L'IA en entreprise : en finir avec les idées reçues pour une adoption raisonnée
Entre fascination et interrogation, l'IA suscite enthousiasme et débats en entreprise.
Capable de bouleverser les pratiques en automatisant efficacement certaines tâches ou en accompagnant des activités jusque-là réservées aux humains, elle soulève également des enjeux majeurs : maturité technologique, défis environnementaux et responsabilités sociales. Dès lors, l’intégration durable de l’IA dans nos organisations nécessite avant tout une approche éthique, adaptative et rationnelle.
Une adoption en phase exploratoire
Pour les organisations, le potentiel de l’IA est très prometteur. Toutefois, contrairement aux prédictions de 2022 et l’arrivée de ChatGPT, l’adoption de l’IA dans les pratiques reste marginale. Actuellement, les entreprises multiplient les tests, preuves de concept et projets pilotes. Dans la gestion de projet par exemple, seulement 5% des collaborateurs l’utilisent quotidiennement, 36% occasionnellement et 48% rarement ou jamais.
Comment expliquer un tel décalage ? D’abord, par un manque de compétences et de connaissances sur les usages de l’IA. Pour une intégration réussie, les décideurs doivent en saisir les enjeux afin d’avoir une vision stratégique claire qui va mener à une transformation durable. Les collaborateurs doivent aussi être accompagnés pour prévenir les freins aux changements et les résistances possibles.
Les défis techniques restent considérables. Dans un environnement en constante évolution, quels investissements privilégier ? Une solution maison ou un outil du marché ? Enfin, la question des hallucinations (des réponses fausses ou trompeuses) se pose, bien qu’elles soient moins fréquentes, nécessitant pour certains modèles d’IA des entrainements spécifiques (fine-tuning, prompt tuning, etc.) pour être suffisamment fiables.
Des défis environnementaux et éthiques majeurs : un juste milieu à trouver
Le potentiel de l’IA et l’engouement qu’elle suscite ne doit pas occulter ses impacts environnementaux et sociaux. Sur le plan écologique, les ressources nécessaires pour son fonctionnement sont souvent pointées du doigt. Une seule requête sur ChatGPT, consomme 21 fois plus d’énergie qu’une recherche sur Google, c’est colossal. Au niveau des infrastructures, les centres de données, qui opèrent les modèles d’IA, nécessitent d’immenses ressources en électricité et en eau pour le refroidissement des serveurs. On oppose souvent Green AI (IA frugale) et AI for Green (IA pour le développement durable), mais c’est l’alliance des deux qui offre les clés pour relever les défis environnementaux.
Côté éthique, la gestion des données et la casse sociale interpellent. Les réglementations européennes (RGPD, AI Act, Data Act, Data Governance Act) encadrent l’IA : protection des données, des salariés, des libertés individuelles, respect de la propriété intellectuelle, de la souveraineté numérique et des conditions d’exercice des « travailleurs du clic ».
Ces effets sur la planète et la société interrogent : Quel périmètre d’utilisation pour l’IA ? Comment garantir un respect du droit ? Comment assurer une bonne qualité des données d’entraînement ?
Réguler les activités d’IA est fondamental. C’est la souveraineté et la durabilité des entreprises qui est en jeu !
L'expertise : un enjeu majeur pour la maturité et l’industrialisation des solutions d’IA pérennes
Sans expertise, pas d’IA fiable. Assurer la montée en compétences des différentes parties prenantes passe par la création d’un Centre d’Excellence sur l’IA (CoE AI). Dans quel but ? Répondre à 3 défis : l’acculturation et la formation des équipes, le partage des bonnes pratiques et l'incubation de nouvelles solutions.
- 1. Former pour mieux maîtriser l’IA.
Les équipes doivent maîtriser des compétences diverses afin d’adresser les enjeux techniques et fonctionnels sur des sujets internes ou externes. De nombreuses fonctions étant impliquées, l’approche transversale et pluridisciplinaire est essentielle pour mieux répondre aux objectifs des clients.
- 2. Partager et structurer les moyens
Au-delà des talents, la gestion des ressources est cruciale : ordinateurs équipés de processeurs graphiques, serveurs locaux et en ligne. Ces ressources, parfois couteuses, doivent être mutualisées et priorisées en fonction des objectifs de l’entreprise.
- 3. Innover pour garder une longueur d’avance
L’expérimentation est capitale : acheter un outil existant ou développer des solutions internes ? Dans le premier cas, la gouvernance des données et la cybersécurité sont centrales. Dans le second, l’usage de la méthode OKR (Objectives and Key Results) permet de définir des objectifs clairs et de mesurer l’efficacité des solutions pour ajuster la stratégie en continu.
Gard aux discours alarmistes ou aux promesses démesurées, l’IA doit être abordée avec lucidité. Dès aujourd’hui, nous devons structurer ses usages, investir dans les compétences et travailler en équipe. Nous avons l’opportunité d’en faire un levier de compétitivité et d’impact positif. À nous de l’exploiter intelligemment !