Après le terrain commercial,
la bataille de l'ADSL se déplace sur le terrain
juridique. A la suite d'une saisine déposée
en novembre dernier par Club-Internet devant le Conseil
de la concurrence pour "pratiques déloyales"
à l'encontre de France Télécom,
l'instance de régulation a ordonné mercredi
la suspension de la commercialisation des packs ADSL
d'&Wanadoo (offre eXtense) dans les agences France
Télécom, soit 750 points de ventes physiques.
Pour
Club-Internet, ce réseau commercial de l'opérateur
historique permet de réaliser 70 % des ventes
de packs ADSL d'&Wanadoo.
La
polémique est assez technique au départ,
mais elle aboutit, à l'arrivée, sur une
concurrence que Club-Internet juge biaisée au
niveau commercial. La principale polémique porte
sur la passation de commandes de ligne ADSL. Dans sa
saisine fondée sur l'article L. 464-1 du Code
du commerce, Club-Internet demande au Conseil de la
concurrence la mise en place d'un "système
automatisé et instantané d'accès
aux informations d'éligibilité des lignes
téléphoniques à l'ADSL, permettant
simultanément la passation de commandes des accès
ADSL par le biais d'un serveur extranet accessible pour
ses propres besoins".
En clair, Club-Internet demande
l'installation d'un outil similaire à celui mis
à la disposition de &Wanadoo pour le passage
de commandes de lignes ADSL. L'objectif est de réduire
le délai de livraison de l'accès ADSL
au client final : il serait de 4 jours pour les clients
France Télécom et de 10 pour les autres
FAI. Dans sa décision, le Conseil de la concurrence
stipule que l'ensemble des FAI doit avoir accès
à cet extranet afin d'obtenir "les mêmes
conditions d'efficacité que celles accordées
à Wanadoo Interactive [la division ISP de
&Wanadoo], selon les mêmes conditions
tarifaires et selon les conditions techniques autorisant
le traitement de masse en ligne".
La période exacte de suspension de la commercialisation
de l'offre eXTense dans les agences France Télécom
n'a pas été fixée. Toutefois, le
Conseil de la concurrence précise les conditions
avant un redémarrage : la signature de deux contrats
au moins entre l'opérateur historique et des
FAI
(autres que &Wanadoo) pour l'utilisation d'un extranet
dédié et une période d'un mois
d'essai.
Pour Club-Internet, cette décision
est une véritable aubaine : la période
de suspension qui pénalise &Wanadoo coïncide
avec celle où le FAI français rattaché
à T-Online AG (filiale Internet de Deutsche Telekom)
va exploiter son opération "coup de poing"
autour de son offre ADSL avec modem gratuit. De son
côté, France Télécom a diffusé
un communiqué de presse indiquant qu'il "prenait
acte de la décision du Conseil de la concurrence"
et ajoute disposer d'un délai de dix jours pour
"examiner les termes et décider des suites
à donner sur le plan juridique". Sa filiale
Internet &Wanadoo a également fait savoir
par voie de presse qu'elle "reste confiante et
sereine dans sa capacité à développer
l'Internet haut débit en France". Elle a
ajouté que ses packs eXtense sont disponibles
dans 2.000 points de ventes (Darty, Komogo, Boulanger,
Hyper Media, Leclerc). Sa propre opération promotionnelle
(45 euros de remboursement sur l'achat d'un pack eXtense)
est maintenue jusqu'au 8 avril.
La commercialisation des offres
d'accès Internet est un sujet de conflit récurrent
entre Club-Internet et France Télécom.
En novembre 99, le FAI, qui était à cette
époque rattaché au groupe Lagardère,
avait saisi le Conseil de la concurrence pour dénoncer
d'une part des présumées "pratiques
déloyales" en terme de commercialisation
des offres bas débit et de l'autre des supposées
"subventions occultes" entre &Wanadoo
et sa maison-mère. L'instruction est toujours
dans les mains du Conseil de la concurrence. On peut
s'étonner de la rapidité de l''instruction
menée du Conseil de la concurrence sur le sujet
du haut débit. L'instance de régulation
a sans doute pris en compte le fait que la Commission
européenne surveille de près &Wanadoo
pour ses tarifs pratiqués dans ce domaine. En
effet, Bruxelles a récemment accusé la
filiale Internet de France Télécom de
pratiquer du dumping.
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