Derrière ChatGPT, OpenAI manœuvre pour dominer l'IA générative

Derrière ChatGPT, OpenAI manœuvre pour dominer l'IA générative Par l'intermédiaire de son programme Converge et de son Startup Fund, qui s'élève à 100 millions de dollars, OpenAI est en train de bâtir tout un écosystème à sa solde.

Sur son site internet, OpenAI annonce la couleur. L'entreprise californienne veut transformer le monde grâce à l'intelligence artificielle. Pour cela, elle a lancé le Startup Fund, un fonds d'incubation doté de 100 millions de dollars, abondé par Microsoft (son actionnaire principal) et des partenaires. Grâce à son programme Converge, dans lequel ce fonds a investi 10 millions de dollars, OpenAI accompagne déjà le développement d'une douzaine de start-up "prometteuses" depuis le mois d'octobre 2022. Son objectif est clair : prendre la tête d'un écosystème spécialisé dans l'IA générative

"Ils ont réussi à créer leur propre chaine de valeur, c'est un coup de génie"

Cette stratégie pourrait permettre à OpenAI de "distancer la concurrence", selon Stéphane Roder, président de AI Builder, un cabinet de conseil en stratégie spécialisé dans l'IA. Cette concurrence, incarnée en partie par Google via Bard et Facebook via LLaMA, "n'est pas en mesure de générer un tel écosystème". Investir dans les start-up de l'IA permet à OpenAI de prendre une longueur d'avance mais pas seulement.

En prenant la tête d'un tel écosystème, l'entreprise fondée par Elon Musk et Sam Altman va "pouvoir contrôler les produits créés par les start-up et vérifier s'ils sont conformes à sa déontologie", analyse Julien Salinas, fondateur d'une API spécialisée dans l'IA, NLP Cloud. OpenAI, qui était à son origine une fondation à but non lucratif, a "toujours été très focalisée sur l'utilisation éthique de l'intelligence artificielle".

Outre cet aspect moral, les investissements d'OpenAI répondent aussi à une logique purement pragmatique. Les start-up vont utiliser GPT dans leur activité et montrer ainsi au public "les différents cas d'utilisation professionnelle de l'IA, souvent incompris", explique Stéphane Roder : "La première version de ChatGPT, c'était une démo, un moyen pour que les gens se familiarisent avec GPT et avec l'IA de manière générale". "Pour OpenAI, il faut proposer des utilisations simples et concrètes au public", confirme Julien Salinas.

Une justification déontologique, pragmatique mais aussi économique. Avec ce programme d'incubation, l'entreprise va "se créer ses propres clients car il est fort probable que les start-up utilisent pour leur activité les modèles développés par OpenAI", ajoute Stéphane Roder. Mais pour Julien Salinas, il ne s'agit pas "de la motivation principale" : "Le but est plus large que ça : ils ambitionnent de mettre la main sur tout l'écosystème qu'ils sont en train de créer. Leur philosophie est semblable à celle d'Apple : ils ont une vision précise et ils veulent tout contrôler".

Toujours est-il que ces start-up, en tant que premières clientes (dans le sens chronologique du terme), pourront jouer un rôle de cobaye, ou plus précisément d'intermédiaire entre OpenAI et le grand public : "Elles vont signaler les axes d'amélioration et les nouvelles fonctionnalités à intégrer dans leurs modèles. Ils ont réussi à créer leur propre chaine de valeur, c'est un coup de génie", s'enthousiasme Stéphane Roder.

Derrière cette stratégie d'investissements, se trouve sans doute l'influence de Microsoft. Le géant américain, qui a lui-même investi 10 milliards de dollars dans OpenAI, "a toujours eu une stratégie d'incubation très puissante", glisse Julien Salinas. "Ce n'est pas un hasard. Je ne serai pas étonné que les start-up concernées par ce programme d'incubation doivent désormais utiliser du Microsoft". OpenAI ne devrait pas être le seul à profiter de sa stratégie.