Automobile : le retail au défi de relever ses marges
Agir vite pour renforcer (ou simplement retrouver) ses marges : telle est l'urgence de la distribution automobile dans un contexte difficile.
Agir vite pour renforcer (ou simplement retrouver) ses marges : telle est l’urgence de la distribution automobile dans un contexte difficile. Entre une course au volume qui peut s’avérer risquée et une transformation digitale souvent trop fragmentée, la voie de passage est étroite mais possible : l'intelligence artificielle, intégrée au cœur d'un écosystème ouvert et collaboratif, offre aujourd'hui aux concessionnaires et distributeurs le levier structurel pour retrouver le chemin de la rentabilité.
Secteur auto : des ventes en recul, des marges érodées
L'année 2024 a profondément marqué les esprits dans le retail automobile. En France, les ventes de voitures neuves ont reculé de 3,2 %, s’établissant à 1,72 million d'unités, après le rebond éphémère de 2023, selon NGC-Data®. Avec 13,4 millions de véhicules vendus en 2024, le marché européen accuse, quant à lui, un recul de 17 % par rapport à 2019. Sur le marché du neuf, la chute continue avec une baisse de 7,1 % sur les 8 premiers mois de 2025. Le VO se porte un peu mieux avec une légère hausse de 0,2 % sur la même période. Mais il semble bien que la contraction soit structurelle, et pas seulement conjoncturelle.
Outre des marges qui se contractent, tant du côté des constructeurs que des distributeurs, cette compression des volumes s'accompagne d'une triple mutation coûteuse chez les concessionnaires :
- la formation et les infrastructures pour soutenir la vente de véhicules nouvelle génération (électriques et hydrides),
- des tarifs en forte augmentation induisant notamment des frais financiers de portage des stocks (sans compter les garanties prolongées et programmes de fidélité qui coûtent cher aux concessionnaires)
- et une multiplication des points de contact avant achat qui prennent un temps considérable aux équipes commerciales. Ce qui a pour effet d’accroître les coûts d’acquisition.
Autant de charges invisibles qui érodent silencieusement la rentabilité. Face à ces chiffres, une évidence s'impose : le modèle actuel du retail automobile doit permettre à ses acteurs de retrouver le chemin d’une performance économique renouvelée. La vraie question n'est donc plus de savoir s'il faut se transformer, mais comment le faire efficacement. Car les premières tentatives de réponse montrent déjà leurs limites.
La digitalisation dans l’automobile : une réponse insuffisante et trop fragmentée
Avant toute idée de transformation, la tentation du volume est grande. Mais c’est un levier à double tranchant. Si l'effet d'échelle reste évidemment un facteur déterminant de rentabilité, avec des marges plus confortables notamment pour les grandes structures, la course au « gigantisme » comporte ses propres risques : dans un contexte de taux d'intérêt élevés, le portage de stocks importants pèse lourd sur la trésorerie. Et pour les petites concessions, la vulnérabilité aux variations de marché s'accroît mécaniquement.
En parallèle, la digitalisation s'est progressivement imposée comme une solution évidente de renforcement de la rentabilité. Mais qui a pu s’avérer décevante quant aux gains réellement acquis. En raison bien souvent d’une multiplication des solutions technologiques dédiées : une pour le CRM, une autre pour la gestion des stocks, une troisième pour le marketing digital, etc. Un mille-feuille complexe dans lequel ces systèmes ne communiquent pas (ou pas facilement) entre eux, obligeant les équipes à jongler entre plusieurs interfaces et à saisir plusieurs fois les mêmes données. Résultat : une complexification des processus plutôt qu'une simplification, et des gains de productivité qui tardent à se matérialiser.
Cette fragmentation n'est pas qu'une question technique. Elle reflète une organisation historique où chaque département dispose de ses propres outils : la vente a son DMS, l'après-vente son système de gestion d'atelier, le marketing sa plateforme d'emailing, la finance son ERP, etc. Sans compter que chaque acteur de la chaîne de valeur (constructeurs, distributeurs, équipementiers) dispose, ce qui est normal s’agissant d’entreprises indépendantes, de ses solutions en propre. Cette évolution, naturelle et compréhensible d'un point de vue historique, aboutit aujourd'hui au résultat de données fragmentées, cloisonnées, et difficilement exploitables de manière transversale. Or c'est précisément cette vision globale et en temps réel qui manque pour prendre les bonnes décisions au bon moment. Au risque, en conséquence, d’une transformation digitale qui restera cosmétique, et surtout insuffisante pour maintenir ou renforcer les marges.
L’IA au service d’un écosystème digital 100 % intégré… et d’une rentabilité accrue
La vraie transformation ne consiste pas à empiler de nouveaux outils digitaux, mais à repenser l'architecture du système d'information. C'est ici que l'intelligence artificielle change la donne : non pas comme un gadget supplémentaire, mais comme le catalyseur d'une intégration systémique capable de transformer la rentabilité, reposant sur 4 piliers, moteurs d’un écosystème performant :
- Intégration et ouverture : une plateforme ouverte, basée sur des API standardisées, connecte en temps réel DMS, CRM, systèmes constructeurs et outils marketing. Les données circulent librement, éliminant les ressaisies et fluidifiant les processus.
- L'IA embarquée dans les processus métier : au cœur des opérations quotidiennes, l'IA prend en charge les tâches répétitives, telles que la qualification instantanée des leads, l’optimisation dynamique des prix, la gestion prédictive des stocks ou encore l’anticipation des besoins de maintenance. Les collaborateurs se concentrent alors sur l'essentiel : l'écoute client et le conseil client.
- Transparence et confiance : une gouvernance stricte conforme au RGPD avec hébergement européen, et surtout une IA « explicable ». Chaque recommandation doit en effet pouvoir être comprise par les équipes et ainsi conduire à une transparence qui conditionnera l'appropriation de l'outil.
- La collaboration à tous les niveaux : l'écosystème ne fonctionne que si tous les acteurs jouent le jeu. Il s’agit dès lors de travailler en co-création entre les constructeurs, les distributeurs et les plateformes pour définir des standards communs, et éviter le déploiement de solutions propriétaires.
Ces transformations produisent des impacts directs : réduction des coûts de portage de stock grâce à une rotation optimisée, diminution du temps moyen en stock, amélioration du taux de conversion des leads par une qualification instantanée, etc. Mais c'est sur l'après-vente que le potentiel est le plus considérable. Avec des marges comprises entre 30 % et 60 %, bien supérieures aux 2 à 5 % de la vente de véhicules, l'atelier représente souvent plus de la moitié du bénéfice net d'une concession. L'IA permet d'anticiper les besoins de maintenance, d'optimiser les plannings et de personnaliser les offres de service. Un gisement de rentabilité trop souvent sous-exploité.
Le retail automobile n'a plus le luxe d'attendre. Avec des marges nettes oscillant entre 2 % et 5 %, la moindre optimisation compte. L'intelligence artificielle intégrée dans un écosystème ouvert devient aujourd’hui un levier structurel pour retrouver des marges viables.