INTERVIEW 
 
Jérémie Clévy
Directeur général Portail
Lycos France
Jérémie Clévy
"Lycos Europe atteindra l'équilibre financier en 2006"
Lycos France a annoncé la semaine dernière la nomination d'un nouveau directeur général pour sa division Portail : Jérémie Clévy, un ancien d'AOL. L'occasion de faire le point avec ce dernier sur la stratégie du portail, son positionnement et ses projets.
(19/09/2006)
 
JDN. Dans quel contexte prenez-vous vos fonctions ?
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 Lycos France
Dossier Web 2.0
Jérémie Clévy. L'ancien directeur général, dont le profil était plus marketing, est parti pour de nouveaux horizons. Lycos a souhaité recruter, pour le remplacer, une personne ayant un profil éditorial, comme c'est le cas chez Lycos en Grande-Bretagne, car la société a l'intention de remettre l'accent sur le produit.

Dans quel état récupérez-vous Lycos France ?
Lycos va plutôt bien ! Evidemment, il y a eu un plan social l'année dernière, qui s'est terminé en décembre 2005 et dans le cadre duquel 80 personnes sont parties. Mais en fait, un grand nombre de postes ont simplement été délocalisés au siège de Bertelsmann, à Gütersloh. C'est notamment le cas des fonctions de modération et de développement des chats, de l'hébergement et du mail. Au final, il n'y a eu que cinq suppressions de postes réelles. Lycos France compte aujourd'hui 35 collaborateurs En termes d'audience, le réseau Lycos était onzième du panel Nielsen NetRatings au mois d'août, soit une progression de 11 % sur un mois. Le réseau a totalisé 5,5 millions de visiteurs uniques en août, 6 millions en mai. Notre ambition est de se placer et de rester dans le top 10 des sites à plus forte audience. En ce qui concerne notre régie, elle se classe cinquième en France.

Et en termes de résultats financiers ? En 2005, l'heure était à la réduction des coûts, dans l'objectif de parvenir à la rentabilité en 2006. L'objectif sera-t-il atteint ?
Nous ne communiquons pas les chiffres de la filiale française, mais je peux vous donner les résultats de Lycos Europe. Au premier semestre 2006, le chiffre d'affaires s'élève à 64,1 millions d'euros, en hausse de 4 % sur un an, pour un Ebitda positif de 0,9 million d'euros, en croissance de 109 % par rapport au premier semestre 2005. Les trois premiers mois du second semestre suivent la même tendance, donc, normalement, Lycos Europe sera à l'équilibre en 2006.

Comment décririez-vous le positionnement actuel de Lycos ?
Le site cible une population jeune. Nous voulons le portail très communautaire et viral, ce qu'il n'est pas encore assez selon nous. Nous allons donc mettre l'accent là-dessus.

Un positionnement très… web 2.0 ?
Oui, en tous cas dans la lignée de l'évolution de la société. Les Français avaient tendance à rester dans leur coin, il y avait comme un égoïsme rampant. Aujourd'hui, il y a un mouvement vers la rencontre. Mais nous n'allons pas faire du Web 2.0 à outrance, avec des nouveaux produits tous en version bêta, tous en Ajax, etc.

Pouvez-vous apporter quelques précisions quant à votre stratégie de croissance ? Est-elle la même pour tous les portails Lycos européens ?
Nous voulons être un acteur majeur du Web 2.0."
Bien sûr, la France et l'Allemagne ne vont pas suivre tout à fait la même stratégie que les Pays-Bas, marché sur lequel Lycos est moins puissant. Cependant, la stratégie est globalement équivalente d'un pays à l'autre. Nous voulons être un acteur majeur du Web 2.0, en misant pour l'année qui vient sur les forums, les rencontres, le fun, le viral, le communautaire, les choses légères… Le premier axe de développement, pour nous, c'est l'audience. Nous allons également refaire un certain nombre de produits, dans la logique d'une plus grande communication, du partage et du communautaire. Nous sommes encore, aujourd'hui, un peut trop dans une logique média. Il faut que les internautes utilisent le site pour eux-mêmes. A ce titre, mon modèle est eBay. Sans ses vendeurs, le site n'est rien.

Comment se place Lycos, exactement, sur ses différents marchés européens ?
Lycos est le portail numéro 1 au Danemark, en termes d'audience. Nous sommes très bien placés en France et en Allemagne, les deux pays phares en termes de contribution globale. Nous faisons partie des challengers en Grande-Bretagne, et sommes plus petits en Italie, en Espagne et aux Pays-Bas. En Suède, la position de Spray est comparable à celle de Lycos en France et en Allemagne. Au niveau européen, le réseau de sites Lycos doit être troisième ou quatrième, avec entre 25 et 28 millions de visiteurs uniques par mois.

Quelles activités regroupe Lycos France, aujourd'hui ? Quelle est leur part dans les revenus de la société ?
Les services premium et les comparateurs de prix représentent la plus grande partie du chiffre d'affaires."
Il y a quatre grandes activités. Le portail classique avec les contenus ; les produits tels que le mail, les pages perso, les blogs, le chat, etc. ; l'hébergement, pour les particuliers et les professionnels, qui s'adresse notamment aux TPE, et qui nous permet de capter 8 % du marché européen de l'hébergement ; enfin, la régie. En termes d'organisation, le pôle régie est rattaché à un deuxième directeur général, qui est Fabrice Leclerc. Nous avons trois sources de revenus : la publicité représente 30,2 % du chiffre d'affaires, en Europe, les services premium et les comparateurs de prix 40,8 %, et l'accès Internet 28,8 %. Lycos possède en effet une activité de fournisseur d'accès en Allemagne et en Suède, mais un développement sur ce marché n'est pas à l'ordre du jour en France. Je suis bien placé pour savoir que c'est un marché très difficile et concurrentiel.

Vous avez lancé plusieurs services ces derniers mois. Pouvez-vous résumer les lancements de 2006 ?
Nous avons lancé la plate-forme de blogs, une nouvelle solution de chat dont nous sommes assez fiers - en moyenne, en soirée, 6.700 internautes sont connectés simultanément en France -, le Sexy Like Us - qui permet de noter les photos postées par les internautes -, l'hébergement des noms de domaine en .EU - grâce à la pré-réservation, nous avons capté 60 % des dépôts de noms de domaine en .EU durant les premiers jours suivant l'ouverture -, le moteur de recherche humain Lycos IQ, sur lequel nous essayons de privilégier les vraies questions et non pas les avis. C'est avec ce dernier lancement que nous avons vraiment pris le virage du Web 2.0. Il y a eu d'autres nouveautés, cette année, comme la refonte ergonomique de Caramail en juin. Une refonte plus globale devrait avoir lieu dans les mois qui viennent.

Votre sphère de concurrence, ce sont toujours les portails ?
Oui, Yahoo, MSN, AOL, les portails des FAI… Mais nous avons notre spécificité par rapport à tous ces sites. Nous ne visons pas l'exhaustivité d'un Yahoo, ou les contenus autoproduits d'un AOL. Les gens viennent chez nous pour nos produits et pour l'aspect communautaire.

A ce propos, Multimania existe toujours. Comment expliquez-vous que les pages perso aient survécu aux blogs ?
Multimania marche encore très fort."
Multimania marche encore très fort, même. Une grosse partie de notre audience vient de là. Les pages perso sont complémentaires aux blogs, elles ne répondent pas aux mêmes besoins. Leur durée de vie est un peu plus longue, leur mise à jour peut être moins régulière, et il y a encore beaucoup de gens qui sont réticents vis-à-vis des blogs.

Avez-vous mené, récemment, une enquête pour savoir comment vos utilisateurs percevaient la marque Lycos ? N'est-ce pas grâce à la force de la marque, pourtant construite rapidement, que le site a survécu à la bulle ? Quelles sont ses valeurs ?
Nous avons mené une enquête de satisfaction quand je suis arrivé, et les notes étaient de 7 ou 8 sur 10 sur la plupart des items. Les utilisateurs sont donc majoritairement satisfaits. Ce qui a sauvé Lycos, c'est la fidélité des internautes. 34 % des utilisateurs du portail nous suivent depuis plus de cinq ans. Notre marque la plus forte, en France, est Caramail. Quant aux valeurs de la marque Lycos, je crois qu'elles sont bien résumées dans notre signature, Meet you there.

Quelles ont été les années les plus difficiles, pour Lycos ?
Celles des fusions acquisitions, en 2001-2002, quand l'entreprise a rassemblé des gens de culture et de passé différents. Les messageries internes, qui n'étaient pas encore unifiées, symbolisaient la frontière qui existait alors entre les collaborateurs.

Contrairement à d'autres activités dont il s'est départi, le groupe Bertelsmann est encore présent dans Lycos. Comment se répartit l'actionnariat ? Bertelsmann souhaite-t-il conserver ses parts à long terme ?
Bertelsmann ne compte pas se désengager de Lycos."
Bertelsmann est actionnaire à hauteur de 20 %. Christophe Mohn, CEO de Lycos Europe et membre de la famille qui est aux commandes de Bertelsmann, détient 10 % de la société en son nom propre. Holding Corporation (Telefonica) détient 32 % des parts, et le capital flottant représente environ 35 %. Pas mal de rapprochements sont actuellement en train de se produire au niveau du groupe Bertelsmann. De nouveaux produits sont dans les cartons, chez Lycos, et mobilisent beaucoup de ressources. Leur stratégie n'est pas de se désengager.

Quels sont ces projets dont vous parlez ?
De manière générale, les prochains lancements vont beaucoup plus tourner le site vers ses utilisateurs. Nous allons également ressortir un certain nombre de produits phares, très performants. Nous étudions par ailleurs des refontes plus ergonomiques.

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Du fait de ces projets, allez-vous reprendre la parole dans les médias ? Tout au long de l'année, comment communiquez-vous ?
Nous reprendrons la parole au moment des sorties des nouveaux produits. Autrement, nous communiquons via notre programme d'affiliation, qui fonctionne très bien. Nous étudions d'ailleurs la piste de l'affiliation pour les sous-produits de Lycos. A plus long terme, nous réfléchissons aussi à l'organisation d'événements. Nous menons par ailleurs d'importantes actions de fidélisation.
 
 
Propos recueillis par Raphaële KARAYAN, JDN

PARCOURS
 
 
Jérémie Clévy, 34 ans, est directeur général Portail de Lycos France, aux côtés de Fabrice Leclerc, directeur général Régie.

Avant de rejoindre Lycos France, Jérémie Clévy a occupé le poste de responsable du développement éditorial chez AOL durant 7 ans. Il a également été responsable Europe des sites Internet chez Eurosport.

Ancien élève de l'Ecole Supérieure de Journalisme de Lille, Jérémie Clévy possède une forte expérience de la radio, acquise notamment à RFI et à la BBC.

   
 
 
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