Les sites Web de social networking connaissent un fort engouement aux USA
depuis mi-2003. Le New York Times nhésite pas à attribuer à ce secteur
le début du renouveau de la Silicon Valley (qui était bien choquée
après léclatement de la précédente bulle).
Friendster est le site le plus en vue mais de nombreux autres projets
comme Linkedin, Spoke, Ryze ou Tribe.net affichent eux aussi un certain
succès.
Tout cela a un fort goût de déjà vu : des sites qui
enregistrent des millions dutilisateurs en très peu de temps,
déchaînent lintérêt et lappétit des venture-capitalists puis tentent
de trouver un moyen den tirer quelques profits.
La progression fulgurante dun pionnier comme Friendster vient de la
dynamique d'expansion virale, où le nouvel inscrit est appelé à être
aussi un promoteur du service (pour élargir votre réseau sur
Friendster, invitez donc vos amis !). Ce succès spectaculaire ne
pouvait pas rester inaperçu.
C'est pourquoi, dans la foulée, une multitude d'autres sites de
rencontres communautaires se sont ouverts, proposant des solutions
ergonomiques et fonctionnelles en tous genres (liste tenue à jour sur
The Social Networking Services Meta
List).
Cette liste, déjà très fournie, est loin dêtre exhaustive et
définitive car de nouveaux entrants se déclarent chaque semaine. Ceux-ci sont tout aussi bien des start-up aux noms plus ou
moins évocateurs que des acteurs établis qui découvrent quils sont
concernés par ce domaine (comme Monster.com qui vient dajouter des
fonctions de type social networking à son fameux service).
"il ne serait pas surprenant qu'Amazon ou Ebay intégrent eux aussi des fonctions orientées social networking" |
Comme tous
les phénomènes de mode sur Internet, il est inévitable de voir les
grands acteurs se positionner aussi sur ce domaine. Cest pourquoi il
ne serait pas surprenant quAmazon ou Ebay intégrent eux aussi des
fonctions orientées social networking à leurs propres sites.
Amazon
accumule beaucoup dinformations sur ses clients réguliers (qui sont
aussi, pour certains, des contributeurs fidèles à travers les critiques
écrites des produits et/ou les listes de recommandations Listmania) et
aurait ainsi le moyen de proposer des rapprochements entre
consommateurs basés sur des goûts communs.
Idem pour Ebay qui vient de
prendre une participation dans Craiglist.org (considéré lui aussi par
certains comme un site de social networking même si cest
principalement un tableau dannonces).
Même si la mode bat son plein en ce moment, tous ces services ne
connaissent pas la même audience. Le succès foudroyant de certains,
très médiatisés, est à relativiser. Orkut.com, par exemple, a surtout
bénéficié dun effet curiosité dû à la combinaison du parrainage de
Google (Orkut Buyukkokten est un employé du célèbre moteur de recherche)
et de son positionnement sur un secteur en plein boum.
Dans les pays francophones, le succès est beaucoup plus limité |
En France et dans les pays francophones comme la Belgique, la Suisse et
le Canada, le succès est beaucoup plus limité : peu de sites se sont
lancés et leur approche du marché est encore un peu amateur (mélange
des genres entre cible grand public et professionnelle, à part
Viaduc.com). Une explication à cette tiédeur vient du fait que l'effet
de mode n'a pas encore traversé l'Atlantique (certes, il y a toujours
un décalage de quelques mois).
Une autre raison vient du fait que les français et leurs voisins
francophones appartiennent à des sociétés à contexte fort (ensemble de
rigidités structurelles dans les relations inter-individus qui, par
exemple, interdisent de parler affaires dans un autre cadre que
strictement professionnel) où le networking n'est pas une pratique
sociale aussi naturelle et développée que dans les sociétés
anglo-saxonnes (un autre indice, l'absence formelle d'industrie du
lobbying).
Si les sites de business networking déferlent en ce
moment, cela tient à la combinaison de plusieurs facteurs :
De plus en plus de professionnels utilisent Internet dans leurs
activités quotidiennes et gardent les informations sur leurs contacts
en ligne (ces informations devenant de plus en plus riches et
complexes) plutôt que simplement dans leurs têtes ou sur papier.
Le succès des sites de rencontres comme Match.com aux USA ou Meetic
en Europe a agi comme un détonateur.
Les notions qui sont derrière le social networking reposent sur des
recherches universitaires qui sont désormais de mieux en mieux
comprises.
Le problème du spam, de plus en plus présent, pousse les
professionnels à trouver des solutions plus fiables pour communiquer
avec leurs réseaux.
"Nous n'avons pas besoin de connecteurs supplémentaires afin de pouvoir échanger avec plus de monde, mais plutôt de filtres" |
Tout cela mis bout à bout fait qu'on est passé d'un monde des affaires
composé de groupes plus ou moins isolés les uns des autres à un système
intrinsèquement connecté où n'importe qui peut écrire à n'importe quel
autre et où l'essentiel des échanges tend à être du spam.
Une évolution majeure comme celle que l'on vit en ce
moment contient autant d'aspects négatifs que positifs.
Et comme toujours, il suffit qu'une peste apparaisse pour générer son
propre antidote. Dans le cas qui nous intéresse, nous n'avons pas
besoin de connecteurs supplémentaires afin de pouvoir échanger avec
plus de monde mais plutôt de filtres afin de rendre leurs utilités aux
connecteurs en place (et ainsi pouvoir de nouveau échanger sans être
pollué avec les gens que l'on a choisi et seulement ceux-là).
Pour les utilisateurs des applications de social networking, ces sites
peuvent être vus comme des outils intégrant précisément ces filtres et
mécanismes permettant de faire le tri dans les échanges.
Ces outils rendent plus faciles ce que les utilisateurs font déjà
(communiquer par exemple) ou permettent enfin de faire ce qu'ils
voulaient faire (trouver des nouveaux contacts dans un contexte
relativement sécurisé par des personnes qu'ils connaissent déjà).
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