Et si les sonneries ne constituaient plus l'eldorado de l'industrie
musicale ? Selon un livre blanc édité par
le Geste (Groupement des Editeurs de Services en Ligne), le
marché de la musique sur mobile dans son ensemble serait
surévalué. Il serait même en danger si rien
n'est fait pour changer sa structure. Le Geste préconise
ainsi plusieurs recommandations, parmi lesquelles une meilleure
entente entre les différents acteurs du marché...
Premier constat, donc : "le marché stagne".
Le Livre Blanc, réalisé par Jean-Christophe Defline,
directeur associé de Copilot Partners, Nicolas d'Hueppe,
président de la commission musique du Geste et directeur
général adjoint de Cellfish-Lagardère Active,
et Laure de Lataillade, directrice du Geste, remet clairement
en cause les chiffres avancés ces derniers mois et parle
d'un total de 165 millions d'euros pour la personnalisation
sur mobile en 2005 dans l'Hexagone (hors transport), dont 65
millions d'euros liés aux produits musicaux (et 26 millions
de sonneries téléchargées). Ce qui laisserait
le marché de la musique sur mobile assez loin derrière
celui des singles, estimé, lui, à 101 millions
d'euros l'an dernier.
La croissance ne serait donc que de 10 % l'an
dernier sur l'ensemble du marché de la personnalisation,
ce qui pourrait expliquer les résultats mitigés
de plusieurs éditeurs de services mobiles. Index Multimedia,
par exemple, a publié un chiffre d'affaires en baisse
de 1,3 % à fin mai 2006 et 2,9 millions d'euros
de perte d'exploitation au cours des mois d'avril et de mai
2006. La situation serait aussi préoccupante pour d'autres
éditeurs. Selon le Geste, "les conditions ne sont
pas réunies pour développer le marché."
Première remise en cause : le partage des ressources.
Sur une sonnerie Hi-Fi vendue environ trois euros, la TVA représente
49 centimes ; 30 centimes vont à l'auteur et/ou au compositeur,
88 centimes à l'opérateur (Orange, SFR, Bouygues
Telecom, etc.). L'exploitation de ces sonneries, qui sont des
reproductions de titres originaux, ont fait entrer dans la chaîne
de valeur de nouveaux acteurs : les producteurs, qui captent
35,8 % de la valeur, soit 90 centimes d'euro. Restent donc
36 centimes pour les exploitants, éditeurs et distributeurs.
Selon le Geste, cette part a largement diminué depuis
l'apparition des sonneries Hi-Fi, puisqu'il a fallu partager
avec les producteurs. Sur une sonnerie polyphonique (adaptation
d'un titre), les éditeurs recevaient environ 1,26 euro,
selon le Livre Blanc. Enlevés les coûts de marketing
et de promotion (75 centimes) et les coûts d'exploitation
(36 centimes), leur marge était de 15 centimes d'euros.
Sur une sonnerie Hi-Fi, la marge serait nulle.
Problème : le Livre Blanc évoque également
des prix grand public trop élevés. A l'heure de
la convergence fixe-mobile, les consommateurs ne seraient pas
prêts à dépenser trois euros pour une sonnerie
et deux euros pour le téléchargement d'un titre
musical complet, quand ils peuvent les acheter deux à
trois fois moins chers sur Internet, puis les passer sur leur
téléphone mobile. Enfin, le mobile ne serait pas
épargné par le piratage, du fait justement de
la communication croissante entre PC et téléphone
portable, notamment via la technologie Bluetooth, dont la mise
en oeuvre sur les téléphones mobiles apparaît
pourtant souvent délicate pour le grand public.
La conclusion du Livre Blanc est très claire : pour
les éditeurs, il s'agit de s'adapter ou de disparaître.
Soit les acteurs présents sur la chaîne de valeur
s'entendent, soit les éditeurs sont amenés à
disparaître. Cinq recommandations s'en suivent :
publier des indicateurs clés incontestés, aménager
dans la concertation l'innovation et la construction des produits
et adapter les conditions commerciales d'accès aux catalogues
de droits musicaux, développer le marché en étendant
les usages au plus grand nombre, mettre en oeuvre un code de
déontologie et adapter le modèle économique
du kiosque pour relancer la dynamique de marché. Cela
ressemble à un appel... |