JDNet.
Vous avez fait passer votre offre de 18 heures à 6
heures, y compris pour vos anciens abonnés, contrairement
à ce que vous aviez annoncé dans un premier
temps. Pourquoi ces revirements ?
David Bitton.
Nous avons créé
Oreka avec un modèle économique différent
qui consiste à faire financer par la publicité
l'accès Internet de nos abonnés, y compris les
communications téléphoniques. Mais le développement
de ce nouveau modèle nécessite bien évidemment
des financements extérieurs pour atteindre l'équilibre
économique de notre activité. Or notre visibilité
actuelle sur ces financements a évolué car les
conditions de marché se sont détériorées.
Vous avez
pourtant effectué une levée de fonds de 150
millions de francs auprès d'initiative IP...
Effectivement,
nous avons bouclé une opération de financement
en octobre dernier. A ce jour nous avons reçu la moitié
de cette somme, mais le timing pour la seconde moitié
n'a pas encore été défini. Pour la suite
du financement de notre activité nous devions compter
sur une autre opération de financement ou une éventuelle
IPO. C'est le contexte actuel plus tendu sur les marchés
qui nous conduit à adapter notre offre pour assurer
le développement d'Oreka sur le long terme.
La mise
en place de la liste d'attente quelques semaines après
le lancement de votre offre ne pouvait-elle pas suffir à
maîtriser vos coûts ?
Nous avons créé
un liste d'attente parce que nous voulions assurer la qualité
de notre infrastructure technique. Nous avions prévu
à l'origine de recruter 2.000 abonnés par jour.
Or le seul jour du lancement nous avons enregistré
plus de 7.000 inscriptions et ce nombre a continué
de croître dans les jours suivants. Je suis ingénieur
télécoms de formation et j'ai travaillé
chez plusieurs grands acteurs du secteur. Je sais que l'on
ne peut pas assurer une véritable qualité de
service si l'on ne maîtrise pas la croissance du nombre
de ses abonnés. Par ailleurs, effectivement, nous voulions
maîtriser la croissance de nos dépenses. C'est
pourquoi nous avions mis en place cette période d'attente.
Aujourd'hui
vous avez choisi de supprimer le liste d'attente et de proposer
votre offre de 6 heures à tous les demandeurs. Les
problèmes que vous évoquez ont été
résolus ?
Nous étions
dans une situation paradoxale avec autant d'abonnés
en liste d'attente que d'abonnés activés. Parallèlement,
nous constations que les abonnés 18 heures consommaient
seulement en moyenne entre 5 et 6 heures sur leur forfait.
Nous avons donc fait le choix d'ouvrir notre offre à
tous nos inscrits en supprimant la liste d'attente. Nous avions
donc fin décembre plus de 700.000 abonnés à
notre nouvelle offre pour 6 heures d'Internet gratuit au lieu
de 400.000 pour l'offre 18 heures. L'utilisation du service
est donc aujourd'hui plus ouverte sans engendrer une explosion
du nombre d'heures de connexion.
Pourquoi
ne pas avoir laissé vos abonnés historiques
à 18 heures, s'ils consommaient moins de 6 heures en
moyenne ?
Sur un plan financier
nous étions obliger de prévoir le risque d'une
augmentation de cette consommation qui aurait considérablement
pesée sur nos coûts de télécomunications.
En clair, cette moyenne de consommation ne nous permettait
pas d'anticiper leurs consommations futurs. Seule la mise
en place de notre nouvelle offre nous permettait d'assurer
notre financement sur le long terme. Or Oreka n'est pas un
coup marketing mais bien un véritable projet d'entreprise.
Quelle
est l'origine du projet Oreka ?
Après un
parcours d'ingénieur télécoms au sein
de la communauté européenne puis du cabinet
conseil CMA, et enfin de Cegetel ou j'ai travaillé
au développement des projets e-commerce, je me suis
établi comme consultant indépendant. C'est en
travaillant sur projet de FAI pour un grand distributeur français
que j'ai appris à maîtriser toute la chaîne
des coûts de ce métier. Or nous avons vécu
une véritable petite révolution dans le secteur
avec la création de numéros 0860 qui ont permis
aux opérateurs de collecter du trafic télécom
et de le remonter vers Paris pour un coût inférieur
à la minute de communication locale. Cela permettait
de créer du jour au lendemain un FAI national sans
diposer d'aucune infrastructure télécom tout
en gagnant de l'argent sur la commercialisation de forfait.
.Et
l'idée du financement par la bannière publicitaire ?
Je connaissais
le FAI américain Netzero qui propose un accès
Internet totalement gratuit et financé par la bannière
publicitaire. L'idée initiale a été de
transposer ce modèle aux réalités de
notre marché télécoms pour enfin proposer
un véritable accès totalement gratuit sur le
marché Français. C'est à ce moment que
j'ai rencontré Pierre-François Grimaldi, PDG
fondateur de Télestore et surtout d'iBazar, qui s'intéressait,
lui aussi, à l'activité de FAI.
Il a tout
de suite été séduit par le projet ?
Pour tout vous
dire, au premier abord je l'ai trouvé un peu distant.
Il ne me regardait pas du tout. Je lui est expliqué
que selon moi il était trop tard pour entreprendre
la création d'un nouveau FAI gratuit classique après
le lancement de LibertySurf. Je lui ai donc présenté
l'idée d'un FAI totalement gratuit avec prise en charge
des coûts de communication téléphonique
et avec, en contrepartie, une barre de navigation pour l'internaute
dont nous faisions un espace publicitaire. Là, il a
mordu et m'a dit "je veux voir !". Finalement
convaincu, il a non seulement financé la création
d'Oreka mais également hébergé la société
naissante dans les murs d'iBazar. Pour ma part, je me suis
engagé à lancer l'offre Oreka pour le mois de
mai.
Et comment
est née l'idée de commercialiser la page d'accueil ?
Pour la mise en
place du projet j'ai fait venir Alain Delhaye, un ancien de
chez Completel et Jérôme Wagner, un ancien de
l'ART. C'est alors que s'est posée la question du portail.
Pour concevoir un portail de qualité il nous fallait
un centaine de personnes ce qui était inenvisageable
sur le plan financier. J'ai alors eu l'idée de permettre
à notre abonné de commencer sa navigation, non
pas sur un portail maison, mais sur un site tiers que nous
lui proposions en fonction de son profil et de ses habitudes
de navigation. Nous avons ensuite envisager de changer régulièrement
cette page d'accueil et de vendre aux sites cet affichage
générateur de trafic directement sur leur site.
Cette nouvelle
offre de support publicitaire a-t-elle convaincue les éditeurs ?
Plus encore que
dans nos projections les plus optimistes ! Pour l'année
2000, la commercialisation effective de nos supports ayant
débutée au mois d'août, nous avons généré
15 millions de chiffre d'affaires publicitaire dont 70% générés
par la seule commercialisation de la page d'accueil. Le taux
de transformation sur cette page varie de 20% à 40%,
ce qui signifie que dans 20% à 40% des cas l'abonné
Oreka commence une navigation sur le site présenté.
C'est le résultat du ciblage de cet affichage qui permet
de présenter un site en adéquation avec les
attentes de l'internaute.
Combien
de salariés compte Oreka actuellement ?
Nous employons
directement 24 personnes car nous avons choisi d'externaliser
au maximum afin de limiter nos coûts structurels. Plus
de soixante salariés travaillent en réalité
autour d'Oreka.
Vous avez
annoncé vouloir vous positionner sur le marché
de l'ADSL. Quels sera votre positionnement ?
Nous ne voulons
pas nous lancer dans une guerre des prix, tout d'abord parce
que le marché n'est pas encore près sur le plan
technique à absorber une explosion du nombre d'abonnements.
Nous allons nous situer avec une offre compétitive
sur le marché, simplement pour être présents
sur ce secteur. Notre montée en puisssance se fera
lorsque l'infrastructure sera disponible et, à ce moment-là,
nous innoverons avec des offres originales.
Qu'est-ce
qui vous a le plus marqué au cours de la jeune histoire
d'Oreka ?
D'abord l'histoire
humaine. Je suis entrepreneur dans l'âme et j'ai toujours
su qu'un jour ou l'autre je franchirai le pas. Mais un tel
challenge dépend largement des rencontres de partenaires,
de salariés ou d'associés qui adhèrent
au projet.
Que faites-vous
lorsque vous ne dirigez pas Oreka ?
Je suis passionné
de musique électronique et j'aime le week-end passer
du temps à composer sur mon clavier pour mon plaisir.
C'est un peu mon oxygène, mais je le réserve
à mon proche entourage. Ou parfois le lundi, au bureau,
pour les meilleurs créations...
|