve que derrière la façade,
le modèle gagne lentement du terrain."
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