INTERVIEW
 
Président Directeur Général
Canal Numedia
Philippe Bismut
"Titre"
Canal Numedia fait partie du pôle contenu de VivendiNet, la joint-venture Internet (50/50) de Vivendi et du groupe Canal Plus. Considéré comme le pôle "business images" lié aux nouvelles technologies, elle propose ses contenus sur de multiples supports : PC, téléphone portable (et donc le projet Vizzavi) et télévision Interactive. Canal Numedia vient d'annoncer un plan de lancement de sites internationaux (Suède, Belgique, Pays-Bas, Pologne). Avec le rapprochement Vivendi-Seagram, Canal Numedia bouillonne d'idées qui restent à concrétiser. 05 septembre 2000
 
          

JDNet. Dans quel contexte est survenue votre nomination à la présidence de CanalNumedia?
Philippe Bismut. Mon arrivée à ce poste, survenue fin juin, est concomitante avec un grand projet dans le groupe Vivendi qui est le rapprochement
Vivendi-Canal Plus-Seagram. Je crois savoir que mon précédecesseur, Alex Berger, avait un grand background dans le monde du cinéma et d'Hollywood. Je pense qu'il avait envie de se rapprocher de Pierre Lescure pour s'investir davantage dans ce projet. De mon côté, je ne viens pas du tout du monde du multimédia mais plutôt de l'informatique et du secteur "high tech". J'ai beaucoup d'expérience de développement de solutions e-business.

Pourquoi Canal Plus a-t-il recruté un manager extérieur pour ce poste alors que le groupe pouvait trouver des compétences en interne ?

Pierre Lescure m'a explique que dans sa vision stratégique, il voulait mixer un maximum de cultures différentes. Nous sommes en train d'aborder un cadre de plus en plus complexe avec des défis technologiques et une diversification des activités. Je crois qu'il appelle ça "avoir les saltimbanques, les managers et les technocrates"! Je ne suis pas une exception. Il y a également un ancien directeur financier de Cap Gemini qui vient de rejoindre le groupe.

Quels sont les répercussions que l'on peut attendre sur les activités de Canal Numedia après le rapprochement Vivendi- Canal Plus - Seagram ?
Dans tous les cas, c'est une excellente nouvelle. Il faut rappeler que le rapprochement est encoree en train de se faire, mais c'est une excellente perspective pour nous. Canal Numedia est le porte-avion ou la tête chercheuse Internet du pôle "business images" du nouvel ensemble Vivendi-Universal. Cette filiale a été créée pour assurer la présence des chaînes du groupe sur Internet et, plus largement, de son cinéma sur Internet. Avec le rapprochement de Universal, nous avons un espace de manoeuvre encore plus grand. Il ne faut pas oublier qu'il existe des studios Canal Plus. Universal se trouve dans la même problématique que nous, mais à plus grande échelle. Nos homologues américains ont bien sûr développé une structure de leur côté du type Canal Numedia qui travaille pour Universal Pictures, pour les chaînes de télévision et leurs parcs à thème. Nous allons pourvoir échanger du contenu, lancer des produits complémentaires, attaquer des marchés en commun et élargir notre champ d'action.

Concrètement, vous êtes dorévanant un grand producteur de contenu audiovisuel. Comment
allez-vous adapter cette offre sur Internet ?

Le closing n'est pas encore acté. Il existe encore beaucoup d'obstacles réglementaires. Par exemple devant la Commission de Bruxelles. Ca devrait prendre encore quelques mois. Mais ça n'empêche pas de commencer à nous connaître et d'imaginer des scénarios. Nous avons une approche pragmatique : nous cherchons pour le moment à mettre à plat les compétences des uns et des autres, les actifs, les produits, les services, les moyens technologiques tout en voyant les économies d'échelle qu'il est possible de réaliser. Universal est plutôt structuré par type de média : Picture, TV, Studio, Parc à thèmes. Chaque branche a son activité Internet avec un pot en commun dans Universal Online.

Vous avez déjà personnellement rencontré vos homologues américains de Universal ?
J'ai passé une semaine à Los Angeles. Cette semaine, des représentants de Universal sont au Festival de Deauville.

A l'occasion de la 21ème Université d'été de la communication à Hourtin fin août, vous avez présenté la stratégie Internet du groupe Canal Plus à l'international. Le plan est-il aussi ambitieux que pour les sites développés en France ?
Ce sont exactement les mêmes modèles et les mêmes ambitions. On parle de Canal Plus mais aussi pour toutes les chaînes du groupe. Partout où le groupe Canal Plus dispose d'une chaîne, Canal Numedia va chercher à accroître sa présence sur Internet. Les objectifs varient naturellement en fonction de la position de la chaîne dans chaque pays. Par exemple, en France, le site de Canal Plus n'est pas destiné à acquérir de la notoriété. Il sert de service complémentaire aux cinq millions d'abonnés de la chaîne mais aussi à draîner une nouvelle audience. Lorsque l'on est en Scandinavie, le cas est très différent : la notoriété est moindre, la part de marché également. Là, il y a vraiment une idée de conquête d'audience et de constitution d'une base de données clients. Canal Plus est diffusée en Scandinavie via des bouquets numériques ou des câblo-opérateurs et nous n'avons pas forcément beaucoup de renseignements aux sujets de nos clients.

C'est une stratégie d'approche "pays par pays" ou de synergie globale ?
Chaque entité locale est responsable de la diffusion du contenu. Mais il existe une structure internationale qui propose du contenu mutualisé pour l'ensemble des sites. Pour l'international, cela représente un investissement de 40 millions de francs jusqu'à Noël. Il existe au sein de Canal Numedia une direction internationale et une direction de contenus internationaux.

Quels sont les nouveautés prévus pour le site de CanalPlus.fr pour la rentrée ?
Nous sommes actuellement dans un projet important de refonte du site. L'infrastructure et le concept du site date de quatre ou cinq ans. Nous avons pu y prendre des positions mais il faut changer d'échelle. Nous partons sur une nouvelle plate-forme qui va permettre de draîner une autre audience. Nous allons lancer une nouvelle grille de programmation Web, tout comme cela a été effectué pour les émissions de Canal Plus. Nous devrions présenter la nouvelle formule mi-octobre. Toutefois, la ligne éditoriale ne change pas.

Quels sont vos objectifs d'audience avec cette refonte ?
Nous voulons doubler notre audience. Nous étions à 10 millions de pages vues au mois de juin et deux millions de visites.

Avez-vous une idée exacte du nombre d'abonnés Canal Plus qui dispose d'un accès Internet ?

C'est un peu plus supérieur à la moyenne nationale. L'ordre de grandeur tourne autour de 30%. Si on regarde l'audience du site, elle se divise en deux moitiés équivalentes : les abonnés de la chaîne et les autres internautes.

Peut-on connaître votre capacité d'investissement pour Canal Numedia globalement ?

Nous ne communiquons pas ce chiffre, mais disons que l'ensemble de l'effectif va passer de 170 à 250 personnes d'ici la fin de l'année et je ne compte pas la partie AlloCiné.

En dehors du site Canal Plus, quels sites vont connaître un fort développement ?

Entre l'automne et Noël, nous allons développer le contenu des sites d' i-télévision, ouvert depuis peu, et, pour la chaîne d'emploi Demain, nous misons sur un développement stratégique qui va préfigurer la "video on demand" sur les chaînes télé mais également sur Internet. Nous préparons également un nouveau décodeur numérique pour Canal Satellite avec un accès à Internet. Il y aura une batterie de programmes électroniques pour le téléspectateur devant sa télé avec parallèlement un miroir Web. Canal Numedia dispose d'une trentaine de sites. Nous avons également lancé des sites autour du football.

Quel chiffre d'affaires comptez-vous tirer du Web cette année ?
Nous ne donnons aucun chiffre mais c'est la première fois que le montant sera significatif. Nous tirons naturellement une grande partie des recettes de la publicité mais nous croyons également à la vente de contenu. Des grands acteurs du type portails généralistes vont être intéressés par ce type de produits licenciés. C'est un axe fort de notre développement international. Pour le e-commerce, ça démarre.

On parle souvent de l'introduction en Bourse des activités de Canal Numedia ? Où en est le projet ?
A court terme, personne ne travaille sur ce dossier. Si c'était le cas, cela pourait faciliter l'introduction de nouveaux partenaires pour initier un nouveau projet.

TF1 a indiqué vouloir développer un accès haut débit. Quid de Canal Plus ?
TF1 se trouve dans une situation différente puisqu'il est adossé à un opérateur télécom. Jusqu'à présent, nous avons estimé qu'il n'était pas urgent de développer un tel service. Il est vrai que nous nous intéressons à des acteurs diffuseurs tels que Microsoft ou Real Network mais, en terme d'Internet provider, nous restons pour le moment dans un monde ouvert.

Le groupe Canal Plus est-il toujours à l'affût de prises de participation sur des projets Internet, comme ce fût le cas pour la tentative avortée du rapprochement avec Sportal ?
Oui, absolument. Canal Plus est à la recherche d'acquisition intelligente, qui pourrait conforter notre position de site de divertissement et particulièrement dans le sport. Ca peut être varié. Nous avons récemment finalisé l'acquisition de Cinestore. Je n'ai pas vécu l'épisode Sportal mais c'est un révélateur. Même si le produit est très respectable, il faut tout de même que les montants soient abordables. Cela nous a rappelé que nous avions peut-être au sein de notre groupe des moyens et des compétences, qui nécessiteraient un investissement un peu plus modeste.

Avec qui vous sentez-vous le plus en concurrence sur Internet ?
Clairement, nous ne sommes pas en concurrence avec une chaîne généraliste qui se met sur le Web. Le contenu que l'on produit n'a rien à voir avec ce que fait TF1 ou M6. Globalement, je peux même dire que le monde des médias français se débrouille pas mal sur le Web. On a vu pire outre-Atlantique. Nous soignons notre stratégie de différenciation qui repose sur quelques thèmes forts : sport, cinéma et tout ce qui touche la "Web generation".

Vous regardez souvent les vidéos en ligne. Vous trouvez ça confortable ?
Si je veux voir un match de foot ou le film Gladiator, je n'irai pas devant mon PC. En revanche, pour voir des clips ou des accroches, le confort est acceptable.
 
Propos recueillis par Philippe Guerrier

PARCOURS
 
Philippe Bismut, 44 ans, ancien élève de l'Ecole Polytechnique et diplômé du Corps National des Mines, a réalisé un parcours plutôt marqué dans le monde de la télécommunication et de l'informatique. Nommé PDG de Logica SA, société de consulting et d'intégration de systèmes, en janvier 1999, Philippe Bismut a mené plusieurs projets techniques autour de l'Internet pour le compte de grands groupes. Auparavant, il a passé deux ans dans le groupe EDS France comme directeur général de la Division Communication et Energie.

   
 
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