JDNet. Quelle
est la stratégie du groupe Quebecor sur Internet?
Pierre-Karl
Péladeau. Depuis
cinq ans, Quebecor est actif au Canada sur les deux aspects
de l'Internet : intégration web et édition de
contenu. Grâce nos acquisitions, ces deux aspects ont
été amenés à se développer,
en particulier en France avec le rachat de Cythère en
janvier dernier. Nous avons d'abord commencé, il y a
quatre ans, par mettre en ligne les journaux de notre groupe,
comme Le Journal de Montréal. Et c'est en 1998 que nous
avons repris la partie contenu internet de Sun Media, la deuxième
chaîne de journaux au Canada. Ils avaient eux aussi commencé
par mettre leur journaux en ligne avant d'abandonner cette activité
pour constituer le portail Canoe (pour CANadian On line Explorer).
En accord avec Sun, nous avons conservé la stratégie
de la marque et du portail.
Pourtant
vous avez récemment fermé deux sites de quotidiens
canadiens et licencié 65 personnes au sein de votre
branche Internet en juillet... (Lire
l'article
du JDNet du 19/07/00)
En
ce qui concerne la fermeture des sites du Journal de Montréal
et du Journal de Québec, nous avons pensé que
ce sites n'avaient pas d'avenir, d'autant plus que pour avoir
la version intégrale du journal, il fallait payer.
Ce modèle économique était peut être
valable il y a quatre ans, mais ça n'est plus le cas.
En ce qui concerne les licenciements, il correspondent au
revirement de marché que l'on connaît en Amérique
du Nord. Les revenus escomptés de la publicité
sont très inférieurs à ce que nous attendions.
Maintenir ces postes aurait été irresponsable,
car cela aurait mis en péril l'ensemble de la structure.
Je pense que l'on va assister à d'autres faillites
prochainement. C'est la fin du rêve. On ne peut plus
obtenir aussi facilement qu'avant les fonds pour financer
des projets, le marché est devenu plus mâture
et moins euphorique. A terme, les revenus vont diminuer. Le
modèle qui va percer est celui du "click and mortar",
c'est à dire la présence physique doublée
d'une présence Web. Le web est un doublon d'une entreprise
physique mais ne doit pas être l'essence fondamentale
d'une entreprise. Quelques unes vont peut être percer
mais on n'a toujours pas la preuve qu'un modèle aussi
puissant et aussi capitalisé qu'Amazon va réussir.
Gagnez
vous de l'argent sur vos sites candiens?
Non,
c'est le reste du groupe qui finance les activités
Internet. Mais nous considèrons que c'est un investissement
essentiel à l'heure actuelle pour être sûr
d'avoir des supports de contenu complémentaires.
Pour l'instant, nous avons deux
sources majeures de revenu sur le net : la publicité
et le commerce électronique. Or, nous sommes avant
tout imprimeurs et l'ensemble de notre production papier est
dorénavant numérisée. Par ailleurs, avec
le rachat du câblo-opérateur canadien Vidéotron,
annoncé le 13 septembre, nous allons pouvoir nous lancer
plus activemement dans le haut débit et surtout dans
la télévision intéractive.
Le
site Canoe.fr a ouvert le 15 septembre, pourquoi avoir choisi
la France comme première implantation hors-Canada?
C'était
le plus simple pour nous avec la proximité de la langue.
Nous étions déjà implantés avec
le rachat de la web-agency Cythère en janvier dernier,
et nous sommes déjà présents de par notre
activité d'imprimeur. La France est notre base la plus
solide en Europe, là où l'on pense que nous
avons le moins de risque d'échouer. Ensuite viendra
l'Espagne, où le
site devrait ouvir mi-novembre ou début décembre.
L'équipe est déjà montée et je
pense que dans deux mois tout sera au point. En Italie, nous
en sommes au stade embryonnaire et nous sommes totalement
absents de l'Allemagne.
Quel
a été l'investissement nécessaire pour
monter le site français?
Je
ne peux pas vous le dire, mais ce n'est pas un montant significatif.
Vous
avez un site anglophone qui marche déjà très
bien. Allez-vous vous implanter aux Etats-Unis?
Non.
La pénétration internet aux Etats-Unis est très
difficile et Yahoo fonctionne très bien. Je pense qu''il
est plus facile d'arriver en France, où il ya plus
de place pour un contenu de qualité. Nous arrivons
à l'aube d'une forte croissance en
Europe et il ya moins de risque de perdre de l'argent ici.
Pourquoi
cette absence de publicité pour le lancement de votre
site français?
Nous
ne croyons pas aux effets d'annonce. Nous sommes dans un business
qui fonctionne avec une stratégie à long terme
et nous n'avons pas envie de créer de la fumée.
Canoe.fr est une de nos activités centrales, dans les
services conseil et en intégration web. Nous pouvons
bénéficier de nos marques et de l'expertise
en tant qu'éditeur de contenu. Nous ferons peut être
de la publicité quand nous aurons un produit stable
et dont nous serons sûrs.
Quels
sont vos sites préférés?
Ce
sont toujours les cordonniers les plus mal chaussés
! En fait, je n'ai pas beaucoup le temps de surfer. Parfois
sur un site de service, comme la météo par exemple,
en revanche, je lis beaucoup de journaux et de magazines...
|