Depuis les attentats du 11 septembre
2001, le secteur du voyage semble subir les douze plaies
d'Egypte. Après les Twin Towers, il y a eu les
attentats-suicide de Djerba et de Bali puis, cette année,
la guerre en Irak et le SRAS (Syndrome Respiratoire Aigu
Sévère). A chaque fois, les voyagistes ont
été touchés par des événements
qui font l'objet d'une médiatisation maximum. Internet
n'a pas été épargné :
les pertes des e-voyagistes depuis le déclenchement
de la guerre en Irak oscillent généralement
aux alentours des 30 à 40 % de chiffre d'affaires
en moins. "Alors que nous étions sur une croissance
de + 30 % des ventes par rapport à l'année
précédente, à partir du 19 mars (deux
jours après le début du conflit), nous avons
enregistré une chute de 40 % de nos ventes",
estime Carlos Da Silva, PDG de Go Voyages,
spécialiste du vol sec. La chute a été
supérieure à 50 % pour des destinations
comme la Turquie, l'Egypte, l'Asie et les USA, du fait
de l'hostilité actuelle entre la France et les
Etats-Unis."
Marie-Hélène
Brunel, directrice marketing d'AnyWay.com,
confirme cette tendance : "Avant le déclenchement
de la guerre, nous enregistrions + 50 % de
ventes par rapport à 2002. Jusqu'au 1er avril
environ, nos ventes sont restées stables. Sans
doute les gens croyaient-ils que la guerre allait être
rapide. Mais, début avril, ils ont perdu espoir
et la progression séquentielle de notre chiffre
d'affaires est passée de + 50 % à
+ 15 % seulement."
Plusieurs destinations ont
été tout particulièrement touchées,
à commencer par les pays du Moyen-Orient, Egypte
et Turquie en tête. "Nous avons enregistré
une baisse sensible de notre chiffre d'affaires global,
de l'ordre de 30 %, reconnaît Olivier Chanut,
directeur marketing de Promovacances-Karavel.
Mais certains pays ont particulièrement souffert.
Cela a commencé par l'Egypte dès le début
de la guerre. La Turquie est venue ensuite, avec une
chute des ventes de 50-75 % du jour au lendemain. A
partir du moment où les médias ont parlé
des tensions entre la Turquie et les Etats-Unis pour
l'ouverture d'un front nord, il semble que le grand
public ait réalisé que la Turquie était
très proche de l'Irak, ce dont ils n'avaient
sans doute pas conscience auparavant."
Depuis la chute de Bagdad,
la confiance est revenue, mais c'est maintenant le SRAS
qui handicape le secteur. Et de manière encore
plus impactante que la guerre car, dans ce cas, il n'y
a pas une seule zone à risques bien localisée.
Les cas de pneumonies
atypiques n'ont pas seulement sinistré les destinations
asiatiques touchées par la maladie, c'est l'ensemble
des vols long courrier qui est en recul. La globalité
de l'Asie souffre, même les pays qui n'ont enregistré
aucun cas de SRAS. Des destinations comme Bangkok, Bali
ou le Viêt-Nam sont désertées.
"Qantas a diminué
ses capacités de 20 %, Singapore Airlines a supprimé
60 vols quotidiens et Cathay Pacific a indiqué
qu'elle perdait 3 millions de dollars par jour avec
20 % de passagers en moins", indique David
Scowswill, PDG d'Opodo. SI les voyagistes
estiment généralement être peu touchés
par la chute des destinations asiatiques, celles-ci
pesant assez peu dans leur chiffre d'affaires, les "dommages
collatéraux" sur les vols long courrier
impactent malgré tout les activités.
La réaction des
voyagistes à ces événements a été
de trouver des destinations sûres et proches.
C'est l'Europe et les Caraîbes qui bénéficient
de cette situation. Les destinations phares aujourd'hui
sont le bassin méditerranéen (Portugal,
Espagne, Italie, Grèce, Maroc, Tunisie) ainsi
que Cuba, les Antilles et la République Dominicaine.
"Nous avons lancé une catégorie week-end
depuis le 7 avril pour répondre à une
demande croissante dans ce domaine , explique Denis
Philipon, directeur général de
Lastminute-Degriftour-Travelprice France. Cette
nouvelle rubrique était prévue depuis
longtemps mais nous avons accéléré
sa sortie. Le souci, c'est que les tour operators ont
contracté leurs offres et qu'il arrive que nous
soyons incapables de répondre à la demande,
faute de place." Les destinations françaises
connaissent également un essor ainsi que les
locations saisonnières, en forte progression.
Si les e-voyagistes ont
réussi à reporter une partie des ventes
en proposant des destinations de proximité ou
épargnées par les événements,
ils n'ont pas encore atteint les niveaux d'avant la
guerre en Irak. Et le SRAS pourrait bien avoir une influence
sur les vacances d'été, car le grand public
réfléchit dès à présent
à ses destinations estivales. Pour y remédier,
certains ont choisi de baisser les prix de quelques
destinations mal-aimées. "British Airways
a récemment annoncé qu'il avait baissé
de 60 % les prix de 1,5 million de billets afin de relancer
les réservations après la guerre en Irak.
On peut logiquement penser que d'autres compagnies vont
faire de même", avance David Scowswill (Opodo).
Certains voyagistes n'ont pas hésité à
casser les prix (week-end à Istanbul pour 99
euros sur Promovacances), mais la parade a des limites.
La peur est plus forte que tout pour les destinations
asiatiques, dont le marché a globalement chûté
de 50 à 60 %.
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