Si l'e-mail marketing séduit un nombre croissant d'annonceurs
on et offline en raison de son faible coût, la collecte
efficace des adresses électroniques à des fins
de prospection n'est pas si simple qu'il y paraît de
prime abord. Car dans ce domaine, plusieurs paramètres
délicats sont à prendre en compte.
Les plus récents sont d'ordre juridique. La Loi pour
la confiance dans l'économie numérique (LCEN), adoptée
en juin dernier, et la nouvelle Loi informatique et libertés,
validée par le Conseil constitutionnel en août,
fixent de nouvelles contraintes dont l'annonceur doit impérativement
tenir compte. Toutefois, en l'absence du décret d'application
ou de jurisprudence, déterminer les bonnes pratiques
reste un art délicat.
Les autres
paramètres à prendre en compte sont plutôt
d'ordre marketing, même si leur définition est
étroitement liée à l'évolution
du cadre réglementaire. Quel canal de collecte d'adresses
mail est le plus efficace ? Quelle doit être la longueur
des formulaires ? Faut-il aller vers la collecte multicanal
? Pour apporter des réponses aux 10 questions clefs,
le Journal du Net a interrogé plusieurs spécialistes
sur ce sujet. Mode d'emploi pour collecter efficacement des
adresses e-mails.
Obtenir le consentement préalable à l'utilisation
de l'adresse. Conséquence de la LCEN (lire à
ce sujet la tribune
juridique de Me Franklin Brousse), les entreprises
qui aujourd'hui collectent des adresses électroniques,
doivent impérativement obtenir le consentement préalable
des personnes dont elles recueillent l'e-mail pour pouvoir
ensuite les utiliser à des fins de prospection commerciale.
D'après la loi, ce consentement doit être la
"manifestation d'une volonté libre, spécifique
et éclairée". Problème : la
loi reste muette sur la façon d'obtenir ce consentement.
En l'absence de directive précise, l'ensemble des professionnels,
y compris le Syndicat national de la communication directe
(SNCD), recommande d'utiliser le consentement actif, en proposant
aux internautes une case à cocher, un menu déroulant
ou tout dispositif qui implique une action de l'internaute.
Au-delà, les informations concernant le recueil du
consentement doivent être très claires et surtout
visibles. "Ces informations doivent être de la
même taille que le reste du texte, indique Christophe
Cousin, président de la commission Internet du SNCD. Le fait
de cocher une case ne doit pas non plus être conditionné
par un gain, et les clauses concernant la collecte de données
ne doivent pas être situées en-dessous de la
case à cocher." Pour éviter toute équivoque
sur ce point et forcer les internautes à se positionner,
Hi-Media conseille aux éditeurs de faire précéder
la case à cocher d'une question claire du type : "Acceptez-vous
de recevoir des offres de nos partenaires ? Oui ? Non ?"
La validation du formulaire étant, in fine,
soumise au fait que l'internaute ait coché l'une ou
l'autre case.
Indiquer la finalité du traitement. La nouvelle
Loi informatique et liberté, adoptée au mois
d'août dernier, impose aux entreprises qui collectent
des données personnelles d'améliorer l'information
faite aux personnes. "L'article 32 prévoit notamment
que l'internaute soit averti de la finalité du traitement
des données collectées, indique Leslie Basse,
juriste à la division des affaires économiques
de la Cnil. Cela implique que la société doit
indiquer clairement sur le formulaire de collecte de données
le but de celle-ci. Cette collecte sert-elle, par exemple,
à la gestion de commande ou encore à des opérations
ultérieures de prospection. L'identité du collecteur
doit également être explicite, c'est-à-dire
que le nom de l'entreprise doit apparaître clairement,
ainsi que ses coordonnées. Enfin, si la base est transférée
en dehors de l'Union européenne, les personnes qui
y figurent doivent en être informées."
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En
savoir plus |
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ETO |
Qualification des adresses : faire simple. Plutôt
que d'assommer les internautes ou les consommateurs avec un
long formulaire pour qualifier les adresses et risquer qu'ils
n'arrivent pas au bout des questions posées, mieux vaut
proposer un formulaire très court, comportant juste les
données essentielles, tels que le nom, le prénom,
la civilité, l'âge, l'adresse postale. Une liste
à laquelle s'ajoute, évidemment, le recueil du
consentement de l'internaute pour pouvoir exploiter ces données
ultérieurement. "On peut également aller
vers des mécanismes de collecte encore plus simples,
comme cela commence à être le cas aux Etats-Unis,
ajoute Yan Claeyssen, directeur marketing d'ETO. Lors du premier
contact, on demande simplement à l'internaute son adresse
e-mail et son consentement pour ensuite, qualifier l'adresse
au fil de l'eau par des questions qui ne seront pas perçues
comme intrusives, car s'inscrivant dans un processus de relation
client." De manière générale, il faut
veiller à ne pas être trop long et à poser
les bonnes questions. Une étape où le pragmatisme
prime et pour laquelle il n'est pas inutile d'effectuer deux
ou trois tests utilisateurs.
Etre vigilant à la légitimité des questions.
Lorsque l'offre de produits ou de services est complexe, les
entreprises peuvent se permettre de proposer un questionnaire
plus qualifié. Toutefois, il faut veiller à la
cohérence des questions avec le métier ou l'offre
de l'entreprise. Celles-ci doivent être perçues
comme étant légitimes par l'internaute, sans quoi
les formulaires ne seront pas remplis ou seront incomplets.
"Il est possible de mettre une incentive intermédiaire
pour encourager les internautes à remplir tout le questionnaire,
suggère Carole Walter, présidente de Come and Stay. Mais
dans le cas où le questionnaire est long, il faut s'arranger
pour que la demande de consentement avec sa définition
figure au début du questionnaire afin de pouvoir au moins
utiliser l'adresse si le questionnaire n'est pas rempli."
Essayer la collecte ludique. Les jeux ont de plus en
plus la cote en matière de collecte d'adresses e-mails.
De l'avis de beaucoup de professionnels, le opérations
ludiques assurent des volumes importants, des adresses de qualité
et, au final, de très bons retours, pour un coût
très acceptable. "Le prix d'une adresse faiblement
qualifiée collectée via un jeu oscille entre 1
à 2 euros l'unité, indique Carole Walter de Come
and Stay. Si le questionnaire est plus pointu, il faut compter
10 euros." L'utilisation des jeux pour collecter des e-mails
nécessite toutefois le respect de certaines règles.
La plus importante est d'informer l'internaute de l'utilisation
qui sera faite de son adresse électronique et de lui
demander s'il souhaite recevoir des e-mails de prospection.
S'il refuse, l'adresse ne pourra jamais être utilisée
à cette fin. Attention, si les jeux offrent en général
de bons résultats, ils ne conviennent pas forcement à
tous les sites. Les jeux peuvent par exemple être discriminants
en terme de cible. "Ils sont très efficaces auprès
des moins de 25 ans et des CSP moyennes, indique Marianne Bellamy,
directrice commerciale et développement chez Hi-Media
direct. En revanche, ils le sont moins auprès des CSP
+ et des clients professionnels. Pour cette cible, il vaut mieux
justifier la collecte et le recueil du consentement par une
notion de service aux internautes."
Collecter via une newsletter. La newsletter est également
un outil efficace pour collecter des adresses e-mails de qualité.
Mais là encore, le collecteur doit clairement indiquer
à l'internaute les finalités de cette collecte
et demander l'accord préalable à l'internaute,
s'il souhaite utiliser ce fichier à des fins de prospection.
Autre problème : il faut être capable de produire
un contenu pour assurer une publication régulière
de cette newsletter.
Attention au parrainage. Si le parrainage est très
efficace, la position des textes de loi dans ce domaine n'est
pas très claire. Selon la Cnil, envoyer un e-mail à
une personne dans le cadre d'une collecte pour obtenir son consentement
pour être démarché, même si cette
adresse a été fournie par un parrain, n'est pas
valable. "Pour que le parrainage soit accepté, il
faut que le filleul rentre en contact avec la société
pour laquelle il a été parrainé et l'autorise
à utiliser son adresse électronique."
Favoriser les mécanismes multicanal. Pour les
entreprises qui disposent d'une présence offline, la
collecte d'adresses e-mails via des formulaires "papier"
distribués dans les magasins, ou via un asile-colis,
peut représenter une réelle opportunité.
L'annonceur doit toutefois être vigilant sur plusieurs
points. Comme pour la collecte d'adresses électroniques
online, il doit demander au préalable sur ce formulaire
offline l'accord explicite de la personne pour pouvoir la recontacter
par la suite par e-mail. Il doit également faire attention
à la bonne saisie de l'adresse lors du traitement des
formulaires. Pour limiter ce problème, il est possible,
comme le suggère Carole Walter, de mettre en place un
système de double saisie de l'adresse par l'opérateur.
Une opération que Lionel Avot, directeur commercial et
marketing d'Edatis, juge toutefois trop coûteuse. "Il
est préférable de mettre en place, en interne,
un petit programme permettant de tester automatiquement la syntaxe
de l'adresse ainsi que le nom de domaine et de savoir si l'adresse
existe déjà dans la base." Il est également
possible, pour limiter les coûts de traitement et les
erreurs, de rediriger les internautes contacter offline vers
un site de jeux aux couleurs de la société où
l'adresse mail sera alors confirmée. Enfin, avant toute
location à des tiers des adresses ainsi collectées,
mieux vaut tester l'adresse pendant quelque temps en interne
pour être sûre que cette boîte au lettre est
active.
Ne pas viser tout de suite l'homogénéité.
Dans une stratégie de collecte multicanal, il est difficile
d'obtenir d'emblée un niveau de qualification homogène
de la base formée. Mieux vaut viser, à chaque
étape, une collecte des données directement exploitables
sur le canal. Ces données pourront par la suite être
enrichies pour améliorer la connaissance du client et
homogénéiser la base constituée.
Rédiger une charte de déontologie multicanal.
Pour éviter tout problème de cohérence
entre les différents canaux, et des coûts inutiles,
il est préférable de rédiger une charte
de déontologie sur la collecte d'adresses e-mails qui
pourra être utilisé par tous les canaux dans l'entreprise.
Cette charte sera une véritable feuille de route et servira
à assurer une cohérence entre chaque canal.
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Ce
qu'il vous faut retenir |
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Le recueil
du consentement de l'internaute doit être
actif. Il est impératif de préciser
clairement sa finalité. Toutes les informations
concernant la collecte de données personnelles
doivent être visibles, accessibles et claires. |
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La finalité
du traitement, même s'il ne s'agit pas
de prospection, doit être indiquée
à l'internaute, ainsi que l'identité
de l'entreprise. |
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Privilégiez
les formulaires courts (nom, âge, sexe,
adresse, civilité). Le recueil du consentement
doit figurer en haut du questionnaire. |
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N'hésitez
pas à utiliser les jeux pour collecter
des adresses, sauf si votre cible est plutôt
CSP + et professionnelle. |
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Attention
au parrainage. On ne peut envoyer un e-mail
à un filleul pour obtenir son consentement. |
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Lors de la
collecte offline d'adresses e-mails, demander
l'accord préalable et explicite de la personne
pour pouvoir la recontacter. |
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Pour les adresses
collectées offline, installez un logiciel
qui validera la syntaxe et les noms de domaine des
mails récupérés. |
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N'hésitez
pas à rediriger vos clients offline vers
un jeux online pour collecter leur e-mail. |
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Pour une plus
grande cohérence entre les canaux, rédigez
une charte de déontologie multicanal
sur la collecte d'e-mails. |
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