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E-cooptation : les ressources humaines à l'heure du Web 2.0
Les sites cooptation mixent le réseau et l'Internet, les deux modes de recrutement les plus dynamiques. Leur objectif : démocratiser l'usage des réseaux relationnels et dévoiler un pan caché du marché du travail. Enquête.   (22/09/2006)
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A sept années de vaches maigres succèderont sept années de vaches grasses : le marché du travail ne semble pas déroger à la règle des cycles. En France, le chômage a entamé sa décrue réduisant du même coup la main d'œuvre disponible. Pour attirer à eux les meilleurs candidats, les entreprises doivent donc progressivement se résoudre à offrir plus et à optimiser leurs processus de recrutement pour déceler les meilleurs candidats, voire aller les chercher chez leurs concurrents. Cette raréfaction de la main d'œuvre qualifiée, corollaire de l'effet "papy boom", fait le jeu des sites de recrutement par cooptation. Ces services privilégient le réseau professionnel de leurs adhérents comme mode d'accès à l'emploi. Un véritable marché caché dont le potentiel peut être exploité et mis au grand jour grâce aux sites de cooptation inspirés du Web 2.0.

"Le réseau a de l'avenir ", affirme Pierre-Georges Lenthieul, responsable de la plate-forme Cooptin, un des principaux acteurs du marché français de la cooptation et filiale de Keljob. Un avenir qui ne date pas d'hier : la cooptation est un mode de recrutement par lequel les entreprises incitent - financièrement ou non - leurs employés à leur proposer des profils de candidats intéressants. Une pratique naturelle qui veut qu'un employé de qualité soit apte à filtrer et juger les CV de ses relations professionnelles et de ses amis, mais aussi un gain de temps dans la gestion des ressources humaines et une optimisation des équipes et des compétences.

Longtemps restée informelle, la pratique organisée de la cooptation en entreprise a débuté il y a 20 ans aux Etats-Unis. En France, le phénomène est plus récent et déjà pratiqué notamment chez Otis, Oracle, Ernst & Young, AGF et dans une myriade de PME. "Les recruteurs ont des difficultés à sourcer les talents nouveaux, car les profils à forte valeur-ajoutée sont rarement au chômage, ils doivent donc aller les chercher ailleurs", explique David Guillocheau, fondateur de Jobmeeters, un site de recrutement par cooptation.

Et cet ailleurs, ce sont les sites de cooptation, qui offrent une prestation différente des sites de recrutement classiques. "Les jobs boards en ligne ont contribué à améliorer la transparence du marché du travail, mais le succès de l'Internet et le nombre croissant de sollicitations à l'égard des recruteurs ont conduit à la mise en place de dispositifs de filtrage nouveaux", indique Yannick Fondeur, économiste à l'Institut de Recherche Economique et Sociale (IRES) et spécialiste des questions liées à l'emploi.

4 cadres sur 10 trouvent un emploi via leur réseau relationnel
Les résultats de l'enquête 2006 sur la mobilité des cadres menée par l'APEC confirment cette analyse. En effet, près de 4 cadres sur 10 déclarent avoir trouvé un emploi par leur réseau relationnel. Le réseau figure même au premier rang des moyens utilisés pour trouver un emploi, juste devant Internet, deuxième du classement, utilisé par 26 % des cadres nouvellement recrutés. Le cocktail "Internet + réseau" semble ainsi des plus pertinents. Rien d'étonnant, donc, à ce que les sites de cooptation, qui conjuguent les deux ingrédients, soient confiants dans leurs modèles économiques.

En France, deux acteurs principaux se partagent le marché de la e-cooptation. Cooptin, propriété de Keljob, et Jobmeeters ont tout deux été lancés fin 2005. Les deux sites proposent leurs plates-formes en marque blanche mise à disposition de sociétés tierces sous forme de sites dédiés. Le service de cooptation est alors accessible aux équipes internes de la société via leur Intranet. Les ressources humaines peuvent ainsi accéder au back-office et gérer les campagnes de recrutement en tirant profit des recommandations de leurs meilleurs éléments.

Un modèle fondé sur la rétribution du coopteur
Le modèle de Jobmeeters et de Cooptin repose sur la rétribution financière du coopteur, à condition que le candidat proposé par ce dernier soit embauché par l'entreprise. En cas de succès, le coopteur de Jobmeeters obtient une prime d'un minimum de 150 euros versée sous forme de chèques cadeaux. "La prime moyenne est de 316 euros et le maximum constaté est de 1.100 euros. La prime varie en fonction de l'émulation que les recruteurs souhaitent stimuler", explique David Guillocheau. Chez Cooptin, le montant de la prime varie de 0 à 1.500 euros avec une moyenne située à 350 euros. "Le montant reste très variable et ceci en fonction du secteur économique et en fonction de l'offre et de la demande sur des profils précis", ajoute Pierre-Georges Lenthieul de Cooptin.

Les plates-formes de cooptation se sont inspirées des meilleures pratiques observées sur les sites collaboratifs grand public tels que FlickR ou YouTube. Cooptin et Jobmeeters permettent, en effet, aux recruteurs de noter les coopteurs en fonction de la pertinence de leurs propositions. Un scoring qui pourrait ainsi permettre d'ajouter un degré de filtrage supplémentaire des propositions en fonction de l'historique de recommandation des coopteurs.

Des dispositifs viraux pour inciter les membres
Les sites de cooptation reposent également sur des dispositifs viraux qui incitent leurs membres à se transmettre des candidatures pertinentes pour un poste donné. "Nous atteignons en moyenne 4 échelons. La rémunération de chacun d'entre eux est laissée à la discrétion du recruteur qui peut décider de ne rémunérer que les x premiers maillons de la chaîne ou uniquement ses salariés par exemple", précise Pierre-Georges Lenthieul de Cooptin. Chez Jobmeeters, la chaîne ne peut comporter que deux maillons. Dans ce cas, le transmetteur de l'offre reçoit un minimum de 30 euros.

La principale distinction entre Cooptin de Jobmeeters réside dans le niveau d'ouverture de leurs bases de données respectives aux membres du service. Ainsi, chez Jobmeeters, l'intégralité des offres d'emplois publiées peuvent être consultés par les coopteurs, tandis que chez Cooptin, c'est le recruteur qui décide d'adresser les offres à certains coopteurs en fonctions de critères précis.

Le réseau de Jobmeeters se compose de 6.205 coopteurs et de plus de 100 entreprises parmi lesquelles la société de service informatiques Unilog ou encore les assurances GAN. "Nous considérons que chaque coopteur détient en propre un réseau qui peut varier de 50 à 80 contacts mobilisables", précise David Guillocheau. Cooptin de son coté, gère un réseau de 10.000 coopteurs. "Nous avons signé 47 nouveaux clients depuis le début de l'année 2006 pour 132 postes insérés", confie Pierre-Georges Lenthieul. Cooptin compte parmi ses clients grands comptes des sociétés telles que Altran ou le cabinet de conseil Europartners. Les deux sites de cooptation n'hésitent d'ailleurs pas à se disputer les mêmes clients, puisque tout deux comptent Unilog dans leur portefeuille d'affaires.

L'impartialité des coopteurs peut être mise en cause
Le marché de la cooptation formelle reste pour le moment une niche du marché global du recrutement en ligne. "Ce type de site est moins légitime qu'avant, car une partie des emplois jusqu'alors cachés s'est réduite sous l'effet de la pénétration du Web. En outre, nos outils de scoring des CV sont parfaitement objectifs, alors que l'on peut mettre en cause l'impartialité des coopteurs", tempère Patrick Pederson, directeur des opérations du site de recrutement traditionnel Monster.fr.

"Les recruteurs se limitent en général à 20 % de postes issus de la cooptation pour éviter que n'apparaissent des phénomènes de copinage, de clonage ou que des problèmes personnels ne ressurgissent dans le cadre du travail", ajoute Jérôme Bichet, fondateur en 2006 de CooptEmploi, site de recrutement situé à mi-chemin entre un job board et un site de cooptation. Pour parer à cette éventualité, il propose un modèle intermédiaire : les recruteurs ne sont pas facturés lors du dépôt d'offres sur sa plate-forme, mais uniquement lorsque un recrutement effectif intervient. En cas d'embauche, le recruté est rémunéré à hauteur de 40 % de la prime, le coopteur reçoit 10 % et CooptEmploi conserve les 50 % restant calculés en proportion du salaire versé au nouvel embauché.

Un point semble néanmoins remporter tous les suffrages : le marché français de la cooptation n'est pas encore mature. "Les français ne sont pas prêts à afficher ouvertement une récompense en ligne, ce procédé paraît un peu trop cavalier", explique Pierre-Georges Lenthieul de Cooptin. "Les mécanismes liés à la cooptation sont sensibles. En France, on les assimile souvent à des passe-droits cachés", analyse Yannick Fondeur, économiste à l'IRES.

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En dépit des gains de productivité que des plates-formes de cooptation peuvent impliquer, il existe également le risque d'une mise à l'écart de bons profils peu enclins à "réseauter". En prenant de l'ampleur, le système pourrait également favoriser les employés déjà en poste au détriment des chercheurs d'emplois. "Il faut apprendre à utiliser son réseau, un savoir-faire qui ne trouve pour le moment pas sa place dans la culture française", conclut Pierre-Georges Lenthieul.
Guillaume DEVAUX, JDN Sommaire Le Net
 
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