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Sommaire Télécom-Fai |
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Quel prix pour le dégroupage total ? |
Dans le cadre de la consultation initiée par le régulateur sur le coût de location de la boucle locale, les opérateurs alternatifs réclament une baisse de 30 % par rapport au tarif actuel. France Télécom s'y oppose.
(16/06/2005) |
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Le dégroupage total, oui, mais à quel prix ? La consultation
publique menée par l'Autorité de régulation des communications
électroniques et des postes (Arcep) sur les méthodes de valorisation
de la boucle locale de cuivre donne lieu à une véritable guerre
froide entre France Télécom et les opérateurs alternatifs, par
expertises économiques interposées. Car l'enjeu est de taille.
Initiée en avril et achevée le 7 juin dernier, la consultation
du régulateur a pour objectif de déterminer une méthode de calcul
du tarif du dégroupage total pour les années 2006 à 2008, autrement
dit le coût de location de la portion finale du réseau de France
Télécom, qui permet à un opérateur alternatif de toucher directement
le consommateur. Les prix avancés par l'une et l'autre des deux
parties accusent un écart sensible de trois euros.
Avec quelque
152.000 lignes dégroupées au 4 avril 2005 (source : Tableau de bord
du dégroupage, Arcep), "le dégroupage total est un échec, déplore
l'Aforst (Association française des opérateurs de réseaux et
services télécoms). Sans intervention rapide du régulateur, il faudra
encore attendre deux ans pour pouvoir investir massivement dans
le dégroupage total, qui seul permet la concurrence la plus
complète et la plus aboutie en permettant aux opérateurs alternatifs
de maîtriser de bout en bout la chaîne technique, donc de favoriser
l'innovation et la qualité de service. Or, il relève de la responsabilité
du régulateur d'assurer une concurrence effective sur les offres
de services d'accès." Voilà l'Arcep prévenue.
Le tarif actuel du dégroupage a été fixé en 2002 selon la méthode
de calcul du coût de remplacement, qui se base sur la construction
d'un réseau à neuf. Pour l'Arcep, cette méthode "présente de
sérieux inconvénients", car elle suppose un investissement par
l'opérateur historique dans son réseau de près de 30 milliards
d'euros, "alors que cela ne se produira pas". Elle aboutit en
effet à un prix avant retraitement de 12,16 euros, c'est-à-dire
quasiment le prix de l'abonnement. Ce qui "ne laisse pas un
espace économique suffisant entre les deux", indiquait le régulateur
lors du lancement de la consultation. C'est pourquoi l'Arcep
avait d'ores et déjà abaissé ce tarif à 10,5 euros en 2002.
Depuis le début du mois de juin, il est désormais établi à 9,5 euros.
Une baisse consentie par France Télécom en contrepartie de l'aval
de l'Arcep à la hausse de l'abonnement téléphonique en février
dernier.
L'Aforst
réclame un tarif inférieur de 3 euros au tarif en vigueur |
Un effort encore insuffisant, estiment les opérateurs alternatifs.
"La décision de France Télécom de baisser à 9,5 euros le tarif
récurrent de la location de la paire de cuivre parallèlement
à l'augmentation du tarif de son abonnement ne suffit pas à
supprimer cet effet de ciseaux en ne ménageant pas un écart
suffisant entre les deux tarifs", selon une étude réalisée par
le cabinet Progressus Corporation pour le compte de l'Aforst.
"La méthode de calcul utilisée conduit à surévaluer d'un facteur
trois la réalité des investissements de l'opérateur historique
dans la boucle locale, en rémunérant un investissement de plus
de 1,2 milliard d'euros par an, alors que France Télécom n'investit
dans sa boucle locale qu'environ 300 à 400 millions par an",
poursuit l'argumentation du cabinet d'études.
L'Aforst entend donc faire valoir auprès de l'Arcep la méthode
des coûts courants, également recommandée par la Commission
européenne. Ce modèle part de la chronique des investissemnts
réels de France Télécom depuis plus de trente ans et évite par
là même toute surévaluation du coût de la paire de cuivre. Il
débouche sans surprise sur des tarifs plus bas. De fait, selon
cette méthode de calcul des coûts courants, l'association des
opérateurs alternatifs estime que le prix du dégroupage devrait
être fixé entre 6,5 et 7 euros hors taxes par ligne et par mois,
soit près de trois euros de moins que le tarif actuellement
en vigueur.
Un
prix trop bas nuirait à l'émergence de technologies
alternatives |
Une conclusion à laquelle France Télécom n'adhère évidemment
pas. "C'est le niveau de prix de l'accès totalement dégroupé
à la paire de cuivre, et non les méthodes de coût pour elles-mêmes,
qui est l'enjeu véritable de la consultation", indique un porte-parole
du groupe. Dans sa réponse à la consultation de l'Arcep, l'opérateur
historique souligne que le prix du dégroupage total en France
est sensiblement plus bas que dans les autres grands pays d'Europe.
"La comparaison des prix sur quinze pays de l'Union européenne
fait apparaître que seuls le Danemark, l'Italie et la Grèce
ont des prix inférieurs à celui de la France de 9,50 euros."
L'opérateur souligne en outre que la méthode de calcul avancée
par l'Aforst ne prend pas en compte deux critères spécifiques
à la France : les disparités géographiques et démographiques.
"Les coûts du réseau local sont plus élevés en raison de la
répartition dispersée de la population sur le territoire national.
Cela confirme que le coût de la paire de cuivre est plus élevé
relativement en France que dans les autres grands pays", réaffirme
France Télécom qui s'appuie sur une étude du cabinet Analysys.
Par ailleurs, l'opérateur historique réfute l'argument de l'Aforst
selon lequel la boucle locale est le seul réseau
de diffusion du haut débit dans les foyers, à horizon prévisible. "Le développement
d'autres infrastructures est déjà en cours, prévoyant l'importance
du WiMax ou des mobiles dès 2006 et à cinq ans de la fibre optique.
Quant au câble, longtemps objet d'un grand scepticisme en France
en raison de son passé, ses 8 millions de prises intéressent
à nouveau plusieurs opérateurs majeurs, comme en témoignent
à l'heure actuelle des mouvements de rachats et de concentrations
qui ne peuvent se justifier que si leurs acteurs ont l'ambition
de fournir des offres triple play en concurrence directe avec
les services supportés par des techniques xDSL. Fixer un prix
trop bas pour le dégroupage risque de décourager l'émergence
de ces alternatives d'accès au client final", conclut France
Télécom dans sa contribution à la consultation publique.
Les conclusions définitives de l'Arcep sont attendues d'ici
la fin 2005. |
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