JDNet.
Vous êtes un fonds lié à ABN-Amro. Y-a-t-il des synergies
avec la banque hollandaise ?
Bernard-Louis Roques.
Nous sommes avant tout une société de gestion de fonds commun
de placements à risque (FCPR, FCPI), qui évolue dans le cadre
d'un groupe financier international. La performance des fonds
est donc primordiale. Mais on peut dégager des synergies quant
la logique y répond. En outre notre activité peut être un
excellent outil de veille pour les activités Internet d'ABN-Amro.
Mais je le répète : la performance du fonds est fondamentale.
Caramail,
Lycos Europe, Buycentral... Vous avez beaucoup investi dans
les sites en direction des particuliers. C'est une de vos
spécialités ?
Non, nous sommes plutôt orientés
vers la technologie. Les investissements que vous citez ont
développé des technologies propriétaires. La seule exception
en ce qui nous concerne est peut-être Chapitre.com. Mais ils
ont une vraie connaissance de leur métier. Et Internet est
un superbe moyen pour rendre encore plus performant leur coeur
de métier.
Certaines
des sociétés de ce secteur ont été largement sur-valorisées
l'an dernier et souffrent actuellement pour trouver de nouveaux
fonds. Quel est votre attitude vis à vis de ce genre de cas
?
Il faut déjà
savoir qu'on ne reviendra pas à des sommets comme
l'an dernier. On ne doit donc pas se focaliser sur la
valorisation. Vous savez, si on regarde sur une période
de 20 ans, le Price
Earning Ratio (PER, capitalisation/bénéfice
net) évolue entre 15 et 20 dans la technologie.
Il y a eu des pics à 80-90 et des baisses, mais
sur 20 ans la technologie est sur-valorisée par
rapport à l'industrie traditionnelle car il y
a une barrière à l'entrée et des
perspectives de croissance. Si l'on excepte les problèmes
de valorisation que vous mentionnez, je trouve que la
structure de certaines sociétés Internet
est plutôt bonne : elles font du chiffre
d'affaires, connaissent des rythmes de croissance importants
et ont un 'business model' profitable. On peut donc
être optimiste sur le long terme. Mais il va falloir
être très patient, car il me semble peu
probable que la confiance dans ce secteur ne revienne
avant qu'un certain nombre de sociétés
leaders n'aient démontré ou confirmé
leur capacité à générer
des profits.
En ce moment
on a l'impression que les fonds utilisent leurs réserves pour
refinancer des sociétés déjà présentes dans leur portefeuille
plutôt que pour se lancer dans des premiers tours de table
?
Ce n'est pas tout à fait exact.
Il est vrai que certains capitaux risqueurs ont été dépassés
l'an dernier, mais ils sont rares. Il ne faut donc pas voir
ces refinancements comme des tentatives de sauvetage. Si des
investisseurs remettent de l'argent au deuxième tour c'est
parce qu'ils estiment que ça vaut la peine de se battre et
parce que la société a validé son business model en engrangeant
des revenus. Ce n'est donc pas du tout pour retarder la mort
de l'entreprise que les investisseurs injectent des capitaux.
Par ailleurs, pour répondre à votre question, nos études démontrent
que le rythme d'investissement du capital-risque en Europe
est loin de connaître un arrêt. Enfin je voudrais quand même
signaler que l'on reçoit nettement moins de dossiers (le 'dealflow')
que l'an dernier ce qui donne peut-être l'impression d'une
activité moins soutenue. Je ne vous cache pas que cette baisse
du nombre de dossiers nous soulage pour des questions d'organisation,
d'autant que parallèlement à cela, la qualité des affaires
s'est sensiblement améliorée.
Vous croyez
néamoins à la faillite de certaines structures d'investissements
?
Pour les fonds cela m'étonnerait.
Car quelles que soient les performances actuelles on raisonne
toujours sur 5, 7 voire 10 ans. Autrement dit, ce qui se passe
depuis un an n'affecte que partiellement les fonds, qui sont
jugés sur la durée. Par ailleurs, comme je vous le disais,
le métier est cyclique. Quand nous avons voulu faire des sorties
il y a un an et demi dans des affaires de logiciels techniques,
'personne' n'en voulait. Maintenant, avec la désaffection
des valeurs Internet, il y a un vrai engouement pour ce secteur
en Bourse. C'est pour cela que je ne crois guère à des faillites
de fonds. En fait tout va dépendre de l'ampleur et de la durée
de la crise actuelle des technologiques.
ABN-Amro est présente dans toute l'Europe avec ses fonds.
Comment faites-vous pour être sûr que les différents fonds
ne vont pas investir dans deux sociétés aux modèles similaires
?
C'est un vrai problème. C'est
un défi auquel nous nous attelons avec nos homologues européens,
et en particulier hollandais. D'autant que les sociétés françaises,
par exemple, connaissent parfaitement leurs équivalents américains
mais peu leur homologues européens. Il y a donc un énorme
travail d'échange d'informations à faire entre les fonds pour
ne pas se retrouver à étudier deux dossiers similaires dans
deux pays différents. L'an dernier c'était encore plus vrai,
car nous avons été submergés par la demande. On a reçu plus
de 4.000 business plans en bonne et due forme ce qui était
assez hors norme.
Vers quels types d'investissements allez vous tendre cette
année ?
La palette est large. Nous
nous intéressons à plusieurs secteurs comme les biotechnologies,
l'électronique, la sécurité ou les applications mobiles. En
fait, vous savez, l'Internet est encore un 'petit' secteur.
Beaucoup de valeurs Internet introduites en Europe il y a
en an s'effondrent en raison de vente massive de la part des
investisseurs. Votre lock-up dans NetValue vient justement
de tomber. Comment gère-t-on cela ?
L'effondrement d'un titre en
raison de la sortie d'un investisseur est un cas rare et regrettable.
Nous avons effectué plusieurs sorties en 2000, dans des proportions
importantes, sans que cela n'ait pesé sur les cours. Une sortie
de lock-up, cela s'organise avec les teneurs de Marché des
sociétés concernées. On ne vend pas des titres 'sauvagement'
sur le marché, on préfère céder des 'blocs'. En outre, les
cessions s'effectuent dans un contexte où la demande est forte
et où les cours sont élevés. Pas quand les cours sont déprimés
et qu'il n'y a pas d'acheteur.
Qu'est ce que vous aimez sur Internet ?
L'e-mail, un outil fabuleux. Ma page d'accueil est CNN. En
outre je consulte beaucoup les sites financiers ou technologiques.
Qu'est ce que vous n'aimez pas sur Internet ?
Sa face sombre. Nous ne sommes
pas au bout de nos peines en terme de malfaisance...
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