Philippe Guillanton,
36
ans, ancien
directeur
des opérations
de Yahoo Europe. |
Au bout de six années
"intensives" au service de Yahoo, Philippe
Guillanton a eu envie de lever le pied. Son parcours
dans la Net-économie ne lui en avait pas vraiment
laissé le temps. Entré chez Yahoo en 1996
en qualité de directeur commercial Europe, il
prend ensuite en main le développement de la
branche française entre 1998 et 2001. Au début
de cette année, il passe le relais à Isabelle
Bordry pour superviser les opérations européennes.
Il rejoint donc Londres pour collaborer avec Fabiola
Arredondo, la directrice Europe de Yahoo... qui démissionne
un mois après son arrivée. Un mois plus
tard, c'est Tim Koogle, PDG de Yahoo Inc, qui annonce
son départ. "Avec cette réorganisation
globale de Yahoo, les choses se sont un peu précipitées.
J'en décidé de me retirer, estimant que
le moment était opportun", commente Philippe
Guillanton.
En juin, une fois son mandat
officiellement achevé, il effectue un virage
en privilégiant une vie plus familiale dans le
Var. "Je passe désormais beaucoup de temps
avec mes trois (petits) enfants et j'aide mon épouse
dans le projet qu'elle a pris à bras le corps
: la remise en exploitation d'un domaine viticole dans
le Var", explique-t-il. Un retour à la nature
et une coupure brutale avec le mode de vie "marathonien"
de Yahoo. Au programme : balades, sport, musique et
une bonne dose de lecture.
Le
cordon avec le Net n'est toutefois pas totalement coupé.
"Je viens à Paris une fois toutes les deux
semaines, indique-t-il. Je réalise des missions
d'administrateur indépendant pour le compte de
start-up" (dont il garde les noms secrets). Mais
s'il a gardé un pied à terre à
Paris, il a clairement élu domicile dans le Var
et repousse les avances des chasseurs de têtes
qui lui proposent des fonctions à haute responsabilité
dans son domaine de compétence (à forte
orientation commercial/marketing, précise-t-il).
Car Philippe Guillanton n'est pas prêt à
reprendre du service pour vivre une nouvelle aventure
"à bout de souffle" comme celle de
Yahoo. Désormais, il vise plutôt des engagements
qui lui permettraient de concilier vies professionnelle
et familiale. Bref, il ne cache pas son envie de prendre
le temps et de profiter un peu du capital accumulé
au cours des années Yahoo, montant sur lequel
il reste évidemment discret. "J'ai exercé
une partie de mes stock-options mais j'ai opté
pour une gestion 'à la française' en m'alignant
sur une fiscalité favorable aux gens qui conservent
leurs stock-options plus longtemps, indique Philippe
Guillanton. En quelque sorte, je me suis mis à
l'abri tout en conservant un plan d'épargne retraite",
ajoute-il.
Rythme
intense et accélérations imprévues.
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En évoquant son
parcours professionnel au sein de Yahoo, Philippe Guillanton
est dithyrambique. "Une entreprise dans laquelle
j'ai énormément appris en travaillant
avec des collaborateurs d'une très grande qualité,
déclare-t-il. La seule limite, c'était
le nombre d'idée que nous avions dans une journée".
Il se souvient de sa prise de fonction chez Yahoo Europe
en tant que directeur commercial en 1996, période
pionnière où tout était construction
("les équipes, les services"), démonstration
("l'évangilisation du marché")
et découverte ("le surprenant management
à l'américaine avec une conception très
stanfordienne de la performance"). Comme si le
rythme déjà effréné ne suffisait
pas, il a dû faire face à des accélérations
imprévues. "En octobre 1997, par exemple,
se souvient-il, alors que nous étions encore
en régie chez Ziff Davis, j'ai dû filer
à Londres pendant trois semaines car nos deux
commerciaux anglais sont partis dans la même semaine.
Heureusement, nous les avons vite remplacés."
A partir de 1998, lorsqu'il
prend la casquette de directeur exécutif de Yahoo
France, il doit apprendre à gérer la croissance
Internet, qui est rapide... "Nous avons développé
en trois ans un service qui aurait normalement demandé
un quart de siècle", affirme Philippe Guillanton.
L'exercice est rondement mené, la croissance
à deux chiffres au rendez-vous et Yahoo France
passe de 18 à 80 collaborateurs en deux ans.
Malgré les vicissitudes actuelles de l'Internet
qui sont - selon lui - liées à la conjoncture
économique globale, Philippe Guillanton reste
persuadé que Yahoo a tous les atouts pour devenir
un grand groupe international.
L'ancien responsable de
Yahoo n'a désormais plus de lien contractuel
avec la société. Mais il a naturellement
gardé des contacts en interne (avec l'équipe
de Yahoo France ou avec David Filo, l'un des deux co-fondateurs
du portail), ainsi qu'avec d'autres pionniers du Net
("Patrick Robin est quasiment un voisin").
Mais il n'hésite pas à reconnaître
que ses nouvelles préoccupations sont plus "terre
à terre". "Nous venons de replanter
des vignes cette année. Nous n'aurons du vin
qu'en 2004-2005", explique-t-il. Loin, si loin
du "temps Internet".
Demain,
la suite de notre série sur les pionniers du
Net
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