Le digital comme catalyseur de l'audit et du contrôle

La donnée comptable et financière est riche d'enseignements si l'on dispose des moyens et du temps pour la raffiner et l'analyser.

Alors que la distanciation sociale, le télétravail ou le chômage partiel touchent de très nombreux salariés, certaines directions de l’audit et / ou du contrôle sont entravées dans leurs actions, voire complément mises à l’arrêt. Et pourtant, le contrôle des filiales n’a jamais été aussi crucial et nécessaire qu’aujourd’hui.

En effet, la crise sanitaire actuelle est aussi, et surtout, une crise économique. Les risques de dérapage, d’erreurs ou de fraudes se nourrissent naturellement de ce contexte. Manipulation des comptes pour gonfler les performances face aux attentes de la direction, des actionnaires ou des marchés financiers, corruption active ou passive pour conserver ou obtenir des marchés, ou tout simplement erreurs de saisies comptables dans des conditions de travail dégradées... Les occasions et les tentations sont multiples.

Face à cette augmentation du risque, on ne peut pas accepter une diminution du niveau de contrôle dont, rappelons-le, l’objectif est double : la détection bien sûr, mais également la dissuasion. Les auditeurs et les contrôleurs doivent donc trouver des modes de fonctionnement alternatif efficients. Pour cela, des solutions de continuité de contrôle et de l’audit interne des filiales existent. Encore faut-il être en mesure de les déployer rapidement.

Le numérique pour échanger, le digital pour auditer

Faire une distinction précise entre "numérique" et "digital" est un terrain glissant. Cela étant, on peut dire aujourd’hui que les moyens numériques permettent aux collaborateurs de mieux communiquer tandis que les technologies digitales facilitent la mise en place d’outils d’automatisation des tâches d’analyse et de reporting.

On l’a vu, en quelques semaines seulement, les plus réfractaires au télétravail s’y sont adaptés, parfois avec un succès qui les a eux-mêmes surpris. Réunions "en visio", points hebdomadaires à distance, outils de gestion collaborative des tâches… Toutes les organisations, quelles qu’elles soient, disposent désormais d’une armada de plateformes leur permettant de fluidifier les échanges et de coordonner le travail de chacun.

Cependant, être en capacité de communiquer et d’échanger des informations ne suffit pas. Il faut disposer de la matière première du contrôle et de l’audit, à savoir la donnée. Immatérielle, la data est accessible de n’importe où et peut être stockée où on le souhaite. Le plus souvent plutôt bien structurée, elle est donc aisément exploitable.

Analyser plus de 100 filiales en trois semaines

Citons l’exemple de ce grand groupe français dont la majorité du département d’audit et de contrôle interne est aujourd’hui en activité réduite, sans possibilité de déplacement dans les filiales. En réponse à cette contrainte, la direction a décidé de mettre en œuvre une campagne importante d’analyse des pratiques et des flux comptables sur plus de 100 filiales dans le monde. Après trois semaines seulement, l’ensemble des données collectées a débouché sur les analyses suivantes :

  • Des événements locaux atypiques sont identifiés, nécessitant probablement des investigations complémentaires ultérieures.
  • Des problèmes transversaux, apparaissant dans l’ensemble des filiales, sont aussi observés, amenant à lancer une réflexion globale pour le groupe sur les processus concernés.
  • Des pistes d’économies potentielles sont découvertes, notamment sur le cycle achat et la relation avec les fournisseurs de nombreuses filiales, travaillant sans négociation globale.
  • Une refonte globale du programme d’audit est rendue possible, préparant efficacement le déconfinement et le retour à une situation "normale".

La donnée comptable et financière est riche d’enseignements si l’on dispose des moyens et du temps pour la raffiner et l’analyser. C’est ce que pratique d’ailleurs l’administration fiscale depuis plusieurs années avec la mise en place du fichier des écritures comptable (FEC) et la procédure d’audit à distance. Cette démarche ne doit pas être réservée aux auditeurs et contrôleurs externes !

Pour cela, il faut du temps disponible et des moyens efficaces. La période actuelle, en réduisant les déplacements, nous donne le temps nécessaire. Quant aux moyens d’analyses rapides et approfondies : ils existent, démontrent leur efficacité et sont très accessibles (en particulier dans un contexte de limitation des dépenses de déplacement).

La donnée, une fois collectée, permet de traiter d’autres besoins. Des analyses portant sur les flux entre filiales ou sur les flux achats peuvent être réalisées, tout comme des audits post-acquisition. Le champ des possibles est infini. Cela a été le cas pour le groupe précédemment cité. Après l’audit interne, c’est le département juridique puis la direction comptable qui ont souhaité s’autocontrôler ou renforcer la qualité de leur fonctionnement à travers le monde.