JDNet.
Dans quel contexte est survenue votre nomination à
la présidence de CanalNumedia?
Philippe Bismut.
Mon arrivée à ce
poste, survenue fin juin, est concomitante avec un grand projet
dans le groupe Vivendi qui est le rapprochement
Vivendi-Canal Plus-Seagram. Je crois savoir que mon précédecesseur,
Alex Berger, avait un grand background dans le monde du cinéma
et d'Hollywood. Je pense qu'il avait envie de se rapprocher
de Pierre Lescure pour s'investir davantage dans ce projet.
De mon côté, je ne viens pas du tout du monde
du multimédia mais plutôt de l'informatique et
du secteur "high tech". J'ai beaucoup d'expérience
de développement de solutions e-business.
Pourquoi
Canal Plus a-t-il recruté un manager extérieur
pour ce poste alors que le groupe pouvait trouver des compétences
en interne ?
Pierre
Lescure m'a explique que dans sa vision stratégique,
il voulait mixer un maximum de cultures différentes.
Nous sommes en train d'aborder un cadre de plus en plus complexe
avec des défis technologiques et une diversification
des activités. Je crois qu'il appelle ça "avoir
les saltimbanques, les managers et les technocrates"!
Je ne suis pas une exception. Il y a également un ancien
directeur financier de Cap Gemini qui vient de rejoindre le
groupe.
Quels sont
les répercussions que l'on peut attendre sur les activités
de Canal Numedia après le rapprochement Vivendi- Canal
Plus - Seagram ?
Dans
tous les cas, c'est une excellente nouvelle. Il faut rappeler
que le rapprochement est encoree en train de se faire, mais
c'est une excellente perspective pour nous. Canal Numedia
est le porte-avion ou la tête chercheuse Internet du
pôle "business images" du nouvel ensemble
Vivendi-Universal. Cette filiale a été créée
pour assurer la présence des chaînes du groupe
sur Internet et, plus largement, de son cinéma sur
Internet. Avec le rapprochement de Universal, nous avons un
espace de manoeuvre encore plus grand. Il ne faut pas oublier
qu'il existe des studios Canal Plus. Universal se trouve dans
la même problématique que nous, mais à
plus grande échelle. Nos homologues américains
ont bien sûr développé une structure de
leur côté du type Canal Numedia qui travaille
pour Universal Pictures, pour les chaînes de télévision
et leurs parcs à thème. Nous allons pourvoir
échanger du contenu, lancer des produits complémentaires,
attaquer des marchés en commun et élargir notre
champ d'action.
Concrètement, vous êtes dorévanant un
grand producteur de contenu audiovisuel. Comment
allez-vous adapter cette offre sur Internet ?
Le
closing n'est pas encore acté. Il existe encore beaucoup
d'obstacles réglementaires. Par exemple devant la Commission
de Bruxelles. Ca devrait prendre encore quelques mois. Mais
ça n'empêche pas de commencer à nous connaître
et d'imaginer des scénarios. Nous avons une approche
pragmatique : nous cherchons pour le moment à mettre
à plat les compétences des uns et des autres,
les actifs, les produits, les services, les moyens technologiques
tout en voyant les économies d'échelle qu'il
est possible de réaliser. Universal est plutôt
structuré par type de média : Picture, TV, Studio,
Parc à thèmes. Chaque branche a son activité
Internet avec un pot en commun dans Universal Online.
Vous avez
déjà personnellement rencontré vos homologues
américains de Universal ?
J'ai
passé une semaine à Los Angeles. Cette semaine,
des représentants de Universal sont au Festival de
Deauville.
A l'occasion
de la 21ème Université d'été de la communication à Hourtin
fin août, vous avez présenté la stratégie
Internet du groupe Canal Plus à l'international. Le
plan est-il aussi ambitieux que pour les sites développés
en France ?
Ce
sont exactement les mêmes modèles et les mêmes
ambitions. On parle de Canal Plus mais aussi pour toutes les
chaînes du groupe. Partout où le groupe Canal
Plus dispose d'une chaîne, Canal Numedia va chercher
à accroître sa présence sur Internet.
Les objectifs varient naturellement en fonction de la position
de la chaîne dans chaque pays. Par exemple, en France,
le site de Canal Plus n'est pas destiné à acquérir
de la notoriété. Il sert de service complémentaire
aux cinq millions d'abonnés de la chaîne mais
aussi à draîner une nouvelle audience. Lorsque
l'on est en Scandinavie, le cas est très différent
: la notoriété est moindre, la part de marché
également. Là, il y a vraiment une idée
de conquête d'audience et de constitution d'une base
de données clients. Canal Plus est diffusée
en Scandinavie via des bouquets numériques ou des câblo-opérateurs
et nous n'avons pas forcément beaucoup de renseignements
aux sujets de nos clients.
C'est
une stratégie d'approche "pays par pays"
ou de synergie globale ?
Chaque
entité locale est responsable de la diffusion du contenu.
Mais il existe une structure internationale qui propose du
contenu mutualisé pour l'ensemble des sites. Pour l'international,
cela représente un investissement de 40 millions de
francs jusqu'à Noël. Il existe au sein de Canal
Numedia une direction internationale et une direction de contenus
internationaux.
Quels sont
les nouveautés prévus pour le site de CanalPlus.fr
pour la rentrée ?
Nous
sommes actuellement dans un projet important de refonte du
site. L'infrastructure et le concept du site date de quatre
ou cinq ans. Nous avons pu y prendre des positions mais il
faut changer d'échelle. Nous partons sur une nouvelle
plate-forme qui va permettre de draîner une autre audience.
Nous allons lancer une nouvelle grille de programmation Web,
tout comme cela a été effectué pour les
émissions de Canal Plus. Nous devrions présenter
la nouvelle formule mi-octobre. Toutefois, la ligne éditoriale
ne change pas.
Quels
sont vos objectifs d'audience avec cette refonte ?
Nous
voulons doubler notre audience. Nous étions à
10 millions de pages vues au mois de juin et deux millions
de visites.
Avez-vous une idée exacte du nombre d'abonnés
Canal Plus qui dispose d'un accès Internet ?
C'est un peu plus supérieur à la moyenne nationale.
L'ordre de grandeur tourne autour de 30%. Si on regarde l'audience
du site, elle se divise en deux moitiés équivalentes
: les abonnés de la chaîne et les autres internautes.
Peut-on connaître votre capacité d'investissement
pour Canal Numedia globalement ?
Nous
ne communiquons pas ce chiffre, mais disons que l'ensemble
de l'effectif va passer de 170 à 250 personnes d'ici
la fin de l'année et je ne compte pas la partie AlloCiné.
En dehors du site Canal Plus, quels sites vont connaître
un fort développement ?
Entre
l'automne et Noël, nous allons développer le contenu
des sites d' i-télévision, ouvert depuis peu,
et, pour la chaîne d'emploi Demain, nous misons sur
un développement stratégique qui va préfigurer
la "video on demand" sur les chaînes télé
mais également sur Internet. Nous préparons
également un nouveau décodeur numérique
pour Canal Satellite avec un accès à Internet.
Il y aura une batterie de programmes électroniques
pour le téléspectateur devant sa télé
avec parallèlement un miroir Web. Canal Numedia dispose
d'une trentaine de sites. Nous avons également lancé
des sites autour du football.
Quel chiffre d'affaires comptez-vous tirer du Web cette année
?
Nous
ne donnons aucun chiffre mais c'est la première fois
que le montant sera significatif. Nous tirons naturellement
une grande partie des recettes de la publicité mais
nous croyons également à la vente de contenu.
Des grands acteurs du type portails généralistes
vont être intéressés par ce type de produits
licenciés. C'est un axe fort de notre développement
international. Pour le e-commerce, ça démarre.
On parle
souvent de l'introduction en Bourse des activités de
Canal Numedia ? Où en est le projet ?
A
court terme, personne ne travaille sur ce dossier. Si c'était
le cas, cela pourait faciliter l'introduction de nouveaux
partenaires pour initier un nouveau projet.
TF1 a indiqué
vouloir développer un accès haut débit.
Quid de Canal Plus ?
TF1
se trouve dans une situation différente puisqu'il est
adossé à un opérateur télécom.
Jusqu'à présent, nous avons estimé qu'il
n'était pas urgent de développer un tel service.
Il est vrai que nous nous intéressons à des
acteurs diffuseurs tels que Microsoft ou Real Network mais,
en terme d'Internet provider, nous restons pour le moment
dans un monde ouvert.
Le
groupe Canal Plus est-il toujours à l'affût de
prises de participation sur des projets Internet, comme ce
fût le cas pour la tentative avortée du rapprochement
avec Sportal ?
Oui,
absolument. Canal Plus est à la recherche d'acquisition
intelligente, qui pourrait conforter notre position de site
de divertissement et particulièrement dans le sport.
Ca peut être varié. Nous avons récemment
finalisé l'acquisition de Cinestore. Je n'ai pas vécu
l'épisode Sportal mais c'est un révélateur.
Même si le produit est très respectable, il faut
tout de même que les montants soient abordables. Cela
nous a rappelé que nous avions peut-être au sein
de notre groupe des moyens et des compétences, qui
nécessiteraient un investissement un peu plus modeste.
Avec
qui vous sentez-vous le plus en concurrence sur Internet ?
Clairement, nous ne sommes pas en concurrence avec une chaîne
généraliste qui se met sur le Web. Le contenu
que l'on produit n'a rien à voir avec ce que fait TF1
ou M6. Globalement, je peux même dire que le monde des
médias français se débrouille pas mal
sur le Web. On a vu pire outre-Atlantique. Nous soignons notre
stratégie de différenciation qui repose sur
quelques thèmes forts : sport, cinéma et tout
ce qui touche la "Web generation".
Vous regardez
souvent les vidéos en ligne. Vous trouvez ça confortable
?
Si
je veux voir un match de foot ou le film Gladiator, je n'irai
pas devant mon PC. En revanche, pour voir des clips ou des accroches,
le confort est acceptable.
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