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Dans quelle mesure le débat "droit d'auteur
et musique en ligne" s'est-il clarifié ?
Catherine Kerr-Vignale. Tout dépend de
l'interprétation que vous faites de la notion
de clarté... Les fondements juridiques en terme
d'exploitation de la musique n'ont pas à être
bousculé lorsqu'il s'agit d'une déclinaison
en ligne. Ce qui a évolué récemment,
c'est la réflexion autour des propositions de
contrats et des tarifs. Nous devons prendre en compte
le fait que les modèles économiques des
sociétés Internet qui se sont lancées
en premier dans la musique en ligne ont changé
en quatre ans : nous sommes passés d'un modèle
de téléchargements payants purs à
un mixte de téléchargements gratuits/payants.
Les sociétés d'auteurs françaises
ont donc récemment modifié leurs offres
contractuelles pour la musique en ligne.
En
quoi avez-vous changé les conditions d'exploitation
?
Nous avons voulu coller à la demande
actuelle qui tourne autour d'exploitation de plates-formes
qui offrent du téléchargement avec un
système d'écoute à la demande (y
compris la pré-écoute). Un contrat a été
signé avec les déclinaisons françaises
des plates-formes de musique en ligne Vitaminic et OD2.
Le Geste
(Groupement des éditeurs de services en ligne),
qui accueille une commission musique en ligne, a validé
ces conditions contractuelles qui ont vocation à
s'appliquer rétroactivement. [NDLR : l'accord
Vitaminic, qui a été signé avec
la Sacem, la SDRM et Sesam pour une durée d'un
an, permet d'utiliser le répertoire de la société
d'auteurs sur le Web. Vitaminic France régle directement
les droits d'auteur au titre de la diffusion en ligne
d'uvres musicales à la demande, qu'il s'agisse de streaming
(diffusion en continu) ou de téléchargement, y compris
sous forme de services d'abonnement comme Vitaminic
Music Club].
Tous
les acteurs sont-ils prêts à appliquer
ces nouvelles règles ?
L'une de nos difficultés est que nous
notons des réticences à nos structures
tarifaires, notamment du côté des majors
du disque. Par exemple, Universal Music France, qui
a des services Internet comme e-Compil.fr, ne veut pas
entrer dans ce schéma. D'ailleurs, nous n'avons
signé aucun accord avec cette maison de disque.
En général, les majors veulent obtenir
de nous payer comme sur un disque, ce qui ne correspond
pas à la réelle exploitation sur les réseaux.
Cette démarche des majors ne convient pas à
notre principe qui est d'appréhender l'ensemble
des recettes liées à l'exploitation de
l'oeuvre.
N'existe-il pas de solutions
technologiques qui permettraient justement d'avoir une
idée précise de l'exploitation des oeuvres
?
J'imagine que vous parlez des solutions liées
au digital right management (DRM, gestion des droits
des contenus numériques). J'ai rencontré
de nombreux professionnels, généralement
des représentants de sociétés de
logiciels, qui m'ont garanti pouvoir donner tous les
éléments de reporting pour avoir une idée
précise de l'exploitation : nombre et fréquence
des fichiers consultés, nombre d'utilisateurs,
quelles statistiques de consultations par pays, etc.
Mais, le développement de ce type de logiciels
perfectionnés est coûteux. Et au final,
nous n'obtenons pas un reporting détaillé.
C'est un vrai problème pour nous car nous sommes
chargés de repartir avec précision les
revenus issus de l'exploitation des oeuvres sur Internet.
Ce qui est impossible en l'état actuel. Troisième
problème : en admettant que le volet reporting
s'améliore, toute société d'auteurs
doit mettre en place des procédures de contrôle.
Rien n'existe à l'heure actuelle. La solution
pourrait être de passer par un système
de certification de société tiers.
Des prestataires technologiques
comme Yacast ne peuvent pas vous aider dans ce sens
?
Effectivement, la Sacem a signé un contrat
avec eux mais les solutions de ce prestataire permettent
surtout d'identifier les oeuvres diffusées mais
ne nous donnent aucune information sur les recettes
liées à l'exploitation des oeuvres. Nous
avons mis en place une ébauche d'une solution
propre - Fast-Track - qui pourrait être utilisée
à l'échelle européenne voire aux
Etats-Unis. Son développement dépasse
le cadre franco-français. Mais aujourd'hui, l'outil
n'est pas prêt.
On parle de l'élaboration
d'un nouveau contrat pour les webradios...
Tous nos contrats sont appliqués à
titre expérimental sur une durée d'un
an car le marché Internet - et plus particulièrement
celui de la musique en ligne - est extrêmement
mouvant. L'accord webradio sera reconduit si l'on ne
trouve pas de meilleure formule. Là aussi, il
y a eu beaucoup de déception autour du modèle
économique. Nous avons modifié le minimum
garanti, compte tenu du manque de recette des exploitants.
Le principe de perception des webradios associatives
repose sur la base d'un forfait. Nous avons signé
une quinzaine de webradios associatives et une dizaine
de contrats de webradios commerciales. Nous réfléchissons
actuellement à un nouveau contrat webradio qui
entrerait dans un cadre d'offre de services plus complet.
Nous sommes en discussion très avancée
avec e-DIMA (la branche européenne du groupement
américain Digital Media Association) autour du
webcasting interactif.
Quel type d'accord avez-vous
signé avec les groupes de radiodiffusion qui
proposent d'écouter la radio en direct sur le
Web ?
Pour certains diffuseurs qui font du simulcasting (c'est
à dire la transmission sur les différents
types de réseaux d'un programme diffusé,
y compris le Web), nous avons étendu les contrats
pour inclure Internet. Pour certaines formes d'exploitation,
nous sommes toujours en négociation car les services
offerts sont multiples. Mais les problématiques
changent lorsque la programmation à l'antenne
commence à être découpée
par fichiers pour une consultation à la demande.
Quel accueil vous réservent
les fournisseurs d'accès Internet (FAI) qui souhaitent
monter des espaces "musique en ligne" sur
leurs portails ?
Nous avons signé des accords avec le
portail de Club-Internet (T-Online France) pour des
opérations événementielles. Nous
avons également des négociations avec
Wanadoo (France Télécom), qui utilise
les services d'OD2 France, acteur qui a signé
un accord Sacem.
La Sacem est membre du collectif
Clic (regroupant des organismes de perception liés
à la filière de la création). Pourquoi
avez-vous pris à partie les FAI dans le
domaine de la musique en ligne ?
Le Clic demande une transposition intégrale
de la directive européenne
e-commerce en France. Nous demandons aux FAI de respecter
ce que la directive stipule. Chaque mot a été
pesé lors des discussions liées à
l'élaboration de cette directive. Les FAI veulent
être des tuyaux sans regarder ce qu'il y a à
l'intérieur. Nous voudrions que le discours des
FAI évolue : aujourd'hui, les services d'accès
Internet n'acceptent de retirer un contenu que sur décision
d'un juge. Nous voudrions que les FAI retirent un contenu
non autorisé dans le cadre de la propriété
intellectuelle à la demande des ayant droits
dès lors que leur demande est fondée,
de filtrer quand ils sont hébergeurs ou fournisseurs
d'accès en évitant de passer systématiquement
par un recours en justice pour trancher. Les contacts
vont être repris entre les représentants
de l'AFA et le Clic.
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Que
pensez-vous de la proposition de la Commission européenne
de créer un guichet unique européen pour
le simulcasting ?
Cette annonce ne concerne pas les droits d'auteurs
mais les droits voisins. Et d'ailleurs, la Société civile
des producteurs phonographiques (SCPP), tout comme son
homologue espagnol, n'est pas signataire. Cette proposition
est liée au simulcasting. Elle permet de mettre
en concurrence les sociétés de producteurs.
La Commission européenne, qui traque les monopoles,
voit d'un mauvais oeil la gestion collective. Les sociétés
d'auteurs européennes ont signé des accords
de représentation réciproque pour s'échanger
les répertoires entre pays et perpétuer
le système de perception sans se soucier des
frontières. Le système de perception sur
les médias traditionnels tourne autour d'un critère
: la localisation géographique de la diffusion.
En clair, la Sacem est l'interlocuteur privilégié
pour tout diffuseur français, quelque soit l'origine
de l'oeuvre qui est exploité par ce dernier.
Pour Internet, nous avons mis en place un avenant de
ces accords de représentation réciproque
en retenant comme critère principal la résidence
économique du fournisseur de contenu en ligne.
Récemment, nous avons défendu le système
de gestion des droits d'auteurs sur Internet auprès
de la Commission européenne. Nous avons tenté
de démontrer que notre démarche était
rationnelle et efficace. Mais nous avons du mal à
nous faire entendre à Bruxelles qui est visiblement
plus intéressé à organiser la concurrence
que le marché de la musique en ligne. J'estime
que nous devons nous mobiliser pour défendre
la création et l'avenir de la gestion collective
en Europe.
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