JDNet. Comment se décomposent vos activités
désormais ?
Khaled Zourray.
Notre premier métier
était de comparer les prix du téléphone
sur notre site Budgetelecom. Cette innovation n'était
possible qu'à partir de 1999 après la
libéralisation des tarifs dans le secteur. Notre
modèle initial était basé sur les
commissions et la publicité. Nous avons réalisé
trois millions de francs de chiffre d'affaires en 2000,
mais ce modèle restait d'appoint et n'était
pas un modèle de croissance. Il y avait moyen
d'exploiter Internet de façon plus intelligente
d'autant que les télécommunications sont
un bien qui s'y adapte parfaitement car elles sont immatérielles.
Nous avons donc décidé d'ouvrir un espace,
Lesminutes.com, pour permettre à l'internaute
d'acheter des minutes à prix discount auprès
des opérateurs. En tant qu'ancien consultant
de l'Idate, spécialiste du secteur des télécoms,
j'avais entrevu les potentialités de ce marché
et les avantages qu'on pouvait en tirer grâce
au Web.
Vous
proposez des tarifs très bas sur votre site.
Comment fonctionne le modèle économiquement
?
C'est un peu le
même principe que pour les voyages en avions à
prix discount. En télécommunications,
les opérateurs n'utilisent souvent qu'un pourcentage
limité de leurs infrastructures tout en ayant
des coûts fixes quel que soit le nombre d'utilisateur.
Servir un client supplémentaire ne leur coûte
rien en fait. En dernier ressort, ils préfèrent
donc vendre des minutes à prix réduits
aux clients pour remplir leurs tuyaux. Dans ce schéma,
nous intervenons en tant qu'intermédiaire. En
pratique, les opérateurs nous font des offres
en nous proposant, par exemple, le Japon à 26
centimes par minute au mois de novembre. Le mois suivant,
cela sera plus cher mais un autre opérateur viendra
casser les prix. Le système est donc viable si
vous avez plusieurs opérateurs en concurrence.
Nous en avons quatre à l'international pour l'instant.
Toute cette activité d'achat est traitée
à partir d'un Telehouse à Paris, une sorte
d'aéroport des télécommunications.
Et tout est entièrement virtuel pour le client
final. Il peut gérer intégralement son
contrat via le Web.
Quel est le bilan de ce service et de la société
actuellement ?
Nous avons vendu
au cours du dernier mois, 2 millions de minutes ce qui
nous permet d'afficher une rentabilité sur le
dernier trimestre. Nous disposons de 17.000 clients
réguliers. 80% sont des particuliers, 20% des
professions libérales (Avocats etc...) et 10%
des TPE. En terme de chiffre d'affaires, nous allons
réaliser 12 millions de francs cette année,
pour trois millions de francs de pertes, et nous prévoyons
40 millions de francs l'an prochain. 2002 sera notre
première année entièrement bénéficiaire.
Grâce à notre rentabilité, acquise
au cours du dernier trimestre, nous n'avons pas touché
à notre trésorerie. Elle s'établit
à près de 15 millions de francs grâce
notamment à une levée de fonds opérée
en juin 2000 auprès de Spef/Banques Populaires
et du fonds d'investissements de Carephone Warehouse,
la maison-mère anglaise du réseau de téléphonie
mobile The Phone House.
Comment avez-vous fait connaître le site aux internautes
?
La stratégie
a été principalement axée sur du
marketing peu coûteux. Notre modèle est
rentable à condition d'avoir des coûts
d'acquisition raisonnables. Pour prendre un exemple,
sur les minutes pour les Etats-Unis nous faisons peu
de marges mais on gagne tout de même de l'argent
car le coût d'acquisition du client est faible.
Pour cela nous avons plusieurs partenariats sur le Web
avec Club-Internet, M6 ou Rue du Commerce. Nous pouvons
proposer le service directement sous notre marque ou
sous marque blanche. Néanmoins, en marketing
nous allons faire des efforts supplémentaires
vu le succès rencontré par Lesminutes.com.
En un mois, nous avons doublé le nombre de minutes
vendues. L'activité a vraiment décollé
dans les six derniers mois.
Beaucoup
d'acteurs grand public du Web se tournent désormais
vers les entreprises. Comptez-vous rester sur ce marché
ou vous orienter vers les professionnels ?
Le marché grand public marche
très bien sur le Web si on a un vrai service
à vendre. Je dirais même que la grande
entreprise ne nous intéresse pas car elle a trop
souvent besoin d'avoir un contact physique dans sa relation
commerciale. C'est très lourd à mettre
en place et coûteux à gérer. Avec
le grand public, contrairement à ce que l'on
pense, on peut rester presque totalement virtuel. Chez
nous, seulement 10% des abonnés appelent notre
service clients. Les autres gèrent entièrement
leur compte en ligne. En revanche, nous allons faire
des offres plus personnalisées aux TPE en simplifiant
également l'utilisation du service. Dès
le mois de février, le client n'aura besoin que
de composer un numéro à 4 chiffres au
lieu de 10 pour téléphoner. Les minutes
seront par ailleurs utilisables à partir d'une
vingtaine de pays pour ceux qui voyagent souvent. Nous
allons également intégrer une messagerie
pour consulter ses mails par téléphone
avec un partenaire. Sur le même modèle
que Degriftour, dans le voyage, nous pensons qu'il faut
créer des services à valeur ajoutée
autour du produit.
Vous
avez des ambitions à l'international ?
Nous avons une filiale en Espagne
avec Losminutos.com qui compte 1500 clients. Nous allons
ouvrir également le service en Italie avec Iminuti.com.
Cela ne coûte pas très cher de s'installer
dans un pays étranger. Il suffit de traduire
le site et de faire du marketing Internet adapté
aux contingences locales. L'immatérialité
du produit télécoms est une force sur
le Web. Le service est transparent et le client n'imagine
même pas que son service client se trouve à
Montpellier et que le serveur technique est à
Paris. Les
investisseurs voudraient d'ailleurs qu'on se positionne
également sur le Royauume-Uni et l'Allemagne.
Mais l'investissement marketing est beaucoup plus lourd
dans ces pays car le marché est très concurrentiel.
C'est donc une hypothèse et nous aurions certainement
besoin d'une nouvelle levée de fonds si nous
faisons le choix d'y aller. Mais comme notre investisseur
est britannique et connaît très bien le
marché anglais de la téléphonie,
cela pourrait servir.
Cette
année, il y a eu beaucoup de faillites et de
rapprochements. Est-ce que les prix vont remonter dans
la téléphonie, ce qui pourrait nuire à
votre activité ?
Nous ne constatons pas une hausse
des prix sur le marché de gros mais une stagnation
car effectivement la consolidation est intense. Mais
en supposant que les prix de gros augmentent, cela ne
nous dérangerait pas jusqu'à un certain
niveau. Nous pouvons nous permettre de faire moins de
marges car nos coûts de gestion diminuent. Pour
donner une idée, un client nous coûte deux
à trois francs par mois contre près de
huit francs pour un opérateur traditionnel. Chez
nous, il n'y a pas de facture papier, un gros poste
chez les opérateurs, pas de frais de recouvrement
puisque tout est prépayé. Bref, la gestion
par Internet permet vraiment de réduire les coûts.
Qu'est-ce
que vous aimez sur Internet ?
Yahoo notamment pour les actualités.
Sinon j'achète énormément sur le
site de la Fnac.
Et
qu'est ce-que vous n'aimez pas sur iIternet ?
Tous les excès ou les projets
du type Montoutou.com qui m'ont pas mal exaspéré
l'an dernier. Mais, heureusement, cela s'est calmé
et on en voit la fin.
|