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Gilles Babinet
PDG
Eyeka
Gilles Babinet
"Eyeka croit en la monétisation des contenus et se rémunère sur celle-ci"
Si le mystère autour de MXP4 reste entier, Gilles Babinet a confié aux lecteurs du JDN ses secrets de serial entrepreneur et levé le voile sur un nouveau projet : Digicompanion.
(19/03/2007)
 
Quel est le modèle économique de MXP4 ? En quoi est-ce révolutionnaire ?
Gilles Babinet. Comme je l'ai déjà exprimé dans un ou deux interviews, c'est un point sur lequel je vais rester, malheureusement, très discret... mais c'est un très bon modèle, rassurez-vous ! Le principe de MXP4 consiste à rendre une chanson imprédictible, infinie et interactive.

Pour quelles raisons ne pas dire ce que vous allez réellement faire avec MXP4 ?
Parce que lorsque l'on a une bonne idée, il ne faut pas la donner à tout le monde, mais l'exploiter...

C'est quoi déjà votre parcours pro ? Qu'est-ce qui vous a amené à MXP4 ?
Vaste question. En quelques mots, je suis autodidacte, j'ai quitté l'école vers 15 ans, puis, pas fait grand chose jusqu'à 22 ans. Et enfin, j'ai créé ma première société, Escalade Industrie, en 1989, puis j'ai monté d'autres sociétés, Absolut Media, Exa Design, Absolut Design et enfin, Musiwave, et nous voici dans le temps présent.

En quoi MXP4 n'est pas que du buzz, mais un véritable projet ? Quand va-t-il voir le jour et quelles sont vos perspectives de chiffre d'affaires ?
Merci pour la provoc, mais ça ne prend pas ! MXP4 devrait lancer quelque chose dans le courant de l'été.

Mais si votre modèle économique repose sur une techno si facilement copiable, en quoi est-il solide ?
Digicompanion.com assurera la promotion numérique des marques."
     
Il y a quelques brevets pour commencer. En général, les VCs essayent de garantir leurs investissements, surtout lorsqu'ils mettent des montants significatifs en seed. Pour rappel, 6.5 millions de dollars.

Avez-vous d'autres projets de start-up ? Si oui, dans quels domaines ?
Prochainement, il va beaucoup être question d'une troisième société dont je suis le co-fondateur, Digicompanion.com. Il s'agit d'une société qui fait de la promotion numérique pour les marques. J'achète une boîte de céréales, je gratte un scratch code et je télécharge un film, une sonnerie pour mobile, ou un jeu. Le principe repose aussi sur une forte couche de CRM (customer relationship management) qui permet de faire du cross selling : par exemple on me conseille d'acheter du sucre pour aller avec les corn flakes, et j'ai à nouveau un épisode de film.

Combien avez-vous empoché lors de la vente de Musiwave ?
Et toi, tu gagnes combien ?

La vente de vos précédentes sociétés ne vous a pas rendu suffisamment riche pour pouvoir vous passer de fonds d'investissements ?
Il n'y a pas que l'argent dans la vie, il y a aussi le fait de créer, de rassembler des créateurs et de créer de l'enthousiasme autour d'un projet.

Pourquoi restes-tu en France pour créer tes structures quand tout le business se fait à Palo Alto ? Tu n'as jamais tenté de t'installer là bas ?

Pas de poujadisme ! Il est vrai qu'il y a beaucoup de raisons de se plaindre de la France, mais contrairement à une idée reçue, c'est assez intéressant pour ce qui concerne les start-up... Il existe ainsi des mécanismes assez performants, parmi lesquels le CIR, c'est-à-dire le crédit impôt recherche, le JEI, (jeune entreprise innovante), l'ANVAR-OSEO… Autre chose : la qualité des gens, et ça compte. En fait, je suis généralement assez critique concernant mon pays, mais pas pour les raisons que l'on pense. Par exemple, je pense que le débat sur l'ISF qui occupe chaque entrepreneur n'en est pas un. En d'autres termes, l'ISF, réaménagé, ne me semble pas une mauvaise chose, mais on sort du sujet du JDN, là.

Vous conseillerez à un jeune qui veut créer sa boîte de quitter l'école assez tôt ? Ou bien quelle formation suivre ?
Non, je pense que chacun a son parcours personnel. Il faut s'écouter, et foncer.

Qu'est-ce qui vous a permis de négocier le closing de Musiwave avec une telle décontraction ?
C'est ma nature. En fait, lorsque j'ai annoncé la vente, les choses étaient jouées depuis un certain temps déjà.

Est-ce facile de créer sa start-up en France, comparé aux Etats-Unis par exemple ?
C'est une vaste question et il y a plusieurs façons d'y répondre. En ce qui concerne les aspects administratifs, c'est effectivement difficile. Le plus déconcertant est sans doute l'attitude de certains organismes, parfois pas très aimables, ni aidant. Sinon, et comme dit plus haut, il existe quelques bonnes raisons d'espérer. Un environnement fiscal pas mauvais : j'ai fait différentes simulations de comparaisons avec les Etats-Unis et il est loin d'être évident que ce soit moins coûteux de faire ça là bas. En gros, ne vous fiez pas trop aux idées reçues. Le plus gros problème en France, c'est qu'on adresse un marché de taille limité, soit 60 millions de consommateurs versus 300 aux Etats-Unis.

Comment se rémunère Eyeka ?
Eyeka est une plate-forme de User Generated Content, permettant aux marques de se réapproprier ce média. De surcroît, elle ouvre des débouchées à ces mêmes marques sur le monde mobile. Eyeka croit en la monétisation des contenus et se rémunère sur celle-ci. L'idée c'est que sur YouTube, la qualité est limitée, car les auteurs ne sont pas payés en retour. Nous voulons faire en sorte que les marques les payent. Imaginons que GEO demande un reportage à quelqu'un sur le Chili et paye pour cela.

Il ne faut plus penser mobile contre PC, mais service global au consommateur."
Cela fait trois ans qu'on nous dit que le mobile va exploser et pour le moment c'est plutôt discret. A quand situez-vous le jour J et quel sera l'élément déclencheur ?
Il ne faut plus penser mobile contre PC. Il est plus intéressant de réfléchir "service global au consommateur".

Quelles sociétés vous ont-elles tapé dans l'œil au 3GSM de Barcelone ?
Curieusement, ce qui m'a surtout surpris cette année, ce sont les terminaux. L'arrivée du HSPDA et une nouvelle génération d'écrans. Sinon, une société comme Mobiluck, qui fait de la géolocalisation sans avoir recours à un accord avec l'opérateur, me semble assez impressionnante.

Concernant le développement d'Eyeka, gérez-vous l'internationalisation depuis la France ? Avez-vous des équipes dédiées ?
C'est de ce point de vue assez semblable à Musiwave : on voyage beaucoup. Lorsque nous aurons des accords répétés et significatifs, nous créerons des filiales... Patience !

MXP4, Eyeka, Digicompanion... Quand est-ce que tu dors ?
Pas beaucoup, particulièrement en ce moment. Je mange beaucoup de fruits, pas de viande. Bon régime si tu veux faire comme moi...

Quelle priorité pour MXP4 versus Eyeka, y a-t-il de la convergence dans l'air ?
Le deal avec mes investisseurs, c'est que je travaille sur Eyeka. MXP4, c'est quelque chose dont j'ai initié le début de l'idée et qui est développé par mes associés, Sylvain Huet, le CEO, et Philippe Ulrich, le président. Deux personnes supers ! Il peut y avoir de la synergie, par ailleurs, sur le plan technique (serveurs...) par exemple.

Comment voyez-vous l'avenir des sociétés IT en France ? Pensez-vous que le foisonnement actuel va perdurer ?
Je me désole que l'on ne développe pas plus ça. Je prenais un petit déjeuner ce matin avec le patron de Croissance Plus et nous partagions l'idée que les start-up sont des sociétés qui mériteraient d'être plus développées. Ce sont des sociétés qui offrent beaucoup d'avantages : pas de discriminations à l'embauche (je n'ai jamais connu de problème de racisme par exemple).

Et une promotion possible rapidement pour les gens audacieux. Par exemple, la jeune fille à coté de moi, est rentrée il y a trois ans au standard, et à présent, elle est eccount executive chez BallouPR, un bon job. Je pense par ailleurs, que le phénomène est malheureusement limité, mais en croissance. Il n'y a pas de raisons qu'il ne perdure pas. Enfin, je ne crois pas qu'il y ait de bulle, juste un peu d'excitation liée au développement rapide de ce secteur.

Après combien d'années avez-vous vendu Musiwave ? Pouvez-vous nous raconter l'histoire de cette boîte ?
Lorsque j'étais dans Absolut, je faisais du conseil pour les groupes de télécoms. France Télécom Mobile (futur Orange) m'a demandé de réfléchir sur la musique mobile. J'ai rapidement compris que c'était un secteur qui avait un potentiel important et je leur ai dit. J'ai suggéré qu'ils développent une activité dans ce secteur et ils m'ont en gros dit que ce n'était pas leur boulot. J'ai compris que beaucoup d'opérateurs allaient avoir le besoin de ce genre de service et qu'il y avait un investissement important à faire en R&D. En quelques mois, j'ai vendu Absolut (à EuroRSCG) et j'ai créé Musiwave (Musiwap à l'époque). J'y suis resté 5 ans et demi, jusqu'à la vente. Soit 35 ans à l'échelle de la vie d'une entreprise normale.

Comment on entre dans une de vos sociétés ? Quel process de recrutement ?
On dit que l'on ne vient pas parce que j'ai réussi et qu'on a envie de travailler avec moi, mais que l'on veut venir car on croit au produit et on le démontre dans les lettres de motivation et lors des entretiens. En ce moment, on cherche quelqu'un de très bon en marketing viral et un commercial sympa et malin.

Que signifie le sigle MXP4 ?
MX = mix ; P4 = ce qui vient après P3 ; soit MXP4, le remplaçant du MP3.

Avez-vous une action politique sur Internet comme Loïc Le Meur, vous poussez un ou une candidate ?
La participation du consommateur va devenir de plus en plus significative."
Je pousse plutôt Bayrou... Je suis très attaché aux valeurs républicaines, en particulier en ce qui concerne l'ascenseur social et je le crois plus à même de développer ce concept. Mais je suis ouvert au débat.

Quel a été le rôle d'Aélios dans la levée de fond de MXP4 ?
Pascal, tu es démasqué ! Aélios est une petite boutique de mafieux qui prend des fees complètement disproportionnées par rapport à leur valeur ajoutée. Evidemment, c'est une blague. Aélios est certainement la meilleure société de leveurs de fonds en France. Leur métier consiste à challenger l'entrepreneur et à les aider à reformuler leur offre. Puis, en fonction du projet, ils vont les aider à se présenter auprès d'un VC qui aura la sensibilité propre à saisir le concept.

Un petit déjeuner avec le président de Croissance Plus ? Ne s'est-il pas exilé en Belgique pour des raisons fiscales ?
C'est Geoffroy Roux de Bezieux. Il vit à Paris et il n'est pas contre l'ISF. Il souhaite juste, comme moi d'ailleurs, qu'il ne s'agisse pas d'un impôt idéologique, destiné à punir les riches.

Un musicien aura-t-il besoin de se plonger dans une doc de 150 pages pour produire un flux MXP4 ?
En fait non. Je pense que même moi, ne sachant pas jouer d'un instrument, peux produire un MXP4, très rapidement.

Pour vous, le Web 3.0 c'est quoi ?
Je ne sais pas très bien. Je pense que les modèles sont de plus en plus "pervasifs", en d'autres termes, la participation du consommateur va devenir de plus en plus significative. Ce qui est intéressant, c'est que la frontière entre le média et l'auditeur a été la première à tomber, et à présent, c'est la frontière entre le consommateur et la marque qui est en train de tomber.

Vous n'avez pas fait d'études mais vous êtes un serial entrepreneur, quels conseils donneriez-vous à des jeunes qui souhaitent monter une boîte sur le Web ?
Y croire à fond. Ne jamais avoir d'aigreur. Considérer ses ennemis comme ses meilleurs maîtres. S'entourer, partager, échanger. Être multitâche et pas trop spécialiste.

Quel est votre salaire ?
5.600 euros nets, je crois.

Hier les ring tones, aujourd'hui la musique en ligne, demain, quel domaine ?
C'est une question que je me pose souvent. Je ne suis pas certain de rester un entrepreneur toute ma vie. Je crois qu'on peut avoir plusieurs vies. J'en suis certain d'ailleurs. J'aimerais bien monter une société qui fait du microcrédit en ligne, mais pas une escroquerie comme le font les sociétés de crédit en ligne dans le monde occidental.

Et la vidéo ?
La vidéo, parlons-en. Ce que je crois, et je l'ai déjà constaté avec Eyeka, c'est qu'il existe un nouveau champ créatif avec le UGC (user generated content). C'est incroyable ce que les vidéastes, les photographes amateurs, peuvent faire des créations originales et différentes de ce que l'on voit à la télé. En soi, je trouve que c'est déjà une récompense pour avoir créé Eyeka.

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 Gilles Babinet
Gilles Babinet. Le modérateur est parti, j'en profite donc pour vous dire : n'hésitez pas à être audacieux ! Mon QI = 95 : ce n'est donc pas l'intelligence qui permet de monter des sociétés. Allez-y ! Merci à tous pour ce chat.
 
 
Propos recueillis par Rédaction JDN & JDN Solutions

PARCOURS
 
 
Voir la fiche de Gilles Babinet dans le Carnet des Managers du JDN.

   
 
 
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