INTERVIEW 
 
David Lawee
Vice president Marketing
Google
David Lawee
"Notre objectif : simplifier encore et encore nos produits"
Le directeur marketing monde de Google s'explique sur la politique de lancement de produits, les défis à relever, la stratégie de partenariats et les priorités de la société pour la France et l'Europe.
(19/01/2007)
 
JDN. En tant que vice president marketing, quelles sont vos responsabilités chez Google ?
David Lawee. Je suis directeur marketing, pour toutes les activités de Google au niveau mondial, tant en BtoC qu'en BtoB. Ce qui inclut le marketing produit, l'animation commerciale, le marketing corporate, les études de marché, etc., pour la cinquantaine de produits proposés par Google. Dans tous ces domaines, je suis chargé de mettre en œuvre la politique d'innovation de Google.

A quoi ressemble votre journée type ?
J'essaie justement d'en changer la physionomie ! A l'heure actuelle, je passe 11 heures en réunion, et 5 heures à répondre aux 300 mails que je reçois chaque jour ! Comme je travaille avec les filiales du monde entier - nous avons plus de 20 bureaux hors Etats-Unis -, j'essaie de faire des liens le plus systématiquement possible entre les problématiques rencontrées dans les différents pays. Si je travaille sur une stratégie globale de mise en avant de Gmail, par exemple, qui est un produit clé pour nous, et qu'ensuite je me penche avec mes équipes sur les moyens à mettre en œuvre pour amener les 25 millions de nouveaux internautes attendus en Inde cette année à utiliser nos produits, à la fin de la journée je fais la connexion entre toutes ces réflexions pour que chaque action réalisée dans un coin du monde bénéficie à tous les produits et à tous les pays couverts par Google. Ce qui est fascinant.

Quelle est la tâche la plus difficile, à votre niveau ?
Résoudre ce qui est insoluble. Parfois, les connexions dont je parlais sont difficiles à établir. Il faut aussi garder la trace, et surtout savoir exploiter toutes les données disponibles dans l'entreprise, et croyez moi il y en a beaucoup. Mais c'est cela qui est passionnant.

Pouvez-vous nous donner un échantillon des problèmes que Google doit résoudre, aujourd'hui ?
Par exemple, comment faire pour que notre programme publicitaire intègre justement encore mieux toutes les données dont nous disposons, pour les mettre au service de nos clients ; comment prouver aux annonceurs l'efficacité d'un mix multimédia, incluant par exemple la télévision et le Web ; et notre objectif principal, bien sûr : simplifier encore et encore nos produits.

En France, l'offre publicitaire est notre priorité."
Sur quels produits mettez-vous l'accent à l'heure actuelle, en termes d'efforts marketing ?
Nous travaillons tous nos produits simultanément, car ils sont toujours en évolution. Ce qui est une spécificité de l'Internet. Au-delà de ça, les priorités dépendent des pays. Aux Etats-Unis, en ce moment, nous travaillons beaucoup sur Google Checkout, notre système de paiement électronique. En Europe, ce sont les outils cartographiques qui nous occupent énormément. De nombreuses nouveautés vont d'ailleurs bientôt voir le jour dans ce domaine. En France, nous peaufinons notre offre publicitaire. Et en Russie, où nous venons de nous implanter, nous nous concentrons encore sur la recherche.

Le marketing à la mode Google, c'est : pas de publicité ou presque, pas de prix à fixer puisque tout est gratuit quand les prix ne sont pas fixés par les clients eux-mêmes, pas de cahier des charges pour des produits qui sortent en version bêta et sont en perpétuelle évolution… Quels sont vos leviers ?
Nous pratiquons beaucoup le co-marketing, les partenariats… Nos actions vont toujours dans le sens d'une stratégie gagnant-gagnant, car nous ne faisons que donner les moyens technologiques à nos clients de se créer de nouvelles opportunités commerciales, de réaliser des campagnes innovantes, de monétiser leurs services… Cette collaboration leur est profitable autant qu'elle l'est pour nous. Par exemple, lorsque nous concluons un accord avec Dell pour intégrer la barre d'outils Google sur leurs PC, nous y gagnons tous les deux. C'est cela notre principal levier marketing : faire en sorte que les gens essaient nos produits et qu'ils en parlent.

Lancer un maximum de produits, puis traiter le feedback des consommateurs"
Google pratique-t-il un marketing de l'offre ou de la demande ?
Sur notre marché, nous avons tout intérêt à lancer des produits et à observer comment ils se comportent, dans la mesure où nous pouvons faire des ajustements en continu. Car le coût de lancement d'un nouveau produit n'est pas énorme. Nous préférons donc lancer un maximum de produits, et ensuite traiter le feedback des consommateurs, pour aboutir à une version finale correspondant à leurs attentes. Si nous pouvions en lancer plus, nous le ferions. Cela correspond à l'esprit d'entreprise qui caractérise Google et ses collaborateurs.

Combien de produits ont été abandonnés après avoir été lancés ?
Probablement un tout petit nombre. Sur Internet, en une semaine vous savez pratiquement si un produit est bon ou mauvais. Et s'il est mauvais, vous le modifiez jusqu'à ce qu'il devienne bon !

Comment décririez-vous Google en une phrase ? On ne peut plus dire que vous êtes un moteur de recherche, vous ne vous définissez pas comme un média…
Tout ce que nous faisons est en cohérence avec notre mission : aider à organiser l'information et la rendre accessible et utile à tous. Le but de Google, c'est de masquer une complexité technologique inouïe derrière des applications extrêmement simples à utiliser. Prenons un exemple : lorsque Michael Jordan fait un dunk, soit vous prenez le parti de voir ce geste dans son ensemble, et de vous contenter de le trouver beau ; mais vous pouvez aussi décortiquer cet ensemble en une multitude de gestes techniques et de prouesses toutes plus difficiles à réaliser les unes que les autres. Google, c'est comme un dunk de Jordan.

Google, c'est comme un dunk de Michael Jordan."
Comment pensez-vous que vos utilisateurs perçoivent la marque Google ?
Certainement différemment d'un pays à l'autre. Par exemple, en Europe, nous avons été plus rapides que la majorité de nos concurrents à nous implanter, et avons traduit très tôt nos outils dans les différentes langues. Par conséquent nous nous sommes vite installés dans les usages et faisons en quelque sorte partie des meubles ! Au Japon, en revanche, nous sommes parmi les derniers entrants et avons plus l'image d'une marque de technophiles. Mais nous pensons qu'il vaut de toute façon mieux s'adresser aux technophiles, car l'ordre des choses fait que tous les utilisateurs gagnent en expérience au fur et à mesure.

Quels sont vos principaux projets pour 2007 ?
Il y en a beaucoup ! Si je dois me limiter à trois, je dirais : étendre la couverture de nos produits cartographiques au monde entier, en améliorer la résolution, augmenter les bases de données de recherche locale associées aux cartes, y ajouter du contenu généré par les utilisateurs ; investir dans Google Checkout ; et réussir à rendre Adwords et Adsense plus simples d'utilisation, tout en accroissant leur sophistication.

Vous avez notamment fondé une entreprise de capital-risque. Aujourd'hui, dans quelle entreprise qui n'existe pas encore aimeriez-vous investir ?
  Les sites
Google Checkout
Google Maps
Je ne peux pas prédire le futur, et c'est aussi la philosophie de Google. Tout ce que je peux dire, c'est que pour réussir, il faut essayer un maximum de choses. Pour les VC, cela signifie se construire tout un portefeuille de participations. Mais aujourd'hui, aucun portefeuille d'activités n'arrive au niveau de celui de Google.
 
 
Propos recueillis par Raphaële KARAYAN, JDN

PARCOURS
 
 
David Lawee, recruté initialement par Google au poste de directeur corporate development, exerce actuellement les fonctions de vice president marketing. Il a sous sa responsabilité l'ensemble des activités marketing de Google, où il coordonne toutes les zones régionales du département marketing : Europe occidentale, Europe de l'Est, Afrique, Asie-Pacifique et Amérique Latine.

Auparavant, David Lawee a co-fondé Xfire, une communauté dédiée au jeu en ligne pour laquelle il s'est occupé pendant deux ans du développement produit, du marketing et de l'international, avant de revendre la société à Viacom début 2006.

Il a également participé à la création de trois autres start-up, parmi lesquelles Mosaic Venture Partners (capital-risque).

Diplômé en droit de McGill University, en philosophie de University of Western Ontario et titulaire d'un MBA de l'Université de Chicago, David Lawee a débuté sa carrière comme consultant chez McKinsey & Company.

  
 
 
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