INTERVIEW
 
Directeur
MercerDigital
Georges Vialle
"Titre"
La partie immergée de l'iceberg. Alors qu'un pan entier de la Nouvelle économie, lié aux dotcoms, est marqué par une violente contraction, l'e-business dans les grandes entreprises entame une deuxième carrière, bien éloignée du strass et paillettes de 1999. Après avoir été perçu comme un levier financier, l'Internet est aujourd'hui exploité par les grands comptes dans une logique opérationnelle. En permettant d'intégrer la relation client, de développer la formation interne ou de gérer au plus juste l'approvisionnement, la dynamique e-business change du tout au tout. Au lieu de coûter de l'argent, elle en rapporte. Georges Vialle, responsable de MercerDigital France, la branche Internet et e-commerce de Mercer Management Consulting, revient sur cette transformation. 13 décembre 2001
 
          

JDNet. Comment les grands comptes appréhendent-ils en ce début 2002 leur stratégie e-business ?
Georges Vialle. Le premier acte de la Nouvelle économie est aujourd'hui bel et bien fini. Il y a encore 18 mois, les grands comptes voyaient dans l'Internet un moyen pour prendre des initiatives externes, pour aller vers de nouveaux modèles de profits, parfois très éloignés de leur coeur de métier. Cette stratégie était souvent dictée par la pression des start-ups qui étaient alors vues comme des menaces. Dans cette logique, les grands comptes ont eux aussi vécus leur euphorie Internet en lançant des initiatives disparates avec pour simple volonté, bien souvent, d'occuper le terrain. L'euphorie passée, ces entreprises se retrouvent face à une accumulation de projets dont la cohésion et l'intérêt financier sont plus que douteux.

Mais ce bouillonnement entrait également dans la volonté pour les grands comptes de trouver des financements par le marché...
Oui, mais à ce jeu-là, peu de grandes entreprises sont arrivées à leurs fins. La fenêtre de tir en Bourse était extrêmement étroite et, au bout du compte, la très grande majorité des entreprises ont préféré aujourd'hui rapatrier leur spin-off Internet en s'apercevant de l'ampleur des dégâts et des moyens engagés. Seules certaines stratégies tiennent la route, par exemple les joint-ventures qui ont permis à des grands comptes de sortir de leur coquille en combinant expertise et base de clientèle. Le cas de la SNCF et d'Expedia est à ce titre remarquable.

Comment se traduit la fin du premier acte Internet pour les grandes entreprises ?
Par du pragmatisme, de la rationalisation. Là où une grande entreprise accumulait, il y a un an, 50 ou 200 projets Internet différents, nous sommes aujourd'hui tombés à 15 ou 50 projets. Cette épuration est généralement opérée en regard de la synergie entre le projet et le coeur de métier de l'entreprise. L'e-business n'est plus de la R & D ! Ce qui n'est pas dans une logique du renforcement du métier de base et d'amélioration de la performance est souvent mis de côté. Cette rationalisation pousse désormais les projets Internet à épouser les métiers de l'entreprise en se déclinant sous forme d'e-CRM, d'e-procurement, d'e-RH, d'e-learning... Fin 2000, environ 60% des projets Internet en entreprise n'étaient pas en cohésion directe avec le coeur de métier. Aujourd'hui, 85 à 95% des projets Internet menés sont en adéquation avec l'activité de l'entreprise.

Quels sont les retours attendus avec cette nouvelle génération de projets Internet ?
Nous entrons dans une logique de numérisation des métiers, en plein dans l'esprit "click & mortar". En se concentrant sur les fonctionnalités à même de dégager des gains, les entreprises peuvent prétendre atteindre des réductions de coûts situées entre 5 et 10%, voire 15% pour les bons élèves.

Quels sont les impacts de cette mutation dans le pilotage interne des projets Internet ?
Le premier acte se caractérisait par un foisonnement d'initiatives où le middle management se retrouvait en première ligne. La nouvelle donne pousse les entreprises à mettre en place un jeu à trois : d'une part les utilisateurs actifs, qui sont les interlocuteurs et les pilotes les plus pertinents pour injecter une logique opérationnelle, d'autre part la direction générale, qui elle seule peut insuffler une cohésion et arbitrer les moyens financiers nécessaires, et enfin la direction informatique qui apporte une fonction support indispensable.

Que devient dans ce jeu à trois le directeur e-business, le "monsieur Internet" ?
Cette fonction est par nature transitoire. Elle a encore une utilité très forte dans les deux à trois ans qui viennent afin d'orchestrer le développement des initiatives et d'assurer une pédagogie en interne. Mais avec la banalisation de l'Internet, la fonction disparaîtra d'elle-même.

Cela signifie-t-il que nous allons vers une intégration complète de l'Internet dans l'entreprise ?
Oui. Regardez les cas de la micro-informatique au cours des quinze dernières années. Sur cette période, nous sommes passés d'une affaire d'infrastructures à une affaire de métiers, d'une affaire de maîtrise d'ouvrage à une affaire de maîtrise d'oeuvre. L'informatique, qui pouvait au début être considérée comme une fin en soi, est devenu un outil qui s'est intégré dans les métiers de l'entreprise, avec des relais locaux, des initiatives, des solutions, un savoir-faire. L'Internet va suivre le même chemin en diffusant son modèle en réseau dans les business-units et en devenant un outil d'amélioration de la performance de l'entreprise. Nous serons alors bien loin du premier acte hautement médiatique.

Quelles sont les entreprises qui s'avèrent les plus en pointe face à cette nouvelle stratégie ?
Les groupes qui disposent d'un large éventail de métiers ont clairement pris une longueur d'avance. Très tôt, plutôt que d'aller chasser sur de nouvelles terres, ces groupes ont été contraints de faire redescendre leur stratégie Internet au niveau opérationnel, tant les logiques entre leurs différentes activités sont parfois éloignées. A côté de ces groupes, existent des entreprises aux métiers cohérents et qui ont opté pour un plateau e-business centralisé où sont regroupés les différentes compétences humaines du groupe.

Quels sont vos sites Internet préférés ?
Google, Voyages-sncf.com, Wanadoo et Yahoo.

Etes-vous abonné à un service payant en ligne ?
Non mais à un accès haut débit.

Qu'aimez-vous sur Internet ?
L'accès immédiat à une information utile, le contact par mail avec mes amis.

A l'inverse, que détestez-vous sur Internet ?
Les messages de pub non désirés, le "spaming"...

 
Propos recueillis par Ludovic Desautez

PARCOURS
 
Depuis fin 1999, Georges Vialle est responsable à Paris de MercerDigital, la pratique Internet et e-commerce mondiale du cabinet Mercer Management Consulting. Ancien élève de l'Ecole Polytechnique (1971) et titulaire d'un MBA de l'ISA (1979), Georges Vialle est spécialisé dans les domaines de l'analyse stratégique, du marketing, de la vente et des systèmes d'information, en particulier dans le secteur des services, du transport et du voyage. Avant de rejoindre Mercer Management Consulting en 1996, Georges Vialle assumait les responsabilités de Directeur des systèmes d'information au sein du Club Méditerranée depuis 1991. Il a démarré sa carrière à la SNCF en 1974 où il a successivement occupé des postes à responsabilité opérationnelle, marketing, commerciale et stratégique.

   
 
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