Avec IBM Watson, la banque veut libérer les conseillers et capturer les clients

Avec IBM Watson, la banque veut libérer les conseillers et capturer les clients Le Crédit Mutuel et Orange Bank testent l'intelligence artificielle de Big Blue. Objectif des deux établissements bancaires : améliorer l'expérience client et créer de la valeur ajoutée.

L'intelligence artificielle toque à toutes les portes, même à celles des banques. Et IBM, avec son offre IBM Watson, a fait de ce secteur une priorité. En quelques années, il a signé avec des grands noms du secteur : l'écossais Royal Bank of Scotland, la singapourienne DBS Bank et plus récemment le français Crédit Mutuel. Leur point commun ? Ils veulent tous améliorer leur expérience client pour contrer des fintech toujours plus réactives et innovantes. Pour cela, IBM Watson interagit en langage naturel avec l'utilisateur, trouve la réponse à la question qui lui est posée  et s'adapte au profil de l'utilisateur. "Notre système est basé sur du machine learning et du deep learning, il est donc toujours en train d'apprendre. Or, pour changer l'expérience client, il faut s'adapter à son interlocuteur. C'est ce que fait le système Watson", explique Jean-Philippe Desbiolles, VP IBM Watson pour la France.

 Avec IBM Watson, les conseillers du Crédit Mutuel trouvent 60% plus rapidement les bonnes réponses

Le Crédit Mutuel est la première banque française à se lancer dans l'aventure Watson. Selon le syndicat FO de l'établissement, 20 millions d'euros auraient été investis en 2016 pour l'expérimentation. L'année dernière, elle a mené un pilote auprès de 150 conseillers clientèle dans 20 caisses différentes pour tester deux cas d'usage. Le premier concerne l'analyse d'emails. Les 20 000 conseillers chargés de clientèle du Crédit Mutuel reçoivent 350 000 emails de clients par jour. Et ils ont du mal à les traiter efficacement. Watson les collecte et les analyse pour aider les conseillers à les traiter et à déterminer leur degré d'urgence. Par exemple, l'intelligence artificielle comprend l'intention du client quand il lui dit qu'il a perdu sa carte bancaire et qu'il faut la bloquer. Ce mail sera classé comme une priorité à traiter. En revanche, le mail d'un client qui veut démarrer un projet immobilier sera placé plus bas dans la liste. Selon une enquête interne auprès des participants du pilote, 87% des répondants recommandent l'analyseur d'emails. Il leur a permis de se décharger pour se consacrer à des tâches à plus forte valeur ajoutée comme le conseil. 

Des conseillers virtuels très pointus

Le deuxième cas d'usage est l'assistant virtuel. Il vise aussi à assister les conseillers des 5 000 caisses et agences du Crédit Mutuel… mais pas à les remplacer. "Il y a un buzz savamment entretenu qui consiste à dire que l'homme est opposé à la machine. A travers cette expérience avec le Crédit Mutuel, nous voulons justement démontrer qu'ils sont complémentaires", insiste Jean-Philippe Desbiolles. Les chargés de clientèle peuvent poser des questions relatives à l'épargne et l'assurance à cet agent virtuel en temps réel. "La complexité du travail des collaborateurs sur le terrain est terrible car il doit gérer un portefeuille d'offres pléthorique. Il ne connait pas tous les produits financiers par cœur. Quand il a besoin, il peut donc poser une question pointue à Watson et il obtient une réponse très rapidement", précise Jean-Desbiolles. Le pilote a également démontré que les conseillers peuvent trouver 60% plus rapidement les bonnes réponses en utilisant l'assistant virtuel. Résultat : les conseillers peuvent se consacrer à d'autres tâches et les réponses fournies au client sont plus précises. Suite à ce succès, d'autres domaines comme l'assurance santé, le crédit à la consommation ou encore la prévoyance seront couverts par la technologie courant 2017.

D'autres banques ont été séduites par l'assistant virtuel d'IBM. La banque singapourienne DBS a décidé de mettre Watson au service de ses conseillers en gestion du patrimoine. Il est notamment chargé d'analyser une quantité de données (environnement économique, produits bancaires, comportement clients…) pour fournir des recommandations d'investissements personnalisées et détaillées. L'objectif est d'accélérer de plusieurs semaines l'élaboration des plans d'investissements clients et permettre aux conseillers de se concentrer sur le conseil à valeur ajoutée.

"Watson pourra vous recommander de mettre de l'argent de côté pour un projet dont vous aurez parlé avec lui"

Contrairement à DBS et au Crédit Mutuel, la Royal Bank of Scotland a de son côté mis Watson à disposition de ses clients, via le robot conseiller Luvo. Celui-ci supporte lBM Watson Conversation, un service qui, comme son nom l'indique, permet de tenir une conversation. La technologie a été intégrée au chat de la banque pour répondre à des demandes simples comme l'oubli de mot de passe, la consultation de comptes ou encore la mise à jour de données personnelles. Elle peut aussi répondre à des questions d'investissement inférieures à 500 livres sterling. Si la demande est plus complexe, le robot renvoie le client vers un conseiller humain. Dans ce cas précis, la banque a fait le choix de supprimer des postes de conseillers. Cette décision a été prise suite aux lourdes pertes financières que la banque britannique a connues lors de la crise financière de 2008.

Orange Bank a aussi fait le choix de mettre Watson au service de ses clients mais compte aller encore plus loin. L'IA d'IBM sera intégrée dans l'application de la banque mobile. Ce conseiller virtuel sera disponible tous les jours et à toutes les heures de la journée. Il pourra répondre à de multiples requêtes. "Vous pourrez lui demander de faire des opérations à votre place, comme un virement. Il anticipera vos dépenses en fonction de votre historique. Il pourra vous recommander de mettre de l'argent de côté pour un projet dont vous aurez parlé avec lui. Il vous aidera à compléter des formulaires de souscription à certaines offres en s'occupant lui-même des papiers à remplir. Il sera même capable de comprendre vos émotions comme le stress avec un système de reconnaissance de mots-clés pour être le plus réactif possible", a détaillé Stéphane Richard, PDG d'Orange, lors du Hello Show 2017. Pour le moment, Orange Bank ne souhaite pas en dire plus sur les futures fonctionnalités de cet agent conversationnel. Il faudra attendre son lancement le 7 juillet prochain.