QUESTIONS & REPONSES
JDN Finance 
Pacte d'actionnaires : les dessous d'un tour de table
Incontournable lors de l'entrée de nouveaux investisseurs au capital d'une société, le pacte d'actionnaires régit les relations entre fondateurs et financiers. Les points-clés de ce contrat en 5 questions.   (24/05/2006)
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 Aelios Finance
 Pascal Mercier
Dossier Capital-risque
La bonne santé du capital-risque IT sur les premiers mois de l'année (lire l'article du 31/03/06), et notamment des premiers tours, remet au goût du jour les questions relatives à l'entrée d'investisseurs professionnels au capital des start-up. Pour les fondateurs en mal de fonds, il est un point à ne pas négliger : avant la lune de miel, il faut rédiger un contrat de mariage. Dans le cadre d'un closing, celui-ci est appelé pacte d'actionnaires, et va régir les relations entre les actionnaires jusqu'au tour de table suivant. Il est encore temps d'en comprendre les ressorts et les enjeux. Explications.

1  Qu'est-ce qu'un pacte d'actionnaires ?
Il s'agit d'un contrat écrit, modifiable par avenant à l'unanimité, signé entre les actionnaires et les investisseurs d'une entreprise, qui complète les statuts de la société et a pour but de garantir des droits aux signataires et de définir leurs engagements, en fonction des clauses qu'il contient. Il pose les règles du jeu relatives aux relations entre les principaux actionnaires, en termes de répartition des pouvoirs, de protection des minoritaires et d'évolution de l'actionnariat.

Le pacte d'actionnaires est la plupart du temps rédigé par un juriste ou un avocat. Si la société n'est pas cotée en bourse, il n'est pas public et peut donc rester secret, ce qui lui confère son principal intérêt, la majorité des clauses qu'il contient habituellement pouvant aussi bien être inscrites dans les statuts de la société. Mais, contrairement à un changement des statuts qui requiert une majorité des deux tiers pour être approuvé, la modification d'un pacte d'actionnaires impose un accord à l'unanimité des signataires.

2  A quoi sert-il ?
"Le pacte d'actionnaires va chercher à garantir la liquidité de l'entreprise", explique Pascal Mercier, directeur associé d'Aelios Finance, société de conseil spécialisée dans les levées de fonds, les fusions-acquisitions, les introductions en bourse et les LBO. La liquidité d'un placement financier exprime sa capacité à être "converti" en monnaie. La liquidité d'une société, c'est sa faculté de pouvoir être achetée ou vendue facilement. "Quand un investisseur rentre dans une société, ce n'est pas pour toucher des dividendes, précise Pascal Mercier, c'est pour en sortir à un moment donné."

C'est pourquoi le pacte d'actionnaires traite à la fois de l'organisation du contrôle de la société par ses dirigeants et ses actionnaires, mais aussi - et même surtout - des différentes situations de sortie du capital. Dans ce cadre, il catégorise également les actions détenues par chacune des parties, catégorisation qui peut être aussi spécifiée de façon statutaire. Le principe : à chaque type d'action (A, B, C…) sont associés des droits, qui peuvent être politiques (siège au conseil d'administration...) ou économiques (dividende majoré, cession préférentielle…).

Le pacte peut notamment définir des règles de rachat particulières pour des actions dites "de préférence". C'est ainsi qu'une clause de cession préférentielle permet par exemple au détenteur d'actions de préférence, en cas de cession de l'entreprise, de bénéficier d'une répartition du montant de la vente proportionnellement plus favorable que sa part réelle de titres. Au final, la négociation du pacte d'actionnaires doit permettre de protéger de manière équilibrée fondateurs et investisseurs.

3  Quand faut-il rédiger un pacte d'actionnaires ?
"Dès qu'un investisseur institutionnel entre dans une société, il demande à ce qu'un pacte d'actionnaires soit rédigé, indique Pascal Mercier. Même les business angels les plus aguerris en réclament un, aujourd'hui." Un tour, un pacte, telle est la règle. Car le nouvel investisseur, si un nouveau pacte n'est pas réalisé, n'est en aucune manière lié au précédent. Le pacte fait donc partie intégrante des documents produits lors d'un closing, au même titre que la convention d'investissement, qui définit les modalités de la prise de participation des nouveaux actionnaires, et la garantie de passif, qui vise à garantir l'authenticité des éléments ayant permis de valoriser la société lors des négociations (propriété intellectuelle, absence de dettes cachées, respect des lois sociales, etc.). Quant à sa durée, seuls des éléments contractuels prévus dans le pacte peuvent le faire "sauter". En effet, si en pratique les pactes sautent lors de cession de titres, d'introduction en bourse ou de nouveau closing, ce n'est pas automatique.

4  Quelles sont les clauses les plus fréquentes ?
Les pactes d'actionnaires ont toujours existé, mais leur contenu a évolué, comme le retrace Pascal Mercier. "En 2000, on en voyait de très simples, d'une dizaine de pages. Après, il y a eu tout et n'importe quoi car les investisseurs ne parvenaient pas à valoriser les sociétés. Dans des pactes de 100 pages, parfois très déséquilibrés car les investisseurs se surprotégeaient, figuraient des clauses très compliquées, que l'on a même du mal à comprendre lorsqu'on les retrouve maintenant ! Aujourd'hui, les pactes se sont vraiment simplifiés."

> Les clauses de contrôle des titres
Ce type de clause a pour objet d'assurer la liquidité de l'entreprise. Citons la clause d'agrément, qui oblige l'actionnaire qui souhaite céder ses parts à obtenir au préalable l'agrément de la société ; la clause de préemption, qui confère des droits prioritaires sur le rachat des parts qui seraient cédées par un autre actionnaire ; la clause d'entraînement ("drag along"), qui permet d'obliger les minoritaires à céder leurs actions en même temps que les majoritaires, de sorte par exemple que les premiers ne bloquent pas une acquisition ; la clause de sortie conjointe, qui permet cette fois aux minoritaires d'exiger d'un cédant qu'il obtienne l'accord de l'acquéreur afin que ce dernier rachète également leurs actions, aux mêmes conditions ; la clause de liquidité, qui fixe un horizon défini aux fondateurs pour mener à bien la cession ou l'introduction en bourse de la société, à défaut de quoi les investisseurs s'autorisent à mandater une banque d'affaires pour effectuer la cession ; la clause de "buy or sell", qui profite aux financiers en contraignant un actionnaire B soit à racheter les parts de A, soit à vendre ses parts à A au prix proposé par A pour la cession de ses parts ; la clause de liquidation ou de cession préférentielle, qui garantit aux investisseurs de récupérer leur mise en cas de cession ou de liquidation ; la clause anti-dilution, par laquelle l'actionnaire majoritaire s'engage à réserver une partie de l'augmentation de capital, lors d'un nouveau tour, au bénéficiaire de la clause afin qu'il puisse maintenir son pourcentage de capital en participant au tour.

>Les clauses de contrôle de l'équipe dirigeante
Ces clauses permettent aux financiers de contrôler la manière dont leur argent est dépensé, et de s'assurer de la bonne collaboration des fondateurs ou dirigeants, tout en ne s'impliquant pas dans la gestion directe de l'entreprise. Elles complètent les statuts, qui organisent souvent les sociétés financées en SA avec directoire et conseil de surveillance. Par le biais du pacte, les investisseurs imposent des clauses d'information préalable pesant sur les dirigeants, qui fixent des seuils ou des décisions pour lesquels l'accord des investisseurs est obligatoire. Le contrôle s'exerce également via des clauses de non concurrence et d'exclusivité, et des clauses de "bad leaver", qui prévoient des sanctions si le dirigeant quitte la société dans certaines conditions.

5  Que se passe-t-il si le pacte n'est pas respecté ?
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 Pascal Mercier
Dossier Capital-risque
Le pacte d'actionnaires étant un contrat, s'il n'est pas respecté, la partie lésée peut engager une procédure auprès du tribunal de commerce ou du tribunal de grande instance. Le pacte peut également comporter des clauses d'arbitrage, permettant de résoudre le conflit plus rapidement. Cela dit, au bout de la procédure, point d'obligation d'exécution. "La sanction se limite à des dommages et intérêts, indique Nicolas Valluet, avocat associé au cabinet Valluet Achache & Associés, qui a participé à la rédaction de bon nombre de pactes d'actionnaires. Mais la véritable sanction, c'est le conflit d'actionnaires, qui n'est bon pour personne, car l'entreprise devient dans cette situation très difficile à gérer." Si les conflits liés au pacte d'actionnaires existent, sans être fréquents, Nicolas Valluet précise n'avoir jamais vu de litige résultant d'une contestation de la validité d'une clause. "Même si je suis parfois sceptique sur l'appréciation d'un tribunal sur la validité de certaines clauses, je n'ai jamais rencontré ce cas de figure." Signe que les négociations atteignent leur but.
Raphaële KARAYAN, JDN JDN Finance
 
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