Intelligence artificielle : fantasme ou réalité ?

L'intelligence artificielle est sur toutes les lèvres, les Gafas communiquent beaucoup sur leurs avancées dans le secteur. Voici comment distinguer les progrès réels des infos marketing qui pleuvent sur ce sujet.

Le sujet de l’intelligence artificielle (IA) est à la mode. Impossible d’y échapper. Les acteurs technologiques, largement relayés par les médias, ne s’y trompent pas en communiquant dessus à grands renforts de communiqués de presse, annonces tonitruantes ou autres tweets … Les poids lourds de l’industrie investissent des milliards d'euros dans cette technologie en espérant qu’elle sera le prochain point fort de leurs solutions. Forrester prédit une augmentation des investissements sur l’IA avoisinant les 300 % en 2017[1].

En 2014, Google a acheté la startup DeepMind. En 2015, Microsoft a lancé le projet Oxford. Facebook travaille sur le sujet depuis 2013. Les efforts d’Apple pour que Siri devienne 100% autonome en tant qu'assistant pour ses utilisateurs sont largement connus. Ces entreprises ont même créé un partenariat IA visant à rendre accessible cette technologie au plus grand nombre[2].

L’IA prend de l’ampleur. Il semble limpide pour tous que les machines atteindront tôt ou tard le niveau de capacité de réflexion des humains. Mais qu'est-e qui se cache réellement derrière cet acronyme ? Qu’entendent concrètement les entreprises par IA ? Et le grand public ? Dans quelle mesure la technologie a-t-elle progressé ces derniers mois, voire ces dernières années ? D'où vient tout la "hype" autour de ce terme ?

IA : nouveau nom, même concept

Il existe une nette tendance à confondre les concepts autour de l'IA. Le cinéma et la science-fiction, tendent à nous laisser penser qu’à un moment donné, au cours du XXIème siècle, les robots seront similaires à l’être humain : même apparence, même processus de réflexion. Ils seront comme nous et pourraient même surpasser notre capacité de réflexion. Mais, parmi les concepts que ces films et livres nous ont vendus, le machine learning (ML) et l’intelligence artificielle ont souvent été utilisés pour décrire la même chose. La source de cette confusion générale, régnant actuellement, prend sa source très certainement dans ces références culturelles variées.

Le terme IA englobe un vaste ensemble de théories et de techniques visant à mettre en œuvre des machines capables de réaliser des tâches de façon intelligente. Dans ce domaine, il y a plusieurs types de classements, mais surtout deux grandes familles.

La première : l'IA appliquée. Par exemple, les célèbresvoitures autonomes qui sont uniquement capables d’imiter les capacités de gestion et de contrôle de l'homme derrière le volant.

La seconde : l'IA générale. Famille où les concepts commencent à se mélanger, à devenir un peu plus complexes. Nous y trouvons notamment le célèbre champ d'étude connu sous le nom d'apprentissage automatique ou encore machine learning.

Le ML est donc une branche de l'IA. Il vise à développer des techniques permettant aux ordinateurs d’apprendre. Ce n’est ainsi rien d’autre que l'application réelle et actuelle de l'IA. Le ML est basé sur l'idée qu’un accès à de grandes bases de données (big data) peut permettre aux machines d’intégrer les informations et ainsi de pouvoir prendre des décisions par elles-mêmes. Il s’agit, à l’heure actuelle, de la branche la plus développée du domaine de l'IA. Parmi les applications ML, nous pouvons trouver des technologies qui arrivent notamment à lire des textes, reconnaître le contenu d’images ou à identifier le ton d’un message. Par exemple, les opinions en ligne sur certains restaurants ou encore la reconnaissance d’un genre musical en sont issues. La reproduction des émotions qu’une chanson produit chez la personne qui l'écoute est une fonctionnalité sur laquelle Spotify planche depuis maintenant un certain temps.

Actuellement, le secteur de l'IA se concentre ainsi sur le développement de fonctionnalités qui permettrait aux machines de pouvoir, à terme, imiter les processus de prise de décisions et effectuer des tâches d'une manière plus "humaine".

Alors, où en est l’IA ?

S'il y a un point où tous les experts s’accordent c'est qu'il reste encore un long chemin à parcourir. L’avis des vrais experts du sujet, ceux ayant une légitimité, est clair : ce que les gens entendent par IA n'existe pas encore vraiment[3].

Lors du Forum Netexplo 2017, les créateurs de Siri (Apple) et M for Messenger (Facebook) ont discuté en long, en large et en travers des derniers développements liés à l’IA. Si des progrès récents sont à signaler,  le concept d’une machine pouvant penser par elle-même n’est encore aujourd'hui rien de plus que de la pure science-fiction. Mais pourquoi ?

Sans aller plus loin, en se basant uniquement sur les chiffres dont nous disposons, les algorithmes utilisés aujourd'hui sont les mêmes que ceux utilisés il y a 30 ans. La seule différence est que les machines ont maintenant accès à de vastes quantités de données et qu'elles sont capables d’exécuter plus rapidement des calculs plus élaborés à partir de celles-ci. Malgré cela, les experts ont indiqué, lors de cet événement, qu’aucune machine n’est encore proche de ce que le cerveau humain est capable d’assimiler et de traiter. Leur exemple : la capacité d’apprentissage d'un enfant comparée à celle d’une machine. Ils ont ainsi mis en exergue que le cerveau d’un enfant est capable de reconnaître un chat après seulement lui avoir expliqué ce que c’était et lui avoir montré un exemple concret du concept présenté. Pour les machines, de récents essais ont démontré que l’intégration du concept requiert une présentation de 1 000 images différentes de chats. Un fossé relativement important, donc.

Les prévisions suggèrent qu’il faudra encore attendre environ 10 à 15 ans pour que des assistants virtuels soient en capacité de comprendre les besoins du grand public. Aujourd'hui, Siri ou M pour Messenger ne fonctionnent, selon ces prévisions, qu’à moitié. Ces technologies sont soutenues par une équipe humaine prenant le relais en cas de défaillance.

En outre, les experts ont indiqué que les attentes des consommateurs sont trop élevées. Conséquence de l'image vendue par Hollywood et les films de science-fiction centrés sur le thème de l’IA ?  Merci Spielberg et Kubrick !

Y a-t-il un véritable potentiel ?

La réponse à cette question est simple : le potentiel de l’IA est réel. Tech Insider indique que sur les 600 entreprises technologiques américaines les plus importantes, 450 investissent déjà dans cette technologie[4]. Toutes les prévisions indiquent que cette tendance se propagera comme une traînée de poudre en Europe. Microsoft, Apple, IBM, Adobe ou encore Tesla ne sont pas les seuls à investir. Comme dans tous les domaines, quand quelque chose commence à intéresser les grands acteurs, des startups 100% dédiées à la recherche sur le sujet, voient le jour[5].

Aujourd'hui, le ML et l’IA ont déjà commencé à montrer leurs potentiels respectifs. Ils sont considérés comme extrêmement utiles. Il existe des technologies permettant la reconnaissance vocale, linguistique ou conversationnelle, d’autres simulant des conditions extérieures afin de prédire les conséquences d’une action ou d’une décision précise. Beaucoup d’entre-elles sont utilisées dans la stratégie commerciale des entreprises. Les applications et les possibilités de ces logiciels semblent infinies : dans le domaine médical (diagnostics, essais cliniques), la logistique (transports, stationnement), le secteur bancaire (détection des transactions frauduleuses), ou encore le monde du marketing et de la publicité. Grâce à cette technologie, les équipes marketing ne passeront plus leur temps sur des tâches telles que l'analyse des données ou l'installation / implémentation de logiciels. Les marketeurs pourront se concentrer sur les aspects les plus intéressants de leur domaine, comme la planification de leur stratégie de marché ou l’atteinte de leurs objectifs de ROI.

En parallèle, nous ne pouvons pas oublier que ce type de progrès technologique implique toujours la création de nouveaux postes professionnels. Loin de remplacer les personnes par des machines, l'IA exigera des experts pour accompagner cette technologie lors des premières étapes de mise en place, pour s’assurer de son bon fonctionnement et surtout pour continuer à la développer et à l’optimiser. L'idée n'est pas, et n’a d’ailleurs jamais été, de remplacer les humains par des machines. Il s’agit plutôt d'améliorer nos aptitudes et de décupler nos capacités (postulat du transhumanisme[6]) en tirant pleinement profit de ces intelligences non-humaines.

Bien que l'opinion d'experts suggère qu'il est peu probable de voir de réels progrès dans un avenir proche, il est certain que le domaine de l'IA commence à nettement se dessiner. Il se profile tel un cheval de course sur lequel il faut miser. Les possibilités d'améliorer notre qualité de vie, tant professionnelle que personnelle, font de cette technologie l'une des plus intéressantes et prometteuses à date.

Le chemin à parcourir parait encore long, c’est vrai. Mais, parfois, la technologie nous apporte son lot de surprises, comme la récente victoire de l'IA AlphaGo (Google) contre le champion du jeu de Go...

La seule question qui finalement vient à se poser est : est-ce que les limites des machines ne sont pas seulement celles de l’homme ?